La fibre optique qui «sent» la matière qui l'entoure

Desmond Chow, co-auteur de l'étude© Alain Herzog/ 2018 EPFL

Desmond Chow, co-auteur de l'étude© Alain Herzog/ 2018 EPFL

Des chercheurs de l’EPFL ont mis au point une fibre optique capable de détecter la nature des matériaux ou des liquides en contact direct avec elle. La recherche est publiée dans Nature communications. 

Ces dernières années, des fibres optiques ont fait office de capteur pour détecter d’une part, tels des thermomètres les variations de températures et, d’autre part les contraintes, tels des nerfs artificiels. La technique est notamment utilisée dans les ponts ou les gazoducs.

Des chercheurs de l’EPFL ont mis au point une méthode pour qu’une fibre optique puisse identifier le type de matière – solide ou liquide - avec laquelle elle est en contact. Le tout simplement en générant une onde acoustique à l’aide d’une impulsion de lumière au cœur de la fibre.

Menée au sein du Groupe Fibre Optique GFO, dirigé par Luc Thévenaz à la Faculté des sciences et techniques de l’ingénieur, l’étude est publiée dans Nature Communications.

Une mesure sans perturber la lumière
De la taille d’un cheveu, la fibre optique en verre transmet en son sein de la lumière selon quatre paramètres définis : intensité, phase, polarisation et fréquence. Ceux-ci sont modifiés lors d’un étirement, ou lors d’un changement de température. La fibre agit ainsi comme capteur pour repérer les fissures dans les ouvrages, ou les températures anormales. Quant à ce qui se passe autour de la fibre, il n’était jusqu’ici pas possible d’y accéder sans extraire la lumière de la fibre et la perturber totalement.

La méthode de l’EPFL consiste à générer une onde acoustique directement à l’intérieur de la fibre. L’onde, qui fait partie de la gamme des hyper-fréquences, ricoche régulièrement sur les parois de la fibre. Cet écho est modifié localement selon le matériau en contact direct avec celle-ci. Il suffit ensuite de lire l’empreinte laissée par ces échos sur la lumière à sa sortie, pour faire une cartographie de l’environnement de la fibre. Cette empreinte est si faible qu’elle ne perturbe pratiquement pas la lumière qui se propage à l’intérieur. Dans ce contexte, on pourrait imaginer transmettre de l’information sous forme de lumière dans la fibre, et en même temps détecter ce qui se passe autour d’elle.

Les chercheurs ont déjà trempé leurs fibres dans de l’eau, puis de l’alcool. Ils l’ont ensuite laissée à l’air libre. A chaque fois, leur système a pu identifier les changements d’éléments correctement. «Grâce à notre technique, nous pourrions déceler les intrusions d’eau, la densité ou la salinité des fluides en contact avec la fibre. Les applications sont multiples», illustre Luc Thévenaz.

Une détection spatiale et temporelle
Les changements dans l’environnement sont localisés grâce à une méthode temporelle simple. «Chaque pulsion d’onde est générée avec un léger décalage temporel. Ce décalage est reflété à l’arrivée. S’il y a eu des perturbations en cours de route, nous sommes capables de les voir, mais aussi de les localiser», explique Luc Thévenaz. «Pour l’instant, nous avons obtenu une précision de l’ordre de dix mètres, mais nous avons les moyens techniques de faire de la détection sur un mètre.»

A la base, l’idée d’utiliser ainsi une onde acoustique dans les fibres optiques avait été émise par des chercheurs partenaires de l’Université Bar-Ilan en Israël. Des recherches communes devraient être menées dans le futur.

Financement

Fond National Suisse (FNS)

Références

Desmond M. Chow, Zhisheng Yang, Marcelo A. Soto, Luc Thévenaz, Distributed forward Brillouin sensor based on local light phase recovery, Nature Communications: https://doi.org/10.1038/s41467-018-05410-2


Auteur: Laure-Anne Pessina

Source: EPFL


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La fibre optique peut identifier le type de matière qui l'entoure© Alain Herzog /2018 EPFL
La fibre optique peut identifier le type de matière qui l'entoure© Alain Herzog /2018 EPFL
© Alain Herzog / 2018 EPFL
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Desmond Chow, co-auteur de l'étude© Alain Herzog / 2018 EPFL
Desmond Chow, co-auteur de l'étude© Alain Herzog / 2018 EPFL

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