Nazeeruddin, le chercheur qui fait apparaître Sion sur la scène int'l

© 2017 Sabine Papilloud

© 2017 Sabine Papilloud

Peu de gens le connaissent et pourtant, c’est un des scientifiques les plus influents du moment. Mohammad Khaja Nazeeruddin est chercheur à l’antenne l’EPFL Valais et travaille sur un nouveau type de cellule photovoltaïque à fort potentiel. À l’unanimité, il a été élu Valaistar du mois de novembre.

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Vous avez été élu Valaistar du mois de novembre. Comment accueillez-vous cette nouvelle ?
J’ai vraiment été ravi de l’apprendre. Même quand j’ai appris que j’avais été sélectionné, déjà à ce moment-là, ça m’a ému. C’est la première fois que notre travail est reconnu par un jury qui n’est pas constitué de scientifiques. C’est rare et c’est un honneur.

Vous êtes le premier scientifique décoré par ce prix. Comment l’expliquez-vous ?
J’ai été médiatisé grâce au projet sur lequel mon équipe et moi travaillons. C’est un bon projet qui, nous l’espérons profondément, permettra de résoudre, du moins en partie, la crise énergétique actuelle.

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Qu’a-t-il de si particuliers ?
Les cellules photovoltaïques que nous développons deviendront bientôt aussi efficaces que les cellules en silicium présentes sur le marché. Le premier avantage, c’est qu’elles coûteront beaucoup moins cher. Le deuxième, c’est qu’elles sont transparentes et laissent donc passer la lumière du soleil.

Il serait donc possible de recouvrir une serre ou une véranda ?
Absolument. Nous pourrions utiliser une partie de la lumière pour les cellules photovoltaïques et une partie pour les plantes.

Tous les jours, le grand public entend parler d’une nouvelle étude scientifique ou un nouveau projet. Votre travail de chercheur est-il plus médiatisé qu’avant ?
Avant, les recherches menées par les scientifiques n’entraient pas dans le débat public. Les scientifiques travaillaient dans leur coin et beaucoup d’études n’arrivaient jamais aux oreilles du grand public. Aujourd’hui, c’est totalement différent. Nous devons partager notre travail avec le grand public, afin d’être médiatisé et trouver des fonds pour financer nos recherches.

Alors comment faire la différence entre une étude sérieuse et une qui n’a pour objectif que de rassembler de l’argent ?
Le meilleur moyen est de regarder les publications du chercheur et comment la communauté internationale réagit à son travail. Si une étude n’est pas crédible, la communauté scientifique ne la partagera pas.

Et pour le grand public ?
C’est plus difficile en effet. Il faut attendre que le projet de recherche se transforme en produit commercialisable. À ce moment-là seulement, il devient réellement possible, pour le grand public, de se rendre compte de la crédibilité d’une étude scientifique.
Le sac à dos que j’ai à mes côtés bénéficie de panneaux solaires intégrés et permet de recharger son téléphone en marchant dans la rue. C’est pratique, ça fonctionne et le public peut s’en rendre compte.

Ça fait 3 ans que vous vivez en Valais. Quelle a été votre première impression en arrivant ?
Au début, je passais la moitié de mon temps ici, l’autre moitié à Lausanne, mais ça n’était pas du tout pratique pour mon travail. Mais rapidement je me suis installé à Sion afin de pouvoir focaliser totalement sur mon travail et mon groupe de travail.
Dans les sciences, pour avancer, il faut constamment discuter avec son groupe et les autres scientifiques pour faire émerger de nouvelles idées. C’est très important.

Peut-on avoir du temps libre, des hobbies, quand on est un chercheur ?
Les gens vont penser que j’exagère, mais en vérité, je travaille au moins 15 heures par jour. Ma famille le comprend et c’est très important. Il faut être très impliqué pour rester au top niveau. À vrai dire, il n’y a pas d’autres options.

Ça semble assez stressant, non ?
Il y a du stress, mais il est positif et motivant. Je me mets la pression tout seul, car développer une idée à laquelle personne n’a pensé avant, c’est incroyablement motivant. Être reconnu, invité aux quatre coins du monde, ça maintient la motivation.

Comment avez-vous accueilli la nouvelle, lorsqu’on vous a annoncé que vous viendriez poursuivre vos recherches en Valais ?
Ça a été une nouvelle très excitante. Tout d’abord, j’allais avoir mon propre laboratoire. Et on m’a fait comprendre que mon projet de recherche était très important et qu’il fallait, grâce à mon travail, que je fasse apparaître Sion sur le radar de la communauté scientifique internationale. C’était un challenge.

Est-il facile de s’intégrer en Valais ?
Honnêtement, je ne saurai vous répondre. Je passe l’essentiel de mon temps dans le laboratoire avec mon équipe. Dans notre métier, on ne rencontre pas toujours beaucoup de personnes en dehors de notre activité professionnelle. C’est dommage.

Vous êtes entouré de montagnes enneigées. Avez-vous le temps d’en profiter ?
Oui, j’essaie, mais je ne suis pas un très bon skieur. J’apprécie beaucoup la beauté et le calme de la montagne, mais ce qui m’a vraiment impressionné, c’est la quantité de neige qu’il est tombé ces derniers jours. Ça fait 30 ans que j’habite en suisse et c’est la première fois que je vois autant de neige, c’est fantastique ! La sensation de devoir trouver son équilibre en marchant est très amusante. D’ailleurs j’ai chuté quelques fois et ça a été plus difficile que prévu de se relever (rires).