Eviter les grains de sable dans les chaînes logistiques

© 2012 Photos.com

© 2012 Photos.com

Trop ou… trop peu! Nombre d’entreprises doivent apprendre à optimiser leurs chaînes d’approvisionnement. Les chercheurs de l’EPFL ont analysé les meilleures stratégies et prouvé qu’une coordination efficace des chaînes est une source importante d’économies.


Les recherches du Ralf Seifert ont débuté en 2003 à la demande de LEGO qui vivait des heures noires et accusait de considérables pertes. A cette époque, son usine suisse est même obligée de fermer. L’entreprise danoise, forte du succès de ses petites briques plastiques lancées à la fin des années quarante, n’a pas senti le vent tourner. « Une remise en question intéressante qui a obligé LEGO à prendre en considération la dynamique mondiale, à remettre en question son portefeuille de produits, ses lieux de production ou encore ses moyens de transports», explique le titulaire de la chaire de technologie et gestion opérationnelle. Est-il possible de réagir rapidement à l’évolution des marchés, de minimiser les coûts sans pour autant générer une rupture de stock ou un sur-approvisionnement ?

L’innovation booste les prix à court terme

Un produit innovant est souvent éphémère et cela complique la gestion de l’approvisionnement. Sa durée de vie est bien plus courte aujourd’hui qu’il y a 20 ans ; la VHS a mis deux décennies pour voir son prix baisser, le DVD 4 ans, le prix du Blu Ray a chuté encore plus vite ; quant aux écrans LCD, ils ont perdu 50% de leur valeur 1 an après leur lancement. Il est donc essentiel de choisir avec soin sa stratégie logistique et de l’adapter en fonction de la demande. Dans les pays occidentaux, lorsque le produit est nouveau, il est préférable de le produire à proximité : son prix de vente élevé compense les coûts de production. Ce choix facilite la réactivité par rapport à la demande. En revanche un produit classique, un “basic ” dont la production est régulière - comme un tee-shirt uni, un composant électronique ou un jouet indémodable en plastique - pourra être délocalisé.

Des chaînes d’approvisionnement bien alignées
«Pour cette étude, nous avons interviewé de nombreuses entreprises qui gèrent avec habilité leurs chaînes d’approvisionnement et l’on constate qu’elles ont dû dispatcher leurs activités», explique Ralf Seifert. Logitech a choisi l’Irlande avant Taïwan et la Chine. Hilti, grande enseigne d’outils de chantier, joue sur les deux tableaux. Ses produits innovateurs sont fabriqués en Europe, ceux plus standards en Asie et stockés en Europe pour assurer le remplacement du matériel défectueux en 48 heures. Zara, leader mondial de l’habillement, propose 17 000 nouveautés par année, dont la plupart sont produites en Europe. Ses produits classiques sont, eux, réalisés en Asie. Ralf Seifert a compulsé de nombreux cas dans les domaines les plus divers.

Les entreprises pharmaceutiques touchées elles aussi
D’ici 2015, les brevets de plusieurs médicaments importants expireront. 40% du chiffre d’affaire du marché mondial sera ouvert à la compétition des génériques, beaucoup moins chers. Protégées pendant de nombreuses années, elles aussi vont devoir repenser toute leurs chaînes d’approvisionnement pour faire face à la pression des coûts.

L’adaptation est un maître-mot
Parfois, l’entreprise doit opter pour une stratégie d’adaptabilité : des chaînes d’approvisionnement centralisées, qui répondent rapidement aux changements de la demande. Dans d’autres cas, il vaut la peine de décentraliser l’approvisionnement, pour bénéficier des meilleurs coûts possibles. Les chercheurs ont mis en lumière des règles générales mais pas de réponse unique. Sur la base de leurs analyses et grâce aux modèles mathématiques qu’ils ont développés, ils ont démontré qu’en alignant les chaînes d’approvisionnement en fonction de la nouveauté ou de la pérennité des produits, il est possible de réaliser des économies substantielles et d’augmenter les performances.
Les recherches de Ralf Seifert ont donné lieu à deux publications, la première dans le “European Journal of Opérations” et la seconde qui paraîtra au mois de janvier dans “International Journal of Production Economics.” Des thématiques qui sont maintenant enseignées dans les cours master de la section MTE. Actuellement, Ralf Seifert et son équipe poursuivent cette recherche en intégrant, maintenant, la dimension environnementale.