L'énergie (n') est (pas) sexy

Glòria Serra Coch est architecte et doctorante à l'EPFL. © Alain Herzog / 2023 EPFL

Glòria Serra Coch est architecte et doctorante à l'EPFL. © Alain Herzog / 2023 EPFL

Dans cette chronique, Glòria Serra Coch, architecte et doctorante au Laboratoire de relations humaines-environnementales dans les systèmes urbains (HERUS) de l’EPFL, se demande comment rendre les systèmes de gestion de l'énergie plus désirables.

L’énergie n’est pas sexy. Installer des panneaux photovoltaïques ou un système de gestion de l'énergie pour optimiser la consommation de notre maison ne revient pas à acheter le dernier iPhone. Nous ne pouvons pas l'exhiber, le placer sur une table et voir la réaction de notre entourage. En résumé: ce n'est pas sexy. La consommation d'énergie est plutôt un fardeau dont il faut s'occuper, un problème à résoudre.

Tesla a réussi à rendre les voitures électriques sexy. Un design élégant, une accélération folle et un marketing ciblé ont transformé un produit éco-hippie en l’objet le plus cool au monde. Comment appliquer cette recette aux systèmes de gestion de l'énergie, dont la plupart des gens ne connaissent même pas l’existence?

Peut-être qu'en commercialisant ces systèmes, nous ne devrions pas nous focaliser sur les économies qu’ils impliquent, mais plutôt sur l'amélioration de notre confort, notre indépendance ou l'optimisation de notre investissement. Projeter une image positive tournée vers l’avenir. Admettons que nous arrivions à rendre le système de gestion d’énergie désirable. Même si les gens savaient de quoi il s’agissait – ce qui serait déjà un exploit – et qu’ils voudraient l’installer, la question demeure: comment l’obtiendraient-ils?

Les personnes intéressées ont besoin d'un produit sur mesure. En réalité, pas d’un produit, mais d’un service.

Glòria Serra Coch, architecte et chercheuse au Laboratoire de relations humaines-environnementales dans les systèmes urbains (HERUS) de l’EPFL

Car il ne suffit pas de cliquer sur un site de vente en ligne et de le recevoir chez soi quelques jours plus tard. Pour l’installer, il faut étudier différents modèles, parler à plusieurs professionnels, voir quel régime de subvention fonctionne, trouver comment l’intégrer à sa maison et calculer si l'investissement en vaut la peine. Les personnes intéressées ont besoin d'un produit sur mesure. En réalité, pas d’un produit, mais d’un service.

De la haute couture

Ainsi, ces technologies ne sont pas du prêt-à-porter mais de la haute couture; un costume taillé sur mesure pour les spécificités de chaque bâtiment, qui ne peut être assemblé correctement que par un couturier qualifié. Peut-être qu’un avenir radieux apportera de nouveaux produits, intégrés, compatibles, des maisons déjà construites avec des dispositifs énergétiques au cœur de leur conception architecturale.

Pour l'instant, nous devons travailler avec ce que nous avons: un énorme environnement bâti existant avec des millions de particularités. C'est donc à nous, architectes, ingénieur·es, promoteur·trices, professionnel·les du secteur du bâtiment, qu'il incombe d'adapter le costume au corps, ou le système à chaque maison. Nous devons jouer un rôle actif dans la coordination des acteurs et des produits, en guidant l'utilisateur vers le résultat souhaité, afin que les solutions innovantes deviennent la norme.

Glòria Serra Coch, architecte et chercheuse au Laboratoire de relations humaines-environnementales dans les systèmes urbains (HERUS) de l’EPFL

  • Cette chronique, parue en octobre 2023 dans le magazine HABITAT des quotidiens La Côte (Vaud), Le Nouvelliste (Valais) et Arcinfo (Neuchâtel), s’inscrit dans le cadre d'un partenariat avec le groupe de presse ESH Médias visant à faire connaître la recherche et l'innovation de l'EPFL dans le secteur de la construction auprès du grand public.