Un microscope à super-résolution révèle une torsion cellulaire
Des biophysiciens de l’EPFL ont mis au point un microscope à super-résolution de grande capacité permettant d’étudier les nanostructures et la dynamique des cellules de mammifères. Ils ont ainsi obtenu une vision plus détaillée que jamais des torsions et rotations d’une organelle importante pour la division cellulaire.
Pour comprendre les mécanismes sous-jacents à la division et la motilité cellulaire, le centriole est l’organelle à étudier. Chaque cellule comporte une paire de centrioles qui aident les chromosomes à se séparer pendant la division cellulaire. Ces organelles spéciales sont des machines multimoléculaires composées de centaines de protéines avec un code masqué correspondant aux modifications post-traductionnelles qui déterminent leur rigidité ou leur flexibilité. Celle-ci permet à l’inverse de comprendre en partie comment les centrioles fonctionnent.
La structure de base des centrioles est connue d’après de précédentes études reposant principalement sur l’usage de la microscopie électronique. Mais les modifications post-traductionnelles étant invisibles au microscope électronique, impossible de savoir à quoi elles ressemblent.
Grâce aux progrès de la technologie de microscopie par fluorescence à super-résolution, mise au point par les biophysiciens de l’EPFL, nous avons désormais une vision détaillée de ces nanostructures, qu’elles soient prises isolément ou in situ. Comme l’on s’y attendait, les centrioles ont la forme de tubes cannelés, autrement dit, ils sont cylindriques, avec neuf microtubules dans la longueur, et leur diamètre se resserre à l’une des extrémités. Etant donné cette organisation très poussée, les scientifiques ont été surpris de découvrir qu’une modification post-traductionnelle s’articule autour de ces microtubules. Les résultats sont publiés ce jour dans la revue Nature Methods.
« Les symétries des machines multimoléculaires expliquent souvent comment elles parviennent à remplir diverses fonctions. Les modifications post-traductionnelles peuvent former un code spécial qui indique aux protéines où se lier, mais permettant aussi au centriole de se stabiliser lorsque les forces les tiraillent pendant la division. Nous ne savons pas encore pourquoi cette torsion est présente ici, mais c’est un indice pour comprendre comment fonctionnent les centrioles. Notre étude montre que la microscopie à super-résolution est un partenaire essentiel de la microscopie électronique dans la biologie structurelle », explique la biophysicienne Suliana Manley, qui dirige le laboratoire de biophysique expérimentale.
Techniques améliorées d’imagerie à super-résolution
Les centrioles sont près de 100 fois plus petits que les cellules des mammifères, et un millier de fois plus petits qu’un cheveu humain. De fait, pour les observer à l’intérieur de cellules vivantes, il était nécessaire d’améliorer la technologie du microscope à super-résolution basé sur la lumière pour étudier les échantillons, car les autres méthodes ont tendance à être trop lentes pour les études structurelles. Dora Mahecic, doctorante au laboratoire de biophysique expérimentale, a amélioré le concept d’illumination pour augmenter la taille des images que pouvait capturer le microscope en apportant une lumière plus uniforme sur tout le champ de vision.
Ce microscope par fluorescence à super-résolution n’a rien du microscope optique typique que l’on rencontre dans les simples classes de biologie. Il s’agit plutôt d’une installation complexe qui aligne avec soin des miroirs et des lentilles pour façonner et envoyer une lumière laser dans l’échantillon. Les biophysiciens ont combiné cette installation à une préparation sophistiquée de l’échantillon qui a recours au grossissement physique de l’échantillon et à des fluorophores faisant en sorte que les protéines, constituants essentiels de la vie, renvoient la lumière.
Cette nouvelle technologie de super-résolution pourrait servir à étudier de nombreuses autres structures de la cellule, comme les mitochondries, ou à observer d’autres machines multimoléculaires, telles que les virus.