Passez-moi les pâtisseries s'il vous plaît

Selection of pastries EPFL/ iStock

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Dans une récente étude mondiale, des chercheuses et chercheurs de l’EPFL, de l’Université de Fribourg et de Microsoft Research ont constaté une augmentation globale de la consommation d’aliments riches en calories, tels que les pâtisseries, le pain et les tartes, pendant la première vague de la pandémie de COVID-19, ce qui pourrait avoir des répercussions sur la santé publique.

La pandémie de COVID-19 a changé la vie des gens dans le monde entier. À la mi-mai 2020, les gouvernements ont demandé ou ordonné à 2,5 milliards de personnes, soit plus d’un tiers de la population mondiale, de rester chez elles pour enrayer la propagation du virus mortel.

Publiée aujourd’hui dans la revue Nature Communications, cette étude récente menée conjointement par le Laboratoire de science des données de la Faculté Informatique et Communications de l’EPFL et par des collaboratrices et collaborateurs de Microsoft Research et de l’Université de Fribourg, révèle ce que nous avons fait pendant la première vague de COVID-19 alors que nous étions confinés dans nos logements: rêver de consommer des aliments réconfortants riches en calories et probablement le faire.

Alors que l’on suppose que les régimes alimentaires étaient moins équilibrés pendant les premiers confinements dus à la COVID-19, avec des conséquences peut-être importantes sur la santé publique, les chercheuses et chercheurs ont exploité passivement des données de traçage numérique à grande échelle afin d’analyser l’évolution de l’intérêt alimentaire dans dix-huit pays.

Plus précisément, ils ont noté les recherches les plus populaires sur Google concernant près de 1 500 aliments (par exemple pain, pizza, tartes) ainsi que les moyens d’accès à la nourriture (par exemple restaurant, recette). Afin d’analyser l’évolution de l’intérêt alimentaire, ces recherches ont été obtenues sous forme agrégée via l’outil Google Trends.

«Nous avons observé une augmentation globale de notre intérêt pour la nourriture, alors que notre mobilité était considérablement réduite et que nous commencions à passer plus de temps à notre domicile. Et nous avons remarqué que cette augmentation était plus marquée et durait plus longtemps que pendant les fêtes de Noël et de Thanksgiving par exemple. Nous avons également constaté que cette augmentation était plus importante pour les aliments à base de glucides comme les pâtisseries, les tartes, les pains ordinaires et le cake aux bananes – la star de la pandémie», explique Kristina Gligorić, doctorante de la Faculté Informatique et Communications de l’EPFL et principale autrice de l’étude.

Les données de recherche de Google Trends se sont révélées être un puissant indicateur des différents comportements humains, y compris le chômage, les décisions commerciales et le vote. Se servant des données de traçage numérique, cette étude vient compléter une riche littérature qui avait déjà commencé à analyser les comportements en matière de santé et de nutrition bien avant la COVID-19.

Les chercheuses et chercheurs ont suivi des données tout au long de l’année 2020 et ont découvert une différence intéressante entre les première et deuxième vagues de COVID-19: «Nous avons constaté que, pendant la deuxième vague, les répercussions sur l’intérêt alimentaire étaient beaucoup moins importantes même si les restrictions en matière de mobilité étaient très sévères en décembre 2020. On peut supposer que les gens disposaient déjà des recettes et n’avaient donc plus besoin de les rechercher. Il est possible aussi que la première vague de la pandémie ait été un tel choc que lorsque la deuxième vague est arrivée, les gens s’y étaient déjà habitués», poursuit Kristina Gligorić.

Selon les chercheuses et chercheurs, l’un des principaux avantages de cette utilisation des données numériques était de pouvoir obtenir une représentation immédiate et détaillée de ce qui se passait dans le monde en temps de crise, mais ils préviennent qu’il s’agit d’une approximation des comportements réels. Rechercher un aliment ou une recette ne signifie pas nécessairement que l’aliment a été consommé.

C’est pourquoi Kristina Gligorić estime qu’il y a suffisamment de place pour les études de suivi: «Je pense qu’il est vraiment important dans les futures études de relier ces types de données aux éventuelles conséquences cliniques associées aux régimes alimentaires et notamment à l’obésité et au diabète. Une autre piste de recherche plus approfondie serait d’essayer d’identifier les répercussions des mesures liées à la COVID-19 sur les individus par rapport à l’ensemble de la population, ce qui aurait des effets immédiats dans la surveillance et l’amélioration des habitudes alimentaires.»

Enfin, les auteurs et autrices espèrent que l’étude aidera les législateurs, étant donné que les décisions de confinement peuvent avoir des conséquences sur tant de personnes. «Elle s’étend non seulement à la COVID-19 et à la crise actuelle mais aussi à d’autres types de scénarios où les gens pourraient se voir demander de passer plus de temps chez eux, en raison d’autres nouveaux virus et maladies ou d’événements météorologiques. Les mesures qui sont appliquées ont des conséquences sur la mobilité des populations et pourraient en avoir sur les régimes alimentaires et les résultats de santé publique à long terme», conclut Kristina Gligorić.

L’article intitulé Population-scale dietary interests during the COVID-19 pandemic(Intérêt alimentaire de la population pendant la pandémie de COVID-19), a été publié aujourd’hui dans la revue Nature Communications. Il s’agit d’une recherche menée conjointement par la Faculté Informatique et Communications de l’EPFL, le Laboratoire de santé des populations de l’Université de Fribourg et Microsoft Research (Redmond, Washington). Les équipes de recherche collaborent depuis 2018 dans le cadre du Microsoft Swiss Joint Research Center.


Auteur: Tanya Petersen

Source: EPFL

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