Des télécommunications acheminées 1000 fois plus rapidement !

Un vieux rêve scientifique a été réalisé par des chercheurs de l’EPFL : intégrer sur la même puce en silicium des circuits optiques et électroniques. Cette percée technologique permet de rendre le tri des télécommunications 100 à 1000 fois plus rapides qu’aujourd’hui.

La lumière peut véhiculer beaucoup plus d'informations que l'électricité. C’est pourquoi la fibre optique a depuis longtemps remplacé les câbles électriques dans la plupart des réseaux de télécommunications. Par contre, les routeurs, sortes d’aiguillages servant à diriger les flux d'information, sont toujours composés de puces intégralement électroniques. A chaque carrefour, les signaux optiques doivent être convertis en signaux électriques, traités électroniquement, puis reconvertis en signaux lumineux pour la suite du transport. A la fois lent et coûteux, ce processus n’avait jusqu’à aujourd’hui pas été simplifié, faute de solution technologique satisfaisante.

« L’idée de fabriquer une puce optoélectronique – qui intègre des circuits optiques et électroniques – hante depuis longtemps l’esprit des chercheurs », précise le professeur Philippe Robert, du Laboratoire de métrologie et photonique (LMP) de l'EPFL. L’apparition sur le marché du substrat SOI, qui sert de base pour réaliser des circuits électroniques performants, a ouvert la voie à la réalisation de ce vieux rêve. En plus d’être très performant et fiable (donc largement utilisé), ce nouveau substrat en silicium a en effet la particularité de pouvoir moduler et rediriger la lumière des lasers utilisés en télécommunication. En gravant des reliefs à sa surface, on peut créer des sortes de canaux à lumière. Ce qui permet d’intégrer sur un même substrat les circuits optiques reliant les fibres des réseaux et les circuits électroniques pilotant les flux lumineux.

Reste une difficulté de taille : l’échauffement du circuit. Ce phénomène empêche l’interruption correcte des flux lumineux et, partant, la transmission fiable des données. Le LMP a collaboré durant cinq ans avec le Laboratoire d’électronique générale (LEG) et l’Institut de microélectronique et microsystèmes (IMM) de l'EPFL à la recherche d’une solution. Celle qui a germé dans l’esprit du Dr Paolo Dainesi, du LMP, est aussi simple qu’efficace. Elle a d’ailleurs été brevetée. Le canal de lumière est séparé en deux parties, chacune recevant la même puissance électrique, et donc le même échauffement. Le circuit est ainsi équilibré thermiquement. Par contre cette puissance est délivrée sous haute tension et bas courant dans l'un des canaux, respectivement basse tension et haut courant dans l'autre. C’est le courant élevé dans le circuit qui permet un contrôle total sur le flux lumineux et son acheminement idéal dans le réseau.

Un des avantages majeurs des routeurs optoélectroniques est leur capacité à transporter simultanément différentes longueurs d’onde. Chaque couleur - ou longueur d’onde - gère un flux d’information spécifique. Cela signifie qu’un routeur optoélectronique relié à une fibre optique peut gérer simultanément plusieurs flux d’information, d’où une efficacité et une rapidité accrues. « On peut imaginer des routeurs de 100 à 1000 fois plus rapides qu’actuellement » affirme le Dr Luc Thévenaz qui a supervisé le projet. La réalisation concrète est très économique et d’une grande simplicité. Basée sur la technologie SOI, la production de masse de substrats optoélectroniques dans des conditions avantageuses est dès lors possible. Le LMP est aujourd'hui à la recherche de partenaires industriels.