Starting Grants: trois chercheuses de l'EPFL en sciences de la vie
Trois professeures de l'EPFL, Camille Goemans, Mackenzie Mathis et Maria Brbić, ont reçu les prestigieuses Starting Grants du FNS pour leurs projets de recherche innovants qui s'attaquent à des défis scientifiques et sociétaux cruciaux.
Les Starting Grants du FNS, financés par le Secrétariat d'Etat à l'éducation, à la recherche et à l'innovation (SERI), offrent aux chercheurs en début de carrière des institutions suisses la possibilité de créer leur propre équipe et de mener à bien des projets indépendants novateurs. Chaque projet est sélectionné en fonction de son potentiel à faire progresser les connaissances et à avoir un impact sur la communauté scientifique.
Camille Goemans : Combattre la résistance aux antibiotiques avec des combinaisons phage-antibiotiques
Camille Goemans, responsable du laboratoire Goemans sur les interactions entre médicaments et microbiote à la Faculté des sciences de la vie de l'EPFL, se concentre sur le défi critique de la résistance aux antibiotiques, une menace croissante pour la santé mondiale. Les antibiotiques, autrefois révolutionnaires dans la médecine moderne, perdent de leur efficacité en raison de l'adaptation des bactéries et de leur surutilisation.
Le projet primé de Goemans, PACMAN, étudie la possibilité de combiner des antibiotiques avec des bactériophages (phages) - des virus qui infectent et détruisent les bactéries - afin d'améliorer l'efficacité du traitement et de ralentir l'émergence de la résistance.
PACMAN utilisera des approches innovantes et systématiques pour étudier les interactions entre les antibiotiques et les phages, qui sont actuellement sous-explorées. Bien que la thérapie par les phages connaisse une résurgence, elle a été limitée à des cas d'usage compassionnel lorsque les antibiotiques échouent. Mme Goemans a pour objectif d'identifier et de comprendre les mécanismes de synergie entre les phages et les antibiotiques, ce qui pourrait déboucher sur de nouvelles stratégies de traitement des infections bactériennes.
Le projet combinera des tests expérimentaux à haut débit avec des techniques moléculaires avancées pour élucider la manière dont ces combinaisons affectent la survie et l'adaptation des bactéries. En générant une vision globale des effets et des interactions, PACMAN jettera les bases de l'optimisation des thérapies antimicrobiennes. Cette recherche a de profondes implications pour faire face à la crise de la résistance aux antibiotiques et pourrait conduire à des avancées transformatrices dans les traitements cliniques.
Mackenzie Mathis: Dynamique neuronale latente sous-jacente à l'apprentissage visuo-moteur
Mackenzie Mathis, titulaire de la Chaire de neurosciences intégratives de la Fondation Bertarelli et directeur du Mathis Laboratory of Adaptive Intelligence au Brain Mind Institute de l'EPFL, s'attaque à l'une des questions fondamentales des neurosciences : comment le cerveau s'adapte-t-il à des environnements qui changent rapidement ? On sait depuis des siècles que notre cerveau doit construire des modèles du monde pour contrer les retards sensoriels et faire des prédictions sur nos actions et sur ceux qui nous entourent. Pourtant, les calculs neuronaux sous-jacents qui permettent cette adaptation sont inconnus.
Le projet primé de Mme Mathis porte sur l'apprentissage moteur guidé par la vue chez la souris. Elle a proposé de développer de nouvelles tâches de réalité virtuelle pour les souris, de nouvelles méthodes d'apprentissage automatique et des enregistrements neuronaux, afin d'étudier comment les populations de neurones conduisent l'apprentissage. Plus précisément, elle développera une série de tâches permettant de dissocier plusieurs signaux d'apprentissage, puis construira et exploitera de nouveaux modèles de dynamique latente neuronale afin de mesurer la manière dont les espaces neuronaux changent lors de l'apprentissage de la navigation en réalité virtuelle dans des conditions d'incertitude.
Au-delà de l'avancement des neurosciences, le projet vise à inspirer de nouvelles approches en matière d'intelligence artificielle en appliquant les principes de l'apprentissage biologique aux systèmes d'apprentissage automatique. Cette recherche interdisciplinaire comble le fossé entre la compréhension de l'intelligence naturelle et la création de systèmes artificiels adaptatifs.
Maria Brbić: Développer des modèles d'IA pour la biologie cellulaire
Maria Brbić, responsable du laboratoire de Machine Learning for Biomedicine à la Faculté des sciences de l'informatique et de la communication de l'EPFL, dirige un projet transformateur à l'intersection de l'apprentissage automatique et de la biologie cellulaire. Les progrès récents des technologies de la cellule unique permettent aux scientifiques d'étudier l'hétérogénéité moléculaire des cellules individuelles, ce qui offre des perspectives sans précédent en matière de santé et de maladie. Toutefois, la complexité et l'ampleur des données nécessitent de nouveaux outils informatiques.
Le projet primé de Brbić vise à développer un modèle d'IA génératif multimodal - un "modèle de base" pour la biologie cellulaire - entraîné sur des millions de cellules à travers divers ensembles de données omiques, y compris la génomique, la protéomique et l'imagerie. Contrairement aux modèles existants qui se concentrent sur des modalités spécifiques, ce modèle intégrera plusieurs types de données dans une représentation unifiée. L'objectif ambitieux du projet est de permettre de nouvelles découvertes, telles que l'identification de biomarqueurs, la compréhension de la régulation des gènes et la prédiction des réponses cellulaires aux médicaments.
Le projet y parviendra grâce à trois objectifs clés : développer des stratégies innovantes de pré-entraînement pour le modèle, permettre des découvertes dans des contextes biologiques jusqu'ici inexplorés et créer un cadre pour prédire les réponses aux médicaments au niveau cellulaire. Le résultat repoussera les limites de l'apprentissage automatique et de la biomédecine, offrant de nouveaux outils pour comprendre la vie à son niveau le plus fondamental et ouvrant la voie à la médecine personnalisée.
La recherche de Brbić représente un changement de paradigme, fournissant non seulement des idées théoriques mais aussi des outils pratiques qui pourraient révolutionner la façon dont nous diagnostiquons et traitons les maladies. Les applications du projet sont vastes, couvrant la biologie fondamentale, la pharmacologie et au-delà.