L'EPFL dévoile un secret archéologique grâce aux rayons X
Dans une collaboration inédite avec l’Archéologie cantonale vaudoise et le Musée cantonal d’archéologie et d’histoire, l’EPFL a percé les mystères d’un objet rarissime datant de l’époque gauloise grâce à un scanner à rayons X. Une exposition présente ces résultats à Lausanne, du 26 avril au 25 août.
Ces derniers mois, l’EPFL a scanné sous tous les angles une cotte de mailles gauloise de plus de 2000 ans à l’aide d’un scanner à rayons X qui permet de reproduire l’intérieur de matériaux en 3D. L’objet étudié est une rare pièce d’équipement militaire dont il ne reste que quelques exemplaires en Europe. Enfouie dans le sol et enroulée sur elle-même, cette partie de cotte de mailles est amalgamée par la corrosion avec plusieurs dizaines d’objets et fragments qui restaient jusqu’ici difficilement identifiables par les méthodes d’investigations traditionnelles.
Grâce à une collaboration scientifique inédite, des archéologues vaudois et des experts de l’EPFL sont parvenus à effectuer un inventaire complet du contenu de la cotte de mailles sans la détruire. Ils ont ensuite reproduit une dizaine d’objets qu’elle renferme grâce une imprimante 3D. Du 26 avril au 25 août 2019, une exposition au Musée cantonal d’archéologie et d’histoire à Lausanne permettra de les découvrir à côté de l’objet original, réduit par le temps à un amas difforme.
Différencier et reconstituer
«C’est une belle démonstration de ce que la tomographie à rayons X peut apporter à l’archéologie. Les archéologues ont souvent affaire à des objets complexes, déformés, altérés ou agglomérés. Cette imagerie 3D permet de les différencier et de les reconstituer», indique Pascal Turberg, directeur opérationnel de la Plateforme interdisciplinaire de micro-tomographie à rayons X (PIXE) de l’EPFL, qui permet de générer des images avec une résolution allant jusqu’à 0,5 micron. Une performance particulièrement intéressante pour déterminer la structure interne de très petits objets.
«La cotte de mailles était un défi technique pour nous en raison de sa forme compliquée et de sa composition en fer qui atténue fortement les rayons X et crée des artefacts indésirables. Cette expérience nous a permis de perfectionner notre expertise en imagerie 3D et nous sera utile à l’avenir pour scanner des matériaux complexes qui contiennent des éléments métalliques.»
Agrafe, fibules, fixation de poignée de chaudron
Même enthousiasme du côté des archéologues: «Pour nous, cette collaboration est un succès. Grâce à l’imagerie 3D, nous avons appris que la cotte de mailles ne renfermait non pas une trentaine d’objets et fragments d’objets, comme le montrait une radiographie en 2D, mais plus de 160!», commente Lionel Pernet, directeur du Musée cantonal d’archéologie et d’histoire. Parmi eux se trouvent une agrafe pour meuble, deux fibules (broches munies d’un ressort servant à attacher les vêtements), un tranchant d’outil et une attache de poignée de chaudron que les visiteurs du Musée cantonal d’archéologie et d’histoire pourront découvrir sous la forme d’impressions 3D.
Prospections
Forts de ce succès, les archéologues pensent déjà à la suite. Ils souhaiteraient notamment découvrir le contenu d’une exceptionnelle trousse à outils trouvée sur le site de Vufflens-la-Ville et scanner des objets en bois (pieux et statues), afin de préciser leur datation grâce à la dendrochronologie. Certains scans accéléreraient leurs recherches de manière non négligeable, comme l’explique Matthieu Demierre, archéologue pour la société Archeodunum SA, mandatée par l’Archéologie cantonale et chargé de cours à l’Université de Lausanne: «Le scan d’une urne funéraire nous permettrait de gagner beaucoup de temps, car au lieu de dégager lentement son contenu à l’aveugle, on saurait directement où se trouvent les ossements et les objets déposés dans l’urne.»
- «Collections printemps 2019. Actualité des découvertes archéologiques vaudoises», à voir du 26 avril au 25 août 2019, Musée Cantonal d’Archéologie et d’Histoire, Lausanne.