«On veut sensibiliser les entités à leur consommation de plastique»

2022 Vivapoly awards ceremony © Loan Dao

2022 Vivapoly awards ceremony © Loan Dao

Plast it Back est un projet étudiant alliant créativité et pratique afin de revaloriser les déchets plastiques des laboratoires SV. L’équipe a notamment pour objectif de sensibiliser les membres du campus à cet enjeu.

Pour la deuxième année consécutive, les médailles du tournoi sportif EPFL-UNIL PolySports seront confectionnées ce printemps en plastique recyclé grâce à Plast It Back. Ce pôle de l’association étudiante Zero Emission Group, né il y a quelques années suite à un projet en SHS, réalise des objets de toutes sortes à partir de déchets issus des laboratoires de la Faculté des sciences de la vie (SV). Ses membres foisonnent d’idées pour aller plus loin en matière de recyclage du plastique.

«Notre ambition est de sensibiliser les entités à leur consommation de plastique. On utilise l’objet qu’on produit comme symbole pour montrer qu’il y a un problème dans notre utilisation. Malheureusement, en recherche, la consommation est difficile à réduire. On espère qu’on aura un impact sur les gens», relate Noémie Hu, qui co-dirige le projet aux côtés de Gaëlle Verdon et Benjamin Tiberghien.

Le procédé nécessite de broyer le plastique pour former des granules, puis des plaques et enfin créer des objets tels que médailles, gobelets, horloges, boîtes, etc.

Dans ce processus, le soutien du DLL est essentiel, ce qui permet à Plast it Back d’utiliser les machines disponibles dans ses espaces. Les membres de Plast it Back ont en effet rédigé un dossier de demande de soutien dans l’idée de monter une plateforme de valorisation des déchets plastiques à l’EPFL. «Une partie de notre dossier s’est concrétisée car le SPOT et le SKIL ont acheté des machines pour recycler les filaments et structures imprimées en 3D», raconte Gaëlle Verdon.

Suisse et EPFL: gros consommateurs

Dans le monde, seulement 20% du plastique est recyclé, et la Suisse en consomme trois fois plus que ses voisins européens en le recyclant 30% moins. Stephen Poplineau, responsable de la déchèterie de l’EPFL, a expliqué aux membres du groupe que l’EPFL a produit 53,4 tonnes de Plastique en 2022.

Or, la Suisse vise la neutralité carbone d’ici 2050. Incinérer les déchets plastiques ne sera bientôt plus une option. Il faut donc soit réduire, soit recycler, soit capturer les émissions à la source. Plast it Back essaie en partie de répondre à cette problématique par la sensibilisation d’une part et par le recyclage d’autre part.

Montrer l’exemple

Les membres de Plast It Back sont bien conscients qu’à leur échelle, ils et elles ont un faible levier d’action et que le projet n’aura un impact que si des mesures plus étendues sont mises en place à l’EPFL. «On est en train de faire une analyse du cycle de vie sur les médailles pour évaluer leur impact. Avant tout, on essaye de motiver les gens et les rencontrer autour d’un but commun», souligne Benjamin Tiberghien. «Notre rôle est aussi de communiquer avec d’autres pôles, ou des personnes intéressées à travailler avec des matériaux recyclés. C’est notre mission de diriger aux bons endroits», complète Noémie Hu.

«Pour tout ce qui touche aux activités de recherches de l’EPFL, en tant qu’étudiants et étudiantes on ne se sent pas forcément légitimes d’influer ou dicter des pratiques aux chercheurs et chercheuses dont c’est le métier et qui ont beaucoup plus d’expérience», relate Benjamin Tiberghien. «On est conscients que c’est dur, voire irréaliste à notre échelle d’association, de recycler tout le plastique du campus, mais en tant que centre de recherche, l’EPFL pourrait être la première à montrer l’exemple en favorisant un recyclage local et en réduisant les déchets incinérés», propose Noémie Hu.

Un challenge créatif

«Avec tous ses laboratoires, l’EPFL produit tellement de plastique qu‘on a pu en avoir rapidement en demandant à peu d’équipes. On peut passer quatre ans sur nos stocks...», témoigne Benjamin.

Alors, comment faire, sachant par exemple que chaque semaine quelques laboratoires de la Faculté SV utilisent et jettent à eux-seuls un nombre de pipettes équivalant au contenant de 200 litres?

Les étudiantes et étudiants de Plast It Back sont constamment en apprentissage et expérimentation pour la conception et la production d’objets. «On a des difficultés lors du processus, et ça fait partie du développement du projet», explique Gaëlle Verdon. «Par-exemple, si les plaques en plastique sont courbées, c’est compliqué à usiner. Ainsi, on cherche à savoir pourquoi ça ne marche pas et c’est stimulant! Même s’il y a des imprévus, tout est faisable», raconte Benjamin Tiberghien.

Lors de ces moments de création, l’ambiance est détendue. Les nouvelles et nouveaux sont formés à la technique lors de leur arrivée et les membres qui ont le temps contribuent en apprenant ensemble à utiliser les logiciels de Computer-aided design (CAD) et les machines. On sent une réelle envie de mettre la main à la pâte en alliant durabilité et technique. «On a la liberté totale de créer un processus. C’est vraiment enrichissant d’avoir un projet, de le mener à bien du début à la fin, puis finalement de voir le fruit de trois mois de labeur intense se concrétiser lors de la remise des médailles», ajoute Noémie Hu.

De la théorie à la pratique

«À l’EPFL, on fait beaucoup de calculs et de théorie, alors qu’ici on peut voir les choses de nos propres yeux. En tant qu’étudiant en section matériaux, j’ai eu des cours sur le traitement des polymères et là, le fait de voir la viscosité du matériau, ça m’apporte une expérience pratique», se réjouit Benjamin Tiberghien.

Un constat partagé par l’ensemble du groupe: «Quand le processus de réalisation est pensé en théorie, ça a l’air faisable en une heure», rigolent les membres de l'équipe. «Au final, tout ce qui est intuitif, manuel, on nous l’apprend peu, ou alors seulement dans les sections qui ont automatiquement de la pratique comme en ENAC, complète Noémie Hu. Être dans un atelier, utiliser des outils, ça peut être intimidant. Alors que produire quelque chose de A à Z, avec des imprévus, c’est ça la réalité du terrain. Ce serait incroyable que tout le monde reçoive ce genre d'enseignement pratique.»