Quelques mots pour se souvenir et rendre hommage

gauche : Mario Bevilacqua © Famille Bevilacqua _ droite : François Iselin © Odile Meylan / 24heures
Quelques mots pour se souvenir, et rendre hommage au Professeur Mario Bevilacqua, décédé le 2 octobre dernier, et à François Iselin, décédé le 11 octobre.
Avec tristesse et reconnaissance, ces quelques lignes veulent dire que ces deux personnages ont marqué durablement le paysage de notre école et restent des exemples pour nous, chacun à sa manière.
Mario Bevilacqua a enseigné au département d’architecture de l’EPFL de 1974 à 1997.
Nous l’avons connu au sein de l’équipe du Professeur Aubry qui enseignait le projet d’architecture en 1ère année, où il intervenait plutôt pour les questions de structure liées aux projets des étudiantes et étudiants ; puis à partir de 1987 il a enseigné le projet avec sa propre équipe en 3ème et 4ème années, pour revenir ensuite en 1ère année, en tant que responsable cette fois, à partir de 1992. Ce furent les « années Sévelin », toute la 1ère année ayant été délocalisée en raison du manque de locaux à l’avenue de l’Eglise-Anglaise.
Parallèlement à cela le Professeur Bevilacqua s’est chargé de la coordination des diplômes pendant des années, jusqu’en 1993, et a présidé la commission des locaux, dont il était quasiment le seul membre permanent… Il fallait son tempérament égal et son savoir-faire pour se charger de manière exemplaire des questions toujours délicates voire épineuses d’attribution de locaux.
Mario Bevilacqua a toujours gardé son activité professionnelle au sein du bureau Bevilacqua, Urech, Zentner, et s’est plusieurs fois associé avec de jeunes collègues, anciens étudiants, pour divers concours et mandats. On lui doit, avec ces équipes, le bâtiment Anthropole de l’Unil, le gymnase CESSRIVE (Auguste Piccard) dans l’ancien département d’électricité de l’EPFL, les logements pour étudiants aux Cèdres.
Mais ce que nous - celles et ceux qui ont eu le privilège de le côtoyer comme étudiants, assistants, collègues – retiendrons du Professeur Bevilacqua, c’est son humanité, sa bienveillance, sa gentillesse et le respect qu’il a toujours montré à chacune et chacun d’entre nous. Il cachait de prime abord ces trésors par son caractère très réservé, parfois sombre, qui en a impressionné plus d’un au département à l’époque, quand nous le croisions dans les couloirs, silencieux, pipe à la bouche.
Personnellement je garde de lui un souvenir où les mots solidité, confiance, gentillesse, respect et disponibilité prennent tout leur sens.
François Iselin a travaillé comme expert, chercheur et enseignant à l’institut de Technique du bâtiment (ITB) du Département d’Architecture (DA), durant les mêmes années et jusque vers 2005. Ecologiste par nature et conviction bien avant l’heure, avec lui nous avons découvert la construction respectueuse, les questionnements sur les nouveaux matériaux, la valeur de modes de mise en œuvre où chaque chose trouve sa place dans une logique globale et durable.
François Iselin nous a montré l’engagement par l’exemple, par les combats qu’il a menés toute sa vie pour plus d’équité, plus de santé au travail et dans le bâtiment, dans notre environnement construit ; sa lutte aux côtés des victimes de l’amiante est bien connue, son rêve de voir un monde meilleur aussi.
En quittant l’EPFL il nous a laissé un millier de rapports d’expertises dans une armoire, certainement explosifs pour certains. François Iselin était sollicité très fréquemment pour ses grandes compétences dans le diagnostic sur le bâti, tant par les professionnels que par les privés ou les institutions.
Depuis les années 1980 déjà, il avait élaboré des outils numériques pour la construction et la prévention de la dégradation des bâtiments. Le premier «Aide à la Conception des Enveloppes (ACE)» a dans les années 1990 évolué vers l’outil «Assistance à la Maintenance des Bâtiments (AMB)».
Dans les années 2000, il a également développé le concept DOMOBILE, un système constructif léger et économique consistant à poser les bâtiments sur des fondations vissées dans le terrain. Durant cette même période il a également conçu une tente pour des réfugiés avec une structure gonflable, sans éléments rigides.
Avec ses étudiantes et ses étudiants il a toujours partagé : son savoir, ses convictions, ses coups de gueule, ses engagements, avec une grande générosité. Son franc-parler détonnait parfois dans les couloirs académiques. Ses compétences étaient reconnues loin à la ronde, et nombre d’entre nous avons fait appel à lui après nos études, en tant que jeunes professionnels aux prises avec les choix difficiles en matière de construction, ou avec des bâtiments aux comportements mystérieux…
Le 2ème étage du bâtiment BP a résonné de sa voix joyeuse et de ses éclats de rire durant quelques années après le déménagement à Ecublens, sa silhouette reconnaissable entre toutes annonçant l’anecdote du jour.