La cocaïne scie les freins du cerveau

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L’équipe de Christian Lüscher montre que la substance addictive n’excite pas seulement les neurones mais elle empêche aussi les freins de fonctionner. La cocaïne altère les circuits neuronaux entre le noyau accumbens et l’aire tegmentale ventrale, révèle un article paru dans Science.
Dans le cerveau, la cocaïne, comme toutes les substances addictives, agit sur le système de récompense. Elle l’active en augmentant la libération de dopamine, donnant ainsi au consommateur un sentiment de puissance et le poussant à adopter des comportements à risque. Pire, la drogue modifie la structure du cerveau au point que ses effets se prolongent au-delà de la prise de substance. Elle provoque un changement profond de comportement chez les personnes addict, même après le sevrage.
L’équipe de Christian Lüscher a identifié les mécanismes de ce phénomène. Les expériences menées sur des souris montrent que la substance ne provoque pas uniquement une excitation des neurones mais elle agit aussi sur des neurones inhibiteurs censés freiner les premiers. La cocaïne empêche ainsi les neurones inhibiteurs de jouer leur rôle. Du coup, le système s’emballe.
Les chercheurs ont ainsi observé que la cocaïne ouvrait un canal de communication entre deux types de neurones: ceux du noyau accumbens, associé au système de récompense, de plaisir et de renforcement des processus d’apprentissage et ceux de l’aire tegmentale ventrale, qui joue un rôle crucial dans la motivation et l’apprentissage.
Changements synaptiques
«Le but de cette étude est de définir ce qui change au niveau de l’excitation et de l’inhibition dans les différents noyaux mais aussi dans les structures du cerveau qui sont les cibles du centre de récompense», résume le professeur à l’Université de Genève et membre de Synapsy. «Nous montrons ainsi que le comportement pathologique dans l'addiction est sous-tendu aussi par des changements de la transmission synaptique inhibitrice. C'est donc une démonstration directe des bases synaptiques d'une maladie mentale, le sujet central de Synapsy.»
L’intérêt de cette recherche est de trouver des cibles pour inverser ces changements synaptiques. Une des pistes est la stimulation cérébrale profonde, comme pour le traitement des patients qui souffrent de la maladie de Parkinson. En plaçant une électrode de stimulation dans le cerveau, l’idée serait d’activer les cellules afin que la transmission se normalise.