L'entrepreneuriat étudiant en vogue sur le campus
Depuis 2018, l’EPFL permet aux étudiants et étudiantes motivés de lancer une startup en guise de projet de master. Rencontre avec deux récents diplômés qui ont relevé ce défi avec succès.
L’écosystème de l’EPFL est particulièrement propice au développement de startups, ces jeunes entreprises innovantes à croissance rapide, avec notamment 32 nouvelles startups et près de 800 millions de francs suisses levés en 2021. Si beaucoup de ces startups sont traditionnellement lancées par des doctorants, post-docs ou alumni de l’école, de plus en plus d’étudiants et d’étudiantes en bachelor et en master se lancent dans l’aventure. Pour faciliter cette démarche, l’EPFL propose depuis 2018 à ses étudiants et étudiantes de master la possibilité, sur présentation d’un dossier solide, de développer une startup pendant leur projet de master (PDM). Appuyé(e)s par un ou une coach en business et le nouvel accélérateur Blaze mis en place par l’école, les volontaires prennent le pari de réussir à incorporer une nouvelle entreprise en l’espace de quelques mois.
Sami El Bouari, aujourd’hui diplômé en génie mécanique, a participé à ce programme en créant Evoly, une startup qui développe des compteurs d’électricité intelligents. «En utilisant la technologie de communication radio LoRa, beaucoup plus économe tant en coût qu’en énergie, nous avons pu réaliser des compteurs cinq fois moins chers que ceux disponibles sur le marché actuellement», explique l’ancien étudiant de l’EPFL. «L’Office Fédéral de l’Energie estime le coût de remplacement d’un compteur classique à 460 francs par ménage, d’où notre avantage compétitif». En plus du compteur moins cher, Evoly propose une solution d’analyse de données, pour permettre aux gestionnaires des réseaux de surveiller l’état de ces derniers en temps réel et donc d’intervenir aussitôt qu’un problème surgit.
Autre entrepreneur en herbe, Jean-Baptiste Beau a fait un bachelor en systèmes de communication avant de bifurquer vers le master en management des technologies et de l’entrepreneuriat à l’EPFL. Arrivant à la fin de ses études, il a également profité de l’opportunité de travailler sur une startup pendant son projet de master en reprenant une idée sur laquelle il travaillait de longue date : une application qui veut apprendre à ses utilisateurs à contrôler leurs rêves. «L’application aide d’abord l’utilisateur à se souvenir de ses rêves avec un journal de rêve à remplir le matin», explique l’entrepreneur. «Ensuite, des analyses de données sont effectuées grâce aux connaissances actuelles en psychologie et en neurosciences sur le fonctionnement des rêves, pour identifier par exemple les thèmes récurrents». Une future section de l’application, baptisée Oniri, permettra à l’utilisateur de mettre en œuvre des techniques qui permettent de réaliser des rêves lucides, ces rêves dans lesquelles nous sommes conscients d’être en train de rêver.
Lancé par la Vice-Présidence à l’Innovation (VPI) de l’EPFL, ce programme a déjà soutenu 10 projets de master en startup depuis sa création, avec 3 nouveaux projets en cours. «Le Programme PDM en Startup permet aux étudiants en Master, qui ont la volonté de monter une entreprise, d’avoir le temps, le soutien et l’expertise de le faire, et ce dans le cadre de leurs études et de leur diplôme» explique Margaux Pagès, responsable de l’entrepreneuriat étudiant à l’EPFL. «Il permet aux étudiants de valider leur thèse de Master et leur stage en entreprise en même temps que leur opportunité commerciale.»
Le fait de lancer une startup n’affranchit toutefois pas les étudiants et étudiantes de la rigueur académique qui doit accompagner une thèse de master : les techniques avancées par Oniri sont en partie basées sur les recherches faites par Sophie Schwartz, spécialiste en neurosciences à l’université de Genêve, qui étudie notamment l’activité cérébrale pendant les rêves et qui a co-supervisé le projet de master de Jean-Baptiste Beau. Même situation pour Sami El Bouari, qui a pu rejoindre le laboratoire des systèmes embarqués de l’EPFL pour développer sa startup Evoly.
Ces deux nouvelles entreprises sont aujourd’hui en pleine croissance : les compteurs intelligents d’Evoly ont intéressé un premier client en novembre 2020, qui a en a commandé une centaine à la petite équipe, qui a mis la main à la pâte pour les assembler et les délivrer à temps. «Notre objectif à présent est de lever des fonds et d’agrandir l’équipe. Nous pourrons alors nous permettre de signer des contrats avec de plus gros clients, dans l’ordre de milliers de compteurs», explique Sami El Bouari.
Quant à Jean-Baptiste Beau, son application Oniri est disponible sur iPhone (avec une version Android prévue pour l’été) et comptabilise déjà plus de 200'000 téléchargements, avec 25'000 utilisateurs actifs et un peu plus d’un demi-million de rêves enregistrés dans le journal de rêves intégré à l’application. «Maintenant que nous avons un projet solide, nous visons à faire croitre nos chiffres et nos revenus en lançant une campagne de marketing autour de l’application», explique le créateur de Oniri. «Puis nous chercherons du financement avec pour objectif de former une équipe de 4 à 5 personnes à plein temps d’ici la fin de 2022.»
De plus en plus d’étudiants et d’étudiantes se lancent aujourd’hui dans le monde des startups : «Depuis le lancement du Student Launchpad en janvier 2021, 10 startups étudiantes passées par nos programmes ont été incorporées » précise Margaux Pagès. «Nous prévoyons de manière très réaliste, 4 à 6 incorporations étudiantes de plus pour la fin de 2022.»