«On peut transmettre beaucoup par le langage des jeux»

David Javet - 2024 EPFL/Alain Herzog - CC-BY-SA 4.0

David Javet - 2024 EPFL/Alain Herzog - CC-BY-SA 4.0

Au semestre de printemps 2024, le Collège des humanités (CDH) de l’EPFL proposera un nouveau cours intitulé «Game design and prototyping» et enseigné par le concepteur de jeux David Javet. S’inscrivant dans le Master CDH en humanités digitales, ce cours permettra aux étudiantes et étudiants de concevoir, d’élaborer et d’évaluer leur propre jeu pendant un semestre.

Bien que les étudiantes et étudiants de l’EPFL soient occupés par les cours, les examens, la recherche et les associations étudiantes, beaucoup d’entre eux trouvent encore le temps de jouer à des jeux. Il s’agit bien entendu des jeux vidéo, mais aussi des jeux de société, des jeux de rôle et des jeux de cartes. Or, malgré la popularité de ces loisirs, l’EPFL propose encore très peu d’opportunités permettant aux étudiantes et étudiants d’apprendre à concevoir des jeux et d’appliquer leurs connaissances scientifiques par le biais de ce support spécifique. C’est pourquoi le cours CDH «Game design and prototyping» est aujourd’hui proposé.

« Ce nouveau cours est principalement né d’une demande de la part de la communauté étudiante, déclare l’instructeur David Javet. Il y a une forte volonté de la part des étudiantes et étudiants qui veulent vraiment utiliser le langage des jeux pour s’exprimer. »

David Javet ne fait pas seulement allusion aux jeux vidéo. En effet, les jeux conçus par ses étudiantes et étudiants pourront être des jeux de société, des jeux de rôle, des jeux de cartes ou même des jeux grandeur nature, tels que Pacmanhattan.

« Comme nous sommes dans le domaine des humanités digitales, il était très important pour moi que le cours ne porte pas sur la manière de programmer des jeux, mais sur la manière de les conceptualiser et de faire du langage des jeux un moyen de transmission », indique David Javet.

« L’empathie a une place fondamentale »

Les étudiantes et étudiants du cours de David Javet auront l’opportunité de concevoir un jeu de A à Z. Cela comprend la création d’un document de game design ou GDD, puis le prototypage et le test de leurs jeux. Autrement dit, ils aborderont les jeux qu’ils auront créés du point de vue d’une utilisatrice ou d’un utilisateur novice.

« Comme la création de jeux consiste à faire faire quelque chose à quelqu’un, l’empathie a une place fondamentale dans la pratique, affirme David Javet. Il s’agit de se mettre à la place de quelqu’un qui ne connaît pas vraiment votre système, d’essayer de penser à l’autre plutôt qu’à soi-même. Le fait que quelqu’un joue et active votre système vous oblige à réfléchir au fonctionnement de l’autre. Il s’agit donc avant tout d’écouter et d’apprendre à écouter. »

David Javet a également beaucoup recours aux exemples dans son enseignement, en donnant aux étudiantes et étudiants toutes sortes de jeux à jouer en dehors des cours et en les faisant jouer ensemble pendant les cours pour discuter de leur expérience, de ce qui fonctionne et de ce qui ne fonctionne pas.

« Il s’agit de faire en sorte que les étudiantes et étudiants ressentent le game design, jouent aux jeux et discutent des éléments de conception et des méthodologies spécifiques. »

Supports différents pour jeux différents

C’est le premier cours qu’enseigne David Javet à l’EPFL bien qu’il ait été invité par le passé à donner des conférences dans le cadre d’autres cours de l’EPFL.

Il reconnaît que dans une école technique comme l’EPFL, il pourrait y avoir beaucoup d’étudiantes et d’étudiants avec une grande expérience en codage qui souhaitent créer de grands jeux vidéo complexes. Pour cela, David Javet prévoit de mettre en place des assistantes et assistants pédagogiques pour aider les étudiantes et étudiants à résoudre les questions de codage difficiles.

Il espère cependant que les étudiantes et étudiants se lanceront dans des jeux et des supports plus simples, même si la plupart du temps ils souhaitent concevoir de grands jeux vidéo complexes basés sur leur expérience de jeu. Ces derniers sont souvent élaborés par 500 personnes pour une somme de plusieurs millions de dollars et ne sont généralement pas de bons outils pour apprendre à concevoir des jeux. En effet, les jeux complexes reposent sur de nombreux systèmes différents et parties mobiles, que les étudiantes et étudiants confondent parfois avec la substance, sans se rendre compte que leurs jeux peuvent en fait être injustes ou manquer d’une narration convaincante.

David Javet souhaite également que les étudiantes et étudiants réfléchissent au type de support de jeu qui leur permettrait d’exprimer au mieux ce qu’ils veulent. Peut-être qu’une fois qu’ils auront un concept, une histoire ou des connaissances scientifiques qu’ils souhaitent partager, ils se rendront compte qu’un jeu de rôle servirait mieux leur objectif qu’un jeu vidéo.

« Je ne veux pas qu’ils se contentent de reproduire quelque chose qu’ils aiment ou qu’ils pensent être efficace et qu’à la fin du semestre, ils ne se rendent pas vraiment compte de ce qu’ils ont fait », conclut David Javet. « Le processus doit leur permettre de prendre du recul et de réfléchir réellement à ce qu’ils essaient d’accomplir, puis de créer quelque chose. »


Auteur: Stephanie Parker

Source: Éducation

Ce contenu est distribué sous les termes de la licence Creative Commons CC BY-SA 4.0. Vous pouvez reprendre librement les textes, vidéos et images y figurant à condition de créditer l’auteur de l’œuvre, et de ne pas restreindre son utilisation. Pour les illustrations ne contenant pas la mention CC BY-SA, l’autorisation de l’auteur est nécessaire.