Des scientifiques modélisent un type particulier de cancer du sein

Des scientifiques de l’EPFL ont mis au point un modèle in vivo révolutionnaire pour le carcinome lobulaire infiltrant, un type de cancer du sein grave et peu étudié. Leurs travaux ouvriront une étude auparavant inaccessible de la biologie des tumeurs et contribueront à la découverte de nouveaux traitements.

Le carcinome lobulaire infiltrant (CLI) est un type de cancer du sein qui prend naissance dans les glandes lactifères (lobules) du sein. Il représente 10 à 15 % des cancers du sein, avec un risque élevé de récidive tardive, des métastases uniques, une sensibilité élevée aux hormones, des réactions imprévisibles aux traitements, une histopathologie unique et une biologie distinctive. Il est également résistant à la chimiothérapie. Plus de 90 % des tumeurs CLI comportent des récepteurs d’œstrogènes. Elles peuvent donc recevoir des signaux hormonaux du corps, par exemple l’œstradiol, qui peuvent stimuler leur croissance et les métastases.

Malgré tout cela, le CLI est relativement peu étudié par rapport à d’autres cancers du sein. Très peu de modèles ont donc été développés pour l’étudier. Cela s’explique par l’incidence moindre du CLI en général, mais aussi parce que les tumeurs CLI ne se prêtent pas à la croissance en culture ou chez les souris, ce qui est indispensable au développement de modèles.

Aujourd’hui, des scientifiques de l’EPFL sont parvenus à dépasser les limites du CLI et ont mis au point un modèle de xénogreffe qui simule la tumeur avec une grande précision. Sous la direction du chercheur George Sflomos au laboratoire du professeur Cathrin Brisken de l’EPFL, les scientifiques ont greffé deux lignées cellulaires de cancer du sein métastatique dérivé du CLI et ont prélevé les tumeurs CLI des patientes pour les placer directement dans les canaux lactifères de souris qui sont immunodéprimées. L’étude est publiée dans EMBO Molecular Medicine.

Cette approche a permis aux chercheurs de développer une série de modèles in vivo du cancer du sein lobulaire. Il importe particulièrement que ces tumeurs CLI expérimentales retiennent l’expression des récepteurs d’œstrogènes, ainsi que leur réponse à l’œstradiol que montrent généralement les tumeurs CLI. «Les échantillons préservent les aspects histomorphologiques et les formes métastatiques particulières du CLI. Ces découvertes sont particulièrement importantes pour l’étude des métastases CLI qui sont principalement responsables de la mortalité liée au cancer CLI», explique George Sflomos, auteur principal de l’étude.

Les tumeurs modélisées ont également révélé certains secrets de biologie CLI. Elles semblent avoir des particularités similaires dans la matrice extracellulaire telles que leur capacité intrinsèque à produire de l’élastine, des collagènes et l’enzyme de modification de collagène LOXL1. Ainsi, lorsque les chercheurs ont bloqué toutes les enzymes LOX, ils ont observé une diminution de la croissance tumorale primaire, des métastases et du signalement des récepteurs d’œstrogènes. «La LOXL1 s’est avérée essentielle à la progression tumorale in vivo. Cela suggère que le ciblage du microenvironnement de la tumeur CLI peut être une approche thérapeutique encourageante qui ouvre de nouveaux horizons sur la biologie de la maladie qui seraient bénéfiques aux patientes atteintes de CLI», poursuit George Sflomos.

«Ce modèle nous fournit les premières connaissances approfondies sur le type de cancer du sein particulier le plus courant à récepteurs d’œstrogènes positifs», souligne Cathrin Brisken. «Cette modélisation expérimentale du CLI permettra d’identifier des mécanismes moléculaires spécifiques à la maladie, et de découvrir de nouvelles cibles thérapeutiques dans un avenir proche.»

Autres contributeurs

  • Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV)
  • Réseau Lausannois du Sein (RLS)
  • International Cancer Prevention Institute
Financement

Biltema ISREC Foundation Cancera Stiftelsen

Ligue suisse contre le cancer

Mats Paulssons Stiftelse

Stiftelsen Stefan Paulssons cancerfond

Fonds national suisse de la recherche scientifique