Submersibles dans le Léman – des résultats scientifiques en série

© 2014 EPFL – Alain Herzog
Menée en 2011 avec le concours de deux sous-marins russes, la campagne de recherche Elemo a fourni un lot de précieux renseignements sur le lac Léman. Une édition spéciale du journal «Aquatic Sciences» en présente les principaux résultats.
En été 2011, les deux sous-marins russes MIR 1 et MIR 2 plongeaient dans les profondeurs du lac Léman. Les appareils avaient été engagés dans le cadre de la campagne scientifique Elemo, qui avait pour but de mieux connaître la dynamique et l’état de santé du plus grand lac alpin. Un lac sur lequel le million de personnes résidant sur ses berges fait peser une pression constante. Depuis la fin des trois mois de recherches sur le terrain, les chercheurs ont analysé les données et échantillons collectés, produisant une profusion de résultats. Suite à la campagne, une sélection de huit articles scientifiques font l’objet d’une édition spéciale du journal Aquatic Sciences en juin 2014. Ce programme de recherche sans précédent avait été rendu possible grâce au soutien de Ferring Pharmaceuticals, le Consulat honoraire de la Fédération de Russie et l’EPFL, réunis au sein de la Fondation FEEL.
Les articles couvrent essentiellement deux thématiques: les connaissances de la géologie lacustre et l’impact de la pollution sur la qualité de l’eau. Parmi les sujets abordés, on peut citer les plongées menées vers la bouche du Rhône, dans la région de Villeneuve, pour étudier les spectaculaires canyons sous-marins formés par le fleuve. Ou encore les prospections dans la baie de Vidy, où la station d’épuration de Lausanne rejette les eaux traitées, qui ont permis d’en savoir plus sur la présence, la persistance et la diffusion de micropolluants dans le lac.
Canyons et contamination
Les submersibles ont fourni un moyen unique aux équipes de recherche pour explorer les canyons sous-marins. Ils ont permis d’obtenir de nouveaux renseignements sur la formation de ces structures et d’observer leur évolution en fonction des dépôts et de l’érosion des sédiments drainés par le Rhône. D’autres chercheurs ont analysé les populations bactériennes présentes dans le limon provenant du delta du fleuve. Ils avaient pour objectif de se servir des microorganismes comme indicateurs, afin d’évaluer l’impact des polluants de l’agriculture sur la santé des écosystèmes lacustres.
Sur les rives lausannoises, les plongées des submersibles ont montré que les micropolluants – infimes composés chimiques issus de produits médicaux et cosmétiques – pouvaient être pistés dans une aire d’au moins un kilomètre carré autour de l’écoulement de l’usine de traitement des eaux. Les chercheurs ont également constaté la présence de ces polluants dans les profondeurs du lac, qui se répandent parfois en direction du point de collecte d’eau potable de la commune de St-Sulpice. Dans une étude réalisée en parallèle, un autre groupe de recherche a pu établir un lien entre certains types de bactéries et l’accumulation de métaux – dont des métaux lourds - dans les sédiments.
Une opportunité unique
L’édition spéciale d’Aquatic Sciences est loin de conclure la campagne. Elemo a déjà fait l’objet de quatorze publications scientifiques et d’autres suivront encore. «C’était une opportunité unique de pouvoir utiliser de tels sous-marins pour étudier un environnement si proche de nous», relève Alfred Wüest, directeur de la Chaire Margaretha Kamprad en limnologie et science environnementale à l’EPFL. Dans l’éditorial du journal, il ajoute: «Grâce aux submersibles, les chercheurs ont pu prendre des échantillons à l’horizontale et à la verticale, et de pouvoir le faire à vue. Scientifiquement parlant, ces appareils ont offert des possibilités sans précédent pour l’étude de ce milieu subaquatique complexe.»