«Une occasion de découvrir des informations historiques cachées»

Beatrice Vaienti © 2024 EPFL/Alain Herzog - CC-BY-SA 4.0

Beatrice Vaienti © 2024 EPFL/Alain Herzog - CC-BY-SA 4.0

Beatrice Vaienti, assistante-doctorante en humanités digitales à l’EPFL, utilise des outils informatiques pour étudier les erreurs sur les cartes de Jérusalem datant du XIXe siècle.

Beatrice Vaienti travaille au Laboratoire d’humanités digitales (DHLAB) de l’EPFL. Elle participe au programme de bourses doctorales EPFLglobaLeaders qui finance des chercheuses et chercheurs en début de carrière pour devenir des leaders dans la transition vers des sociétés plus durables. Nous avons échangé avec elle sur son sujet de thèse et ses projets.

1. Pourriez-vous nous en dire plus sur votre sujet de thèse «Jerusalem 1840-1940: a Genealogy of Cartographic Inventions»?

J’étudie la représentation cartographique occidentale de Jérusalem au XIXe siècle. De nombreuses cartes sont disponibles pour cette période et je travaille sur une centaine d’entre elles. Ce travail est particulièrement intéressant pour une raison précise: la plupart de ces cartes sont réalisées par des voyageuses et voyageurs occidentaux, il ne s’agit pas de créations originales mais de copies partielles ou complètes de cartes antérieures. De ce fait, en général, ces cartes sont faussées ou contiennent des informations incorrectes. Ainsi, beaucoup de ces sources ne sont pas fiable mais offrent une occasion de découvrir des informations historiques cachées. En trouvant et en analysant les erreurs, nous pouvons mieux comprendre la manière dont la carte a été créée: qui a copié sur qui, et comment les inventions et les préjugés des représentations occidentales ont pu avoir des répercussions sur la réalité. Les outils informatiques peuvent nous aider dans cette tâche, par exemple en nous permettant de comparer de nombreuses cartes en même temps, et c’est ce sur quoi je travaille actuellement.

2. Comment avez-vous choisi votre sujet de thèse?

J’ai commencé mes recherches par la modélisation 4D de Jérusalem au XIXe siècle, suite à l’expérience en modélisation procédurale 3D pour le patrimoine culturel que j’ai acquise dans le cadre de ma thèse de Master en architecture et ingénierie du bâtiment à l’Université de Bologne. La modélisation 3D est idéale pour mettre en évidence les incohérences spatio-temporelles. Si nous trouvons deux sources contradictoires – dans mon cas, des cartes – nous ne pouvons pas les ignorer. Dans la représentation cartographique de Jérusalem, il s’agit d’un phénomène récurrent. Aussi, lorsque j’ai remarqué à quel point les erreurs étaient une caractéristique essentielle de ces cartes, j'ai décidé d'orienter mes recherches vers le domaine de la cartographie critique et de l'analyse cartométrique, dans le but de repérer les erreurs et les inexactitudes et de les étudier en tant qu'informations.

3. Qu’est-ce qui vous intéresse dans les cartes?

Je trouve les cartes intéressantes car elles paraissent objectives et innocentes. Nous avons l’habitude de penser qu’elles sont sans équivoque et nous remettons rarement en question leur contenu, par exemple lorsque nous utilisons Google Maps pour nous orienter. La cartographie critique est une discipline qui peut nous permettre de comprendre comment les cartes sont faussées ou filtrent la réalité, par exemple en choisissant ce qu’il faut représenter et ce qu’il faut omettre, et comment ces erreurs ont une influence sur la réalité. En tant que tel, cet outil analytique nous aide à comprendre la responsabilité qui est la nôtre dans l’étude des préjugés que les cartes comportent et leurs conséquences sociales. En voyant les cartes comme des lentilles intrinsèquement déformées, je pense également que nous pouvons découvrir davantage qu’en acceptant simplement leur contenu.

4. Pourquoi avez-vous choisi de faire votre doctorat à l’EPFL?

Après mon master, je cherchais un programme de doctorat portant sur la préservation du patrimoine. J’ai été fascinée par le travail réalisé au DHLAB, notamment celui lié au projet «Europe Time Machine». Puis j’ai eu connaissance de l’appel à candidature pour le programme de bourses doctorales EPFLglobaLeaders, axé sur la durabilité sociale, économique et environnementale. Cela me semblait être l’occasion idéale de combiner mon intérêt pour le patrimoine et les outils numériques avec un impact sociétal positif. J’ai eu la chance d’être sélectionnée et de faire mon doctorat à l’EPFL.

5. Quels sont vos projets après votre doctorat?

Rien n’est vraiment décidé, mais j’aime beaucoup la créativité qu’implique la recherche. Plus tard, j’aimerais faire quelque chose qui me permette de combiner la créativité et la possibilité de produire un impact positif sur la société.

6. Pourquoi avez-vous décidé de participer au concours «Ma thèse en 180 secondes» et comment s’est déroulée cette expérience?

Ce concours fait partie de la formation obligatoire dans le cadre du programme EPFLglobaLeaders. Je l’ai trouvé particulièrement utile, car pour moi il est important d’être capable de transmettre les résultats de nos recherches, en particulier lorsqu’il s’agit du patrimoine culturel. C’était aussi un excellent exercice de prise de parole en public, qui m’a permis de m’entraîner à un discours plus accessible et plus captivant sur mon travail. J’ai particulièrement apprécié le cours de formation avant le concours, où nous avons appris à utiliser des outils d’expression orale efficaces afin d’attirer l’attention du public et d’intégrer nos recherches dans un discours convaincant.

7. Quels sont vos loisirs quand vous ne travaillez pas sur votre thèse?

Pendant mon temps libre, je m’adonne à différents types d’activités artisanales, comme le tissage, le travail du bois et la gravure. Actuellement je consacre la majeure partie de mon temps libre à la poterie. Je trouve cette activité très reposante et créative.


Auteur: Stephanie Parker

Source: Collège des humanités | CDH

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