Des pétales électroniques enregistrent l'activité neuronale

The e-Flower device © 2024 EPFL/Alain Herzog - CC-BY-SA 4.0

The e-Flower device © 2024 EPFL/Alain Herzog - CC-BY-SA 4.0

Un groupe de recherche de l’EPFL a développé un dispositif d'enregistrement neural inédit appelé "e-Flower", qui emballe délicatement des organoïdes avec des pétales souples.

Les sphéroïdes neuronaux — des structures tridimensionnelles de cellules cérébrales — sont en train de devenir des outils essentiels pour comprendre les réseaux neuronaux et étudier les maladies neurologiques en laboratoire. Conçue à l'EPFL, l'e-Flower, une matrice de microélectrodes tridimensionnelle en forme de fleur, permet de surveiller l'activité électrique de ces sphéroïdes d’une manière innovante. Publiée dans Science Advances, cette technologie ouvre la voie à des recherches plus avancées sur les organoïdes cérébraux, des modèles miniaturisés complexes de tissus cérébraux.

Notre technologie flexible permet d’obtenir des enregistrements précis sans endommager ces modèles neuronaux tridimensionnels.

Stéphanie P. Lacour

«Grâce à l'e-Flower, nous pouvons enregistrer l'activité neuronale sur une grande surface des sphéroïdes neuronaux en temps réel, ce qui n'était pas possible avec les outils à disposition. Notre technologie flexible permet d’obtenir des enregistrements précis sans endommager ces modèles neuronaux tridimensionnels, offrant ainsi une mesure précise de l’activité de ces circuits complexes», explique Stéphanie P. Lacour, auteure principale de l’étude et professeure au Laboratoire d’interfaces bioélectroniques souples (LSBI) à l’Institut Neuro X.

Pourquoi les sphéroïdes neuronaux ?

«Nous avons choisi de nous concentrer sur les sphéroïdes neuronaux, car ils constituent un modèle simple et accessible», précise Eleonora Martinelli, l’une des principales chercheuses.

"Notre objectif est d’appliquer l’e-Flower aux organoïdes cérébraux." Eleonora Martinelli © 2024 EPFL/Alain Herzog - CC-BY-SA 4.0

Les sphéroïdes neuronaux sont des structures tridimensionnelles de neurones qui reproduisent certaines des principales fonctions des tissus cérébraux. Ils sont plus simples que les organoïdes, qui contiennent plusieurs types de cellules et imitent plus fidèlement le cerveau. L'équipe du LSBI, située au Campus Biotech, a collaboré avec Luc Stoppini et Adrien Roux du Laboratoire d'ingénierie tissulaire (HEPIA-HESGE), des chercheurs bénéficiant d'une longue expérience dans l'électrophysiologie des sphéroïdes neuronaux.

«Les sphéroïdes sont relativement faciles à produire et à manipuler en laboratoire, ce qui en fait un modèle idéal pour les tests préliminaires, poursuit Eleonora Martinelli. Cependant, notre objectif est d’appliquer l’e-Flower aux organoïdes cérébraux, qui modélisent de manière plus précise le développement et les troubles du cerveau.»

«Les organoïdes représentent une interface passionnante à la fois pour la recherche en neurosciences et pour les neurotechnologies de nouvelle génération, ajoute Stéphanie Lacour. Ils comblent le fossé entre les modèles simplifiés in vitro et la complexité du cerveau humain. Notre travail avec l’e-Flower est une étape cruciale pour pouvoir explorer ces modèles tridimensionnels.»

L’opportunité et l’ingéniosité à l’origine de l’innovation

Ce qui était à l'origine un problème pour un projet est devenu la solution pour un autre.

Eleonora Martinelli

Curieusement, l’e-Flower est née d’une découverte inattendue. Outman Akouissi, collaborateur et co-auteur de l’étude, a rencontré un problème en travaillant sur des implants souples pour les nerfs périphériques: les hydrogels qu’il utilisait faisaient friser ses dispositifs de manière imprévisible lorsqu’ils étaient exposés à l’eau. D’abord source de frustration, l’inconvénient s’est transformé en percée lorsque Akouissi et Martinelli ont réalisé que ce mécanisme de frisage pouvait être utilisé pour une application complètement différente: envelopper des sphéroïdes neuronaux.

«C’était un parfait exemple de la combinaison d’opportunité et d’ingéniosité, explique la chercheuse. Ce qui était à l'origine un problème pour un projet est devenu la solution pour un autre.»

Une nouvelle approche de l’électrophysiologie neuronale

Le dispositif est constitué de quatre pétales flexibles équipés d'électrodes en platine qui s'enroulent autour du sphéroïde lorsqu'ils sont exposés au liquide soutenant la structure cellulaire. Cette activation est provoquée par le gonflement d'un hydrogel souple, rendant le dispositif à la fois délicat pour les tissus et facile à utiliser.

Conçu pour être compatible avec les systèmes de mesure d’électrophysiologie existants, l'e-Flower offre une solution "plug-and-play" (prête à l’emploi) pour les scientifiques.

Une fois appliquée aux organoïdes, la capacité de l'e-Flower à enregistrer l'activité électrique de tous les côtés offrira une compréhension beaucoup plus complète des processus cérébraux. L’équipe de recherche espère que cela conduira à des découvertes sur le développement neurologique, la récupération après une lésion cérébrale et les maladies neurologiques.

Références

Martinelli, E., Akouissi, O., Liebi, L., Furfaro, I., Maulà, D., Savoia, N., Remy, A., Nikles, L., Roux, A., Stoppini, L., Lacour, S.P. "The e-Flower: A Hydrogel-Actuated 3D MEA for Brain Spheroid Electrophysiology." Science Advances, 2023. DOI:10.1126/sciadv.adp8054


Auteur: Michael David Mitchell

Source: EPFL

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