Une cartographie 3D plus rapide, plus économique et plus précise

Les auteurs Davide A. Cucci, Aurélien Brun et Jan Skaloud. © Alain Herzog/EPFL

Les auteurs Davide A. Cucci, Aurélien Brun et Jan Skaloud. © Alain Herzog/EPFL

Des chercheurs de l’EPFL et de l’Université de Genève pensent détenir la clé de la cartographie automatisée par drone. En combinant l’intelligence artificielle avec un nouvel algorithme, cette méthode promet de réduire considérablement le temps et les ressources nécessaires pour numériser avec précision des paysages complexes.


La cartographie tridimensionnelle (3D) est un outil très utile, notamment pour surveiller les chantiers de construction, suivre les effets du changement climatique sur les écosystèmes et vérifier la sécurité des routes et des ponts. Cependant, la technologie actuellement utilisée pour automatiser le processus de cartographie est limitée, ce qui en fait une tâche longue et coûteuse.

«La Suisse est en train de cartographier l’ensemble de son paysage à l’aide de scanners laser aéroportés, pour la première fois depuis 2000. Mais ce processus prendra quatre à cinq ans, car les scanners doivent voler à une altitude inférieure à un kilomètre pour pouvoir recueillir des données suffisamment détaillées et précises», déclare Jan Skaloud, collaborateur scientifique au Laboratoire de topométrie (Topo) au sein de la Faculté de l’Environnement Naturel, Architectural et Construit (ENAC) de l’EPFL. «Grâce à notre méthode, les géomètres peuvent envoyer des scanners laser jusqu’à cinq kilomètres d’altitude, avec le même niveau de précision. Nos lasers sont plus sensibles et peuvent émettre de la lumière sur une zone beaucoup plus grande, ce qui rend le processus cinq fois plus rapide.»

La méthode est décrite dans un article publié dans la revue ISPRS Journal of Photogrammetry and Remote Sensing et rédigé par Davide Cucci, chercheur associé principal au sein du Research Center for Statistics de la Geneva School of Economics and Management de l’Université de Genève, qui travaille régulièrement avec le laboratoire Topo, Jan Skaloud et Aurélien Brun, auteur principal, récemment diplômé de master de l’EPFL et lauréat d’un prix de l’association des ingénieurs géomètres de Suisse occidentale (IGSO).

A Leysin, un LiDAR monté sur un drone cartographie le paysage, le 28 mars 2022. © Topo /EPFL

Numérisation imparfaite
Les scanners laser LiDAR projettent des millions d’impulsions lumineuses sur les surfaces pour créer des jumeaux numériques en haute résolution – des répliques informatiques d’objets ou de paysages – qui peuvent être utilisés par exemple dans l’architecture, les systèmes routiers et la fabrication. Les lasers sont particulièrement efficaces pour collecter des données spatiales, car ils ne dépendent pas de la lumière ambiante. Ils peuvent collecter des données précises sur de grandes distances et «voir à travers» la végétation. Mais la précision des lasers est souvent perdue lorsqu’ils sont installés sur des drones ou d’autres équipements mobiles, en particulier dans les zones comportant de nombreux obstacles comme les villes denses, les sites avec des infrastructures souterraines et les endroits où les signaux GPS sont interrompus. Il s’ensuit des lacunes et des défauts d’alignement dans les points de données utilisés pour générer des cartes 3D (également appelées nuages de points laser), et cela peut entraîner une vision double des objets numérisés. Ces erreurs doivent être corrigées manuellement avant de pouvoir utiliser une carte.

«Pour l’instant, il n’existe aucun moyen de générer des cartes 3D parfaitement alignées sans passer par une étape de correction manuelle des données», explique Davide Cucci. «De nombreuses méthodes semi-automatiques sont à l’étude pour surmonter ce problème, mais la nôtre présente l’avantage de résoudre le problème directement au niveau du scanner, où les mesures sont prises, éliminant ainsi la nécessité d’effectuer des corrections ultérieures. Notre méthode est également entièrement pilotée par logiciel, ce qui signifie qu’elle peut être mise en œuvre rapidement et facilement par les utilisateurs finaux.»

Vers l’automatisation
La méthode du laboratoire Topo tire parti des progrès récents de l’intelligence artificielle pour détecter si un objet donné a été numérisé plusieurs fois sous différents angles. Elle consiste à sélectionner des correspondances et à les insérer dans ce qu’on appelle un réseau dynamique, afin de corriger les lacunes et les défauts d’alignement dans le nuage de points laser. «Nous automatisons davantage la technologie de cartographie 3D, ce qui contribuera fortement à améliorer son efficacité et sa productivité et permettra un ensemble d’applications beaucoup plus vaste», conclut Jan Skaloud.


Auteur: Célia Zwahlen

Source: EPFL