Le Projet rebuiLT prouve qu'on peut construire autrement

Illustration par Jeanne Guerard - 2024 EPFL-  CC-BY-SA 4.0

Illustration par Jeanne Guerard - 2024 EPFL- CC-BY-SA 4.0

À Écublens, le pavillon communautaire destiné au grand public est un exemple concret de réemploi et d’intégration des démarches low-tech et participatives. Une aventure ponctuée de défis logistiques, techniques et architecturaux, menée par plus de 200 étudiantes et étudiants.

Depuis le corridor du dernier étage de l’école primaire du Pontet à Écublens, les élèves peuvent admirer chaque jour leurs créations par les fenêtres. Sur le toit du pavillon rebuiLT, construit au pied de l’établissement scolaire, certaines tuiles se distinguent des autres, peintes de toutes les couleurs au gré de l’imagination des jeunes artistes. Partenaires de cette démarche participative, ces enfants font aussi partie de cette aventure autour du réemploi née à l’EPFL en 2022 dans le cadre d’un projet MAKE.

Le pavillon, encore en construction, devrait être achevé en début d'année 2025. La pièce centrale — de grands modules en béton structurels extraits d’un bâtiment voué à la démolition à Renens — a déjà reçu sa charpente et son toit. Les murs en paille porteuse recouverts d’enduits en terre ont été érigés l'été dernier. Les fenêtres de réemploi et l'évier ont trouvé leur place dans ce nouvel espace, fruit d’une riche collaboration entre rebuiLT, l’EPFL, la Commune d’Écublens et divers actrices et acteurs de la construction.

«Le projet a évolué au fil des mois et des contributrices et contributeurs», explique Sarah Planchamp, diplômée en architecture et membre de l’équipe depuis ses débuts. Avec au centre la volonté de démontrer comment réemploi et circularité des matériaux peuvent être mis au service de la construction d’un bâtiment communautaire. Réussir à s’adapter rapidement aux mille péripéties associées à une telle aventure a demandé un important savoir-faire que les participantes et participants ont développé au fil des mois. Car les défis étaient et sont encore nombreux avec cette approche architecturale novatrice et encore expérimentale.

© 2024 EPFL - Illustration par Jeanne Guerard

Chasse aux matériaux

Premier défi: trouver les matériaux. Une équipe spécialement dédiée à cette tâche a été constituée et a arpenté près d’une centaine de chantiers de la région et une dizaine de ressourceries, ces lieux de stockage d’articles de construction de deuxième main. «Le bouche-à-oreille a aussi bien fonctionné. Nous devions à chaque fois aller sur place et évaluer les pièces à disposition, car il n’existe pas encore de processus de référencement standardisé. Dans plusieurs cas, nous avons effectué nous-mêmes la déconstruction, un apprentissage en soi.» Les quelque 6000 tuiles qui recouvrent le toit du pavillon proviennent d’une vieille ferme située à Écublens. Le propriétaire a eu à cœur de participer à la démarche en acceptant de démonter les tuiles une à une, un travail plus fastidieux et onéreux que de simplement toutes les jeter dans une benne afin d’être amenées à la décharge.

Dans l’application concrète du réemploi, les questions des normes de sécurité et de prise de responsabilité sont encore des enjeux majeurs à ne pas négliger, en particulier pour la construction d’un bâtiment public. Un poêle low-tech et efficace, développé dans le cadre d’un projet étudiant, n’a finalement pas pu être retenu, car il était impossible de l’homologuer. Les architectes, ingénieurs et ingénieures en formation ont donc opté pour la création d’un mur trombe en terre crue qui permettra uniquement de préchauffer passivement l’édifice.

Le projet est une démarche pédagogique, avec l’attribution de crédits pour les quelque 230 étudiantes et étudiants Bachelor et Master des sections ENAC et STI qui auront participé aux projets de semestre et workshops estivaux d’ici la fin du chantier. Mais également participative avec la présence de bénévoles, écolières et écoliers ou encore citoyennes et citoyens intéressés par le projet. «Il faut être capable d’établir un bon roulement et gérer au mieux le partage des connaissances», précise Sarah Planchamp. Et Xavier Morneau, étudiant québécois en échange pour sa dernière année de Bachelor en architecture à l’EPFL, d’ajouter: «C’est une expérience humaine et de terrain incroyable, qui permet de combiner et valoriser diverses techniques de construction, dont certaines ancestrales. Je me rappelle encore du moment où j’ai dû expliquer à un agriculteur qu’on allait utiliser sa paille pour fabriquer des murs.»

Penser la déconstruction

Le réemploi exige de travailler différemment d’un chantier classique. «C’est un aller-retour permanent entre la partie design du projet et les stocks de matériaux disponibles. On a dû faire des adaptations au fur et à mesure de ce qu’on trouvait», explique Sarah Planchamp. Avec l’ouverture du pavillon à l’automne, il faut déjà penser à la suite. Comme gérer le bâtiment et son utilisation publique prévue pour l’heure jusqu’en 2026. Les prochaines volées d’étudiantes et étudiants poursuivront la réflexion autour du volet de la déconstruction, partie intégrante de l’approche du réemploi.

Voulez-vous faire partie de l’aventure RebuilT? N’hésitez pas à les contacter: [email protected]

Auteur: Rebecca Mosimann

Source: Environnement Naturel, Architectural et Construit | ENAC

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