Journée de la Fusion 2013

© 2013 EPFL

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En tant qu’acteur majeur dans le domaine de la recherche sur la fusion, l'EPFL a organisé une conférence pour présenter les progrès accomplis à travers le monde dans ce domaine et discuter des étapes qui mèneront à la production commerciale d'électricité par la fusion. Naturellement, ITER a été au centre des discussions.

La fusion nucléaire qui est considérée actuellement pour la production d’énergie est le processus par lequel deux isotopes de l'hydrogène se combinent "fusionnent" pour constituer un atome d'hélium, libérant ainsi d'énormes quantités d'énergie. Des processus semblables permettent au soleil, qui consomme 620 millions de tonnes d'hydrogène par seconde, de produire l’énergie nécessaire au maintien des conditions de la vie sur terre. La fusion nucléaire a le potentiel pour satisfaire, de manière durable et sûre pour l'environnement, l’augmentation des demandes énergétiques mondiales. Par le biais du Centre de Recherches en Physique des Plasmas (CRPP), l'EPFL a apporté d'importantes contributions à la recherche sur la fusion et est maintenant un membre clé de la communauté internationale qui étudie l'énergie de fusion. A ce titre, l’EPFL a organisé le 17 mai, sur son site, la «Journée de la Fusion 2013», une rencontre mettant en vedette des conférenciers internationaux dans le but de présenter l'état d'avancement de la recherche sur la fusion à travers le monde et discuter son implication dans l'avenir de l'énergie au niveau mondial.

La journée fut ouverte par une introduction du professeur Philippe Gillet, vice-président aux affaires académiques de l’EPFL, qui insista sur l'importance de la fusion en tant que moyen plus sûr de production d'énergie que la fission nucléaire. Suite à la catastrophe de réacteur nucléaire de Fukushima 2011, la Suisse a confirmé son engagement envers la recherche sur la fusion tout en sortant progressivement de la fission nucléaire. A court terme, la fusion peut également contribuer au défi de devoir continuer à former des ingénieurs pour exploiter des installations nucléaires de fission et pour finalement arrêter leur exploitation en toute sécurité.

Professeur Jiangang Li, directeur de l'Institut pour la physique des plasmas de l'Académie Chinoise

Le professeur Li nous a donné un aperçu de l'avancement des activités de recherche dans la fusion en Chine, Son pays considère la fusion comme la meilleure approche pour l'avenir de production d'énergie. La recherche dans la fusion par confinement magnétique est en plein essor dans le pays, car il y a eu une augmentation formidable des investissements gouvernementaux au cours des dernières années. Cela se traduit par plus de dix programmes universitaires pour la physique de la fusion et trois centres d’études théoriques pour un budget total de 40-60 millions de dollars chaque année. De plus, la Chine possède plusieurs tokamaks pour la recherche. En particulier, EAST (Experimental Advanced Superconducting Tokamak) à Hefei, est crucial dans l'avancement des connaissances sur la physique des plasmas en états stationnaires, dont l’importance est primordiale pour les installations utilisant la technologie des hautes fréquences. Le futur de la Chine dans la fusion comprend sa participation dans le projet ITER, la construction du tokamak « China Fusion Engineering Testing Reactor » (CFETR) et son exploitation jusqu'à la production de 200 MW dans le milieu des années 2030.

Professeur James W. Van Dam, Directeur de la division de recherche, Fusion Energy Sciences, Département de l'énergie des USA

En commentant les progrès acquis dans les cours des 50 dernières années, le Dr Van Dam a décrit l'impact que la fusion de l'hydrogène pourrait avoir à l'avenir sur le bilan mondial de l'énergie. En théorie, la fusion pourrait couvrir les besoins énergétiques de la planète pendant des milliers d'années. La fusion est 14 millions de fois plus efficace (quantité d'énergie par kg de 'combustible') que le charbon, 7 millions de fois plus efficace que le pétrole et 4 fois plus efficace que la fission nucléaire. Avec l’abondance de carburant disponible, la fusion peut offrir une production d'énergie à grande échelle sans pollution atmosphérique, telle que les émissions de carbone ou de gas sources des pluies acides, ni de déchets radioactifs persistants ou des risques d'un « emballement » catastrophique de la réaction. Ces avantages justifient les frais élevés actuellement liés à la recherche sur la fusion. Les États-Unis misent beaucoup sur la fusion, avec de nombreux laboratoires sur leur sol national, leur participation au projet international ITER et des études sur des configurations alternatives du plasma telles que la géométrie sphérique explorée au National Spherical Torus Experiment à l'Université de Princeton . Le département de l'énergie américain étudie actuellement les retombées de la technologie des plasmas dans des applications à la vie courante.

Dr Francesco Romanelli, European Fusion Development Agreement (EFDA) Leader and EFDA Associate Leader for Joint European Torus (JET)

Le Dr. Romanelli nous a décrit les principaux défis qui influencent les stratégies énergétiques de l’Europe en termes de durabilité, sécurité de l'approvisionnement et compétitivité économique. La fusion peut être une source d'énergie disponible et pratiquement illimitée qui est intrinsèquement sûre et écologiquement responsable. Déjà dans les années 90' le projet JET a réussi à confiner un plasma chaud et générer de l'énergie de fusion, toutefois pas encore avec un bilan énergétique positif. Le cheminement pour maîtriser la fusion passe par la construction et l’exploitation de ITER, qui permettra de vérifier la faisabilité de la production d'énergie par la fusion, avant de construire « DEMO », un premier réacteur à bilan énergétique positif, fournissant des centaines de MW de puissance électrique. Le Dr. Romanelli nous a présenté le calendrier de la recherche de la fusion en l'Europe. Bien qu'il s'agisse d'un document évolutif en fonction des découvertes scientifiques, aux innovations technologiques et aux conitions budgétaires, son orientation est et restera de fournir de l'électricité produite par la fusion dans nos maisons à l'horizon 2050.

Dr Henrik Bindslev, directeur général, European Joint Undertaking, Fusion for Energy (F4E)

En clôture de la Journée, le Dr Bindlev nous a donné un aperçu du projet ITER en costruction à proximité du centre d'études de Cadarache, en France. ITER sera le plus grand tokamak au monde, ce qui permettra la réalisation d’études, jusqu’ici impossibles, sur les plasmas de fusion. ITER est destiné à générer 10 fois l'énergie nécessaire à son exploitation, (il va produire 500 MW d’énergie thermique pour une consommation pour son fonctionnement de 50MW), mais il ne produira pas d’électricité, il sera utilisé principalement comme banc d’essai pour la mise en place des technologies nécessaires à la construction d’un réacteur produisant de l’électricité. Le Dr Bindlev a caractérisé la mission d’ITER comme celle de définir «les normes et les règles» dans le domaine de la fusion et de compléter les pas vers l’exploitation commerciale de la fusion en renforçant la compétitivité de l'industrie des technologies de fusion. Toutefois, le Dr Bindlev a remarqué qu'ITER fait face à des importants défis à venir, en particulier il devra contribuer à mieux comprendre le comportement du plasma chaud et permettre la sélection et/ou le développement de matériaux appropriés pouvant supporter des grandes charges de chaleur.

La Journée de la Fusion s'est terminée par une séance de réponse aux questions, qui se sont concentrées surtout sur les aspects économiques et l'impact environnemental des activités actuelles de la fusion.