Un matériau inédit pour les interactions entre lumière et matière

Un gaz d’atomes de lithium refroidi à des températures de l’ordre du nanokelvin est piégé par des faisceaux laser et placé entre deux miroirs optiques. Crédit : H. Konishi (EPFL)

Un gaz d’atomes de lithium refroidi à des températures de l’ordre du nanokelvin est piégé par des faisceaux laser et placé entre deux miroirs optiques. Crédit : H. Konishi (EPFL)

Des scientifiques de l’EPFL sont parvenus à coupler un nouveau matériau avec la lumière à l’échelle du photon. Cette réussite ouvre des perspectives d’amélioration du contrôle et de la compréhension des propriétés des systèmes en corrélation quantique.

Il existe une vaste classe de matériaux que les physiciens qualifient de « fortement corrélés ». Elle inclut des isolants et des matériaux électroniques possédant des propriétés électroniques et magnétiques inhabituelles, et même les neutrons composant les étoiles à neutrons. Leurs propriétés proviennent de ce que leurs constituants interagissent très fortement entre eux : de nouvelles caractéristiques, absentes des particules isolées, apparaissent alors au niveau collectif.

Les propriétés incomparables des matériaux fortement corrélés sont souvent utiles du point de vue technologique. Ainsi, elles sont utilisées dans les aimants supraconducteurs et les technologies de stockage magnétique, mais aussi dans le champ émergeant des « technologies quantiques ».

Or, une équipe de scientifiques dirigée par Jean-Philippe Brantut à l’Institut de physique de l’EPFL a découvert le premier matériau complexe fortement corrélé dont les constituants sont fortement couplés à la lumière à l’échelle du photon. Ce matériau est ce que les chercheurs appellent un « gaz de Fermi », c’est-à-dire, schématiquement, un gaz d’atomes neutres refroidis à une température très proche du zéro absolu, où les atomes appartenant à la même famille de particules que les électrons ou les neutrons manifestent des effets similaires de forte corrélation.

En plaçant ce gaz de Fermi entre deux miroirs optiques hautement réfléchissants — une « boîte à lumière » —, les chercheurs ont découvert que les interactions avec la lumière pouvaient atteindre une force sans précédent. « Nous allons désormais utiliser ceci pour mieux contrôler et mieux comprendre les propriétés de systèmes en corrélation quantique, pour lesquelles il est difficile de faire des calculs théoriques », explique Jean-Philippe Brantut. « Inversement, cela pourrait permettre d’utiliser des matériaux fortement corrélés dans le cadre d’applications relevant des technologies quantiques où l’interfaçage avec la lumière constitue un prérequis. »

Financement

Conseil européen de la recherche (Horizon 2020)

Fonds national suisse de la recherche scientifique

Programme « Fondation de Famille Sandoz-Monique de Meuron »

EPFL

Références

Kevin Roux, Hideki Konishi, Victor Helson, Jean-Philippe Brantut. Strongly correlated Fermions strongly coupled to light. Nature Communications 11, 2974 (2020). DOI: 10.1038/s41467-020-16767-8