Stockage des énergies renouvelables: nouvelle étape franchie
Une chercheuse de l’EPFL est parvenue à observer le comportement d’un catalyseur à l’échelle des particules durant l’électrolyse de l’eau. Cette réaction chimique, qui permet de «séparer» l’eau en oxygène et en hydrogène, est prometteuse pour stocker les énergies renouvelables. Les catalyseurs sont indispensables à cette réaction, mais leur comportement est encore largement incompris.
Comment stocker l’énergie produite par les sources d’énergies renouvelables, à grande échelle et de manière fiable? Cette question, centrale vu la dépendance de ces sources d’énergie aux conditions météorologiques, reste encore un défi pour les scientifiques. L’une des méthodes les plus étudiées actuellement est le stockage de cette énergie sous forme gazeuse, au moyen de cellules électrolytiques conçues à cet effet.
Ce stockage fonctionne notamment grâce à une réaction chimique: l’électrolyse de l’eau. Elle permet de décomposer les molécules d’eau en oxygène et en hydrogène grâce à l’électricité. Elle est réversible, et l’hydrogène peut ensuite être retransformée en eau, afin de récupérer l’électricité.
Comprendre pourquoi un catalyseur fonctionne
Un élément central est nécessaire à cette réaction: les catalyseurs. Ces éléments – notamment des oxydes de métaux dans le cas de l’électrolyse de l’eau – accélèrent le processus, sans être consommés lors de la réaction. Si les scientifiques savent que certains oxydes fonctionnent bien, ils ne savent pas pourquoi. «Nous observons que la réaction se produit, nous voyons que certains oxydes sont particulièrement efficaces, robustes et stables, mais nous ne savons pas pour quelles raisons, car nous ne comprenons pas encore ce qui se passe au niveau du catalyseur durant l’électrolyse de l’eau», explique Vasiliki Tileli, professeure assistante à L’EPFL, à la tête du Laboratoire pour la caractérisation in situ des nanomatériaux par des électrons.
Des catalyseurs de nouvelle génération
Avec Tzu-Hsien Shen, un étudiant, la chercheuse a reproduit cette réaction chimique afin d’observer au microscope électronique le comportement du catalyseur tout au long de la réaction, et d’imager ce qui se produit à l’échelle nanoscopique. Ils ont analysé un catalyseur oxyde à structure pérovskite (BSCF). «Ce catalyseur a des propriétés exceptionnelles de séparation de l'eau, ajoute la chercheuse. En effet, les oxydes utilisés actuellement, tels que ceux d’iridium et de ruthénium sont efficaces, mais sont chers et leurs ressources sont limités. A terme, ils devront être remplacés.»
Les scientifiques ont pu imager les particules à structure pérovskite en temps réel lors de cyclages électrochimiques. Ils ont ainsi vu l’oxygène apparaître – preuve de la réaction en cours –, et constaté que ce processus était réversible. Ils ont également observé que l’oxyde à structure pérovskite était particulièrement robuste.
Des surfaces qui repoussent, puis attirent l’eau
Ils ont aussi découvert que la surface des particules se modifie pendant la réaction et que les atomes se redistribuent. Cela provoque le changement de comportement des particules avec leur environnement et selon les étapes du cyclage, la surface des particules devient hydrophobe – elle repousse les liquides –, tandis que pendant d’autres, elle devient hydrophile – elle attire les liquides –. «Cela est absolument unique, indique Vasiliki Tileli. Nous pensions que la surface pouvait changer, mais cela n’avait pas encore jamais observé à l’échelle nanoscopique et en temps réel». Or, cette capacité pour un matériau de passer d’état hydrophobe à un état hydrophile, et vice-versa, intéresse la communauté scientifique et est utilisée dans de nombreuses applications, comme les capteurs, la purification de l’eau ou les surfaces auto-nettoyantes. Les résultats de cette recherche sont publiés dans Nature Catalysis.