Paru dans la feuille d'avis de Courtelary le 13.09.2024
Paru dans la feuille d’avis de Courtelary le 13.09.2024
« Je travaille depuis 30 ans dans le photovoltaïque : la Suisse devrait installer de nombreux parcs éoliens ! «
Il y 10 ans, j’ai, de manière provocative et un peu malheureuse, laissé publier la citation « avec le photovoltaïque on décarbonise la Suisse en 30 ans », souvent reprise par les opposants à l’énergie éolienne. A quelques semaines de décisions clés pour la région, c’est le bon moment pour nuancer le propos. De fait, l’énergie éolienne est une aubaine pour la Suisse, en particulier grâce à sa haute productivité hivernale. La complémentarité de l’éolien avec le photovoltaïque est remarquable. Notre laboratoire a, par exemple, analysé les production solaires et éoliennes de ces 4 dernières années et le résultat est sans équivoque : l’éolien produit entre 66 et 70% de son électricité dans le semestre hivernal, contre environ 25-30% pour le solaire. Et le solaire et l’éolien sont aussi en excellente complémentarité journalière. D’autres travaux à l’échelle Suisse (cf les travaux de Lehning et al.) ou Européenne (Breyer et al.) l’illustrent également : c’est le couple solaire-éolien qui devrait permettre la transition énergétique la moins couteuse. En Suisse, l’éolien hivernal permet de minimiser les éventuels stockage saisonniers supplémentaires (par exemple sous forme d’hydrogène) et d’augmenter l’autonomie et la résilience électrique de la Suisse. Tout cela de concert avec le solaire et l’hydraulique, dont la flexibilité permet une gestion idéale des renouvelables, mais qui est limité dans ses capacités de stockage saisonnier ! Les éoliennes les plus récentes sont certes plus grandes, mais elle elles sont aussi bien plus efficaces et fournissent des quantités appréciables d’électricité par vents plus faible à des coût de production plus avantageux. Avec des temps de retour en énergie très favorable (énergie grise) de l’ordre de 6 à 10 mois, l’éolien est une des sources d’électricité les plus propres. L’empreinte au sol est faible et l’impact environnemental peut-être minime. Et les turbines sont démontables, rapidement. Idéalement, les citoyens suisses devraient donc s’engager en faveur de l’éolien. Moins d’éolien, en plus des risques d’approvisionnement pour la Suisse en hiver, c’est laisser des centrales à gaz ou au charbon, des voitures ou chauffages thermiques, polluer ailleurs et renforcer le réchauffement climatique. A titre personnel, j’estime que c’est une responsabilité morale de faire la transition énergétique, en produisant notre énergie localement et manière propre. Je suis allé me promener sous les parcs éoliens du Mont-Crosin et de Saint-Croix. En considérant tous les impacts positifs de l’éolien, j’ai même réussir à me réjouir de leur aspect imposant mais aussi majestueux, au service des générations futures !
Christophe Ballif
Prof. EPFL, directeur laboratoire de Photovoltaïque, Neuchâtel
Directeur Centre d’énergies renouvelables, CSEM, Neuchâtel