L'horloge mécanique du XXIe siècle exposée à Neuchâtel
Une horloge mécanique totalement novatrice inventée, conçue et mise en route par l’EPFL sera installée prochainement à l’Hôtel de Ville de Neuchâtel. Doté d’un oscillateur inédit remplaçant le pendule, ce prototype concrétise un changement
conceptuel majeur dans la longue histoire de l’horlogerie mécanique.
Des chercheurs de l’Instant-Lab de l’EPFL à Neuchâtel ont réalisé un prototype d’horloge mécanique fonctionnant avec un oscillateur d’un genre nouveau. Présenté pour la première fois en 2014, cet oscillateur comporte un ressort isotrope, baptisé «IsoSpring», ayant pour fonction de remplacer les traditionnels pendules et balanciers spiraux.
Pour la première fois, IsoSpring est intégré dans une horloge mécanique complète, entraînée par un poids moteur.
Précis et silencieux, le prototype rappelle clairement par son allure les horloges neuchâteloises traditionnelles. Prêté par l’EPFL aux autorités de la ville de Neuchâtel, il est désormais exposé à l’Hôtel de Ville, dans la salle des Pas Perdus, en face d’une autre horloge célèbre, celle de l’inventeur Matthias Hipp.
La fin du tic-tac des montres
Imaginé et réalisé entièrement par l’Instant-Lab - Chaire Patek Philippe en conception micromécanique et horlogère - de l’EPFL, sous la direction de Simon Henein, cette horloge laisse envisager des garde-temps mécaniques – montres, pendulettes ou horloges - plus simples à réaliser et dotés de performances inégalées en termes de précision chronométrique et de réserve de marche, c’est-à-dire nécessitant des mises à l’heure et des remontages moins fréquents.
Le concept IsoSpring permet de passer des bases de temps traditionnelles dotées d’ un mouvement alterné, à des bases de temps à la trajectoire unidirectionnelle. Grâce à cette nouveauté fondamentale, le temps redevient silencieux et continu. L’oscillateur fonctionne en effet sans échappement, l’élément qui produit habituellement les saccades et le fameux «tic-tac» des montres. Il s’agit d’une simplification essentielle des mouvements traditionnels.
Le recours aux «guidages flexibles» permet en outre de se passer des pivots traditionnels, éliminant ainsi les frottements, l’usure et les besoins en lubrification. Il en résulte une diminution des pertes de l’oscillateur de plus d’un ordre de grandeur.
Deux brevets ont été déposés par l’EPFL, et les chercheurs travaillent à présent à une miniaturisation de cette invention. L’industrie horlogère a par ailleurs montré un très vif intérêt pour ce nouvel oscillateur.
Un oscillateur inspiré du mouvement des astres
Le mécanisme de rotation est inspiré directement des théories d’Isaac Newton publiées au 17e siècle, expliquant le mouvement des planètes autour du soleil. «Cette invention aurait techniquement pu voir le jour au 17e siècle, mais, à notre connaissance, personne n’en a eu l’idée», précise Simon Henein, titulaire de la chaire Patek Philippe, et directeur de l’Instant Lab. «Notre horloge est donc révolutionnaire tout en étant traditionnelle, deux critères chers au monde l’horloger.»
Neuchâtel au cœur de la recherche horlogère
L’horloge IsoSpring comporte un petit cadran affichant les heures et les minutes, surplombé d’un grand cadran mettant en exergue le mouvement fluide et ininterrompu de l’aiguille des secondes. Elle est coiffée par l’oscillateur orbitant dans un plan horizontal, qui remplace le pendule.
«Cette horloge est un symbole d’histoire, de science, d’innovation, d’artisanat et d’industrie; elle est emblématique de la région neuchâteloise, centre mondial de la recherche horlogère et microtechnique», commente Ilan Vardi, co-inventeur d’IsoSpring. «On l’oublie souvent mais les principales inventions liées à l’horlogerie sont issues de la région, telle que la montre à quartz.»
L’opportunité d’exposer la nouvelle horloge au cœur de la ville de Neuchâtel, et de faire sortir la recherche des murs du laboratoire a donc une saveur toute particulière pour les chercheurs de l’antenne neuchâteloise de l’EPFL. «Nous avons reçu un accueil enthousiaste des autorités de la Ville », se réjouit Simon Henein.
Pour la conseillère communale neuchâteloise Christine Gaillard, directrice de l’Education, ce projet permet aussi de montrer à la population «le rôle important joué par l’EPFL, à Neuchâtel, dans la chaîne de l’innovation, y compris dans l’horlogerie, où tradition et recherche vont de pair.»
Liens :
Chaire Patek Philippe en conception micromécanique et horlogère INSTANT-LAB