«Il faut toujours être honnête et transparent envers ses étudiants»
Sandrine Gerber est lauréate du prix de section chimie et génie chimique 2018. Elle enseigne à l'EPFL depuis 17 ans.
Au moment de choisir sa carrière, Sandrine Gerber a hésité entre chimie et médecine. Elle a opté pour la première «faute de difficultés à gérer la douleur des gens», sans pour autant renoncer totalement à la seconde puisque ses recherches sont ciblées dans le domaine biomédical. La professeure de chimie dispose d’une fibre humaniste et depuis ses débuts, elle aime particulièrement transmettre son savoir. En retour, ses enseignements sont très appréciés des étudiants et estimés de ses confrères. Ainsi, Sandrine Gerber, arrivée à l’EPFL en 2001, est élue cette année meilleure enseignante de la section chimie et génie chimique.
«Il faut être conscient que notre mission est de former des ingénieurs et des chercheurs pour les futures décennies, l’enseignement ne doit pas passer en second plan par rapport à la recherche. » Suivant ce principe, l’ingénieure en chimie dédie une grande partie de son temps à transmettre son savoir. Côté UNIL, elle enseigne la chimie organique a plus de 300 étudiants de 1ère année en pharmacie et biologie. «J’aime beaucoup l’enseignement en propédeutique, car tout est encore ouvert, c’est le moment où l’on peut énormément influencer la perception du monde universitaire. » Côté EPFL, elle donne un cours sur les fonctions et réactions organiques pour les étudiants de 1ère année et un cours de rétrosynthèse en option pour les élèves de 3e année. Pour des raisons de charge de travail, elle a décidé d’abandonner en 2018 le cours de travaux pratiques qu’elle donnait depuis trois ans aux étudiants de 2e année. «J’appréciais ce moment, mais lorsque 80 étudiants au début de leur cursus doivent effectuer des manipulations de synthèse organique cela demande beaucoup de mise en place, notamment en raison des aspects sécuritaires. » Heureusement, les dégâts se sont toujours limités à quelques bris de verre.
Des cours bien rythmés
Sandrine Gerber avait 28 ans lorsqu’elle a donné son premier cours de chimie ex-cathedra, devant 200 étudiants de l’Université de Lausanne (UNIL). Avec le sourire, la professeure se souvient parfaitement de son entrée dans l’auditoire, le cœur tambourinant. « A la fin j’étais épuisée, mentalement et physiquement.» Aujourd’hui, elle est rompue à l’exercice et elle a appris à se déliter de l’idéal de perfection. «Au cours d’une carrière, il va forcément arriver de se tromper, mais il faut le reconnaître et toujours être honnête et transparent envers ses étudiants. »
Pour maintenir l’attention des étudiants face à une matière complexe, la professeure joue sur les changements de rythme, jongle entre partie théorique, questions, quizz, visionnage de petits films ou démonstrations à l’aide de modèles moléculaires. Et elle met en ligne les exercices en amont de son cours, pour permettre aux étudiants de poser toutes leurs questions en classe. «Je suis là pour leur expliquer 50 fois la même chose s’il le faut, par contre je suis très stricte sur le niveau de connaissances qu’ils doivent acquérir.» Une exigence qu’elle applique aussi à elle-même, renouvelant chaque année ses cours et exercices pour coller aux avancées de la recherche. « Mon but est d’être motivante, disponible et structurée. » De sa vie d’étudiante, elle conserve un sens de l’organisation aiguisé et une curiosité à toute épreuve. «Même si le résultat ne correspond pas à nos attentes, il faut continuer à chercher, car on peut toujours tomber sur une pépite.» Ainsi, elle incite ses élève et doctorants à entretenir un regard d’orpailleur, mais aussi à cultiver leur esprit critique pour les amener à devenir de réels orfèvres des molécules.