Nanoparticules : modification de leur taille et leur forme
Pour la première fois, et par la seule utilisation de filtres de couleurs différentes, les scientifiques de l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne sont parvenus à contrôler de manière précise la forme, triangulaire ou pyramidale, de nanoparticules d’argent. Le même procédé a également permis de maîtriser la croissance de ces particules. La recherche fait l’objet d’un article dans le magazine de pointe en nanosciences « Nanoletters ».
« On ne s’attendait pas du tout à ces résultats ! », Andrea Callegari, Docteur en chimie physique, explique l’aboutissement surprenant de l’expérience, menée au sein du groupe du professeur Majed Chergui, en compagnie du Docteur Dino Tonti, à l’Institut de chimie moléculaire et biologique. « Nous voulions fabriquer des nanoparticules (particules dont la taille s’élève à quelques millionièmes de millimètre à peine) d’argent de forme triangulaire. La lumière blanche peut être utilisée pour transformer de petites particules sphériques en particules plus grandes, ayant la forme de plaques triangulaires. Comme nous étions pressés, nous avons utilisé, lors d’expériences successives, des lumières de couleurs différentes afin de tester l’efficacité de différentes couleurs de lumière sur le changement de forme des particules. ». La formation de nanoparticules de forme sphérique et de taille quelconque est aisée. Par contre, il n’était pas possible, jusqu’à l’obtention des résultats de cette expérience, d’obtenir des particules de forme non sphérique et de pouvoir maîtriser leur taille. Andrea Callegari poursuit : « L’équipe s’est rapidement aperçue que la lumière exerçait également une influence sur la taille de ces particules ». Le nouveau procédé constitue, en outre, une méthode de « fabrication » de nanoparticules plus précise et plus propre que la méthode classique. La méthode classique consiste à plonger les particules dans un liquide auquel il faut ajouter différents produits chimiques. La méthode photochimique, employée dans l’expérience, permet d’employer moins de produits chimiques et de stopper l’expérience dès l’obtention de la forme et de la taille souhaitées. L’expérience a été effectuée dans le cadre d’un projet financé par le NCCR, National Centre of Competence in Research.
Lumière rouge ou bleue
L’expérience a été menée sur des nanoparticules d’argent sphériques, de 5 à 10 nanomètres, plongées dans une solution aqueuse. Les scientifiques ont observé que la lumière dans la gamme du rouge illuminant, durant huit heures environ, cette solution aqueuse, permettait d’obtenir des nanoparticules ayant la forme de plaquettes triangulaires de 50 à 100 nanomètres (nm). Le dégradé de couleur (d’orange clair à rouge foncé ) de la lumière utilisée permettait d’influer précisément sur la taille des particules. La gamme bleue permettait de produire des particules plus petites, jusqu’à 20 nm environ, et leur donnait une forme pyramidale. Jusqu’à présent, les modèles théoriques de « fabrication » des nanoparticules ne précisaient pas l’influence de la couleur de la lumière sur la forme et la taille des particules obtenues. L’apport des scientifiques de l’EPFL ne remet pas en cause la théorie existante ; leur découverte suggère plutôt un effet de la couleur de la lumière, c’est-à-dire sa longueur d’onde émise, sur la façon dont les particules s’organisent entre elles pour former des particules plus grandes et de formes différentes.
Marquer des protéines
La taille et la forme des nanoparticules déterminent elles-même une couleur intrinsèque bien précise. La possibilité de pouvoir contrôler de manière précise la taille, la forme et la couleur de ces particules augmente leur champ d’application. En imagerie biomédicale, par exemple, les scientifiques pourraient marquer une sorte de protéines, appelons la « A », par un type de nanoparticules précis, rouge par exemple. Ces particules seraient introduites dans le corps humain à la recherche des protéines « B », auxquelles elles se collent habituellement. En déterminant, ensuite, l’emplacement des protéines « A » dans le corps, les chercheurs pourraient savoir où se trouvent, et en quelle quantité, les protéines « B ». Pour ce faire, les scientifiques diffuseraient la couleur de lumière réfléchie par les nanoparticules employées. Grâce à ce « tatouage » et grâce à la transparence des tissus biologiques à différentes couleurs, la présence, ou l’absence, de protéines pourrait être observée.