Des peaux de phoque qui n'ont plus besoin de pot de colle
Dossier PME 3/4. Pomoca, entreprise spécialisée dans la production de peaux de phoque, collabore avec deux laboratoires et une spin-off de l’EPFL. Un partenariat qui lui permet d’amorcer un virage technologique dans cette discipline en plein essor.
On les appelle toujours des peaux de phoque, mais cela fait près d’un siècle que les semelles des skis de randonnée ne sont plus habillées de véritables peaux. Le velours leur a succédé dans les années 30, puis la colle a fait son apparition dans les années 70 pour faire adhérer le tissu. « L’évolution des peaux s’est faite très lentement, et il est temps d’apporter de l’innovation dans ce domaine, explique Josep Castellet, directeur de Pomoca. Nous travaillons sur deux axes : le collage des peaux grâce à une contribution sous forme d’un CTI avec des laboratoires de l’EPFL et l’analyse des performances des skieurs avec Gait Up, spin-off de l’EPFL. »
De la recherche appliquée…
Véronique Michaud dirige le Laboratoire de mise en œuvre de composites à haute performance. Deux tiers des projets de recherche menés par son équipe sont destinés aux entreprises et PME, car des matériaux composites il y en a partout : « Dans l’automobile, l’aéronautique, l’espace, le sport, le biomédical, dans l’énergie, dans le packaging, partout, confirme la chercheuse. On ne fait pas seulement des composites structurels, on y intègre des fonctions, des capteurs, on les rend plus intéressants sur le plan mécanique ou acoustique. » Ces recherches font souvent l’objet d’une thèse, parfois ce sont des projets à plus courte durée sous l’égide d’Innosuisse, plus rarement de la recherche fondamentale. « J’aime voir mes travaux aboutir à des applications concrètes ! »
… à la recette secrète
Et c’est exactement le mandat que lui a confié Pomoca, l’amélioration des colles des peaux de phoque. Un projet mené avec Henrik Ronnow, en charge du Laboratoire de magnétisme quantique : « Mon laboratoire est plutôt fondamental, toutes les occasions de collaborer avec l'industrie sont intéressantes. L’un des défis est de combler le fossé entre nos connaissances scientifiques très détaillées et les besoins très concrets de la société. Afin de trouver des solutions efficaces et satisfaisantes pour l’industrie, les scientifiques doivent mettre de côté leur recherche de perfection – qui prend trop de temps. »
Pour Josep Castellet, la contribution de l’EPFL est un vrai atout pour l’entreprise : « Nous connaissons bien le tissu économique, mais nous n’avons aucune connaissance scientifique. En 2019, le projet sera terminé, nous aurons une formule innovante et brevetée. Seuls, nous n’y serions jamais arrivés. »
Mesurer les performances
L’autre aspect important est celui de la compétition. Le ski alpinisme figurera au programme des Jeux olympiques d’hiver de la jeunesse qui se tiendront à Lausanne en 2020. La collecte de données et l’analyse des performances sont donc primordiales pour les athlètes. La rencontre entre Pomoca et Benoît Mariani, fondateur et CEO de Gait Up, spin-off de l’EPFL, a permis de développer le PomocUp, un capteur spécifique qui se fixe sur le ski de randonnée. Il donne des informations telles que le degré de la pente, la longueur de foulée, la glisse, le temps entre chaque transition. Après plusieurs années de développement, ce capteur est désormais commercialisé par Pomoca. « Nous avons découvert que Michele Boscacci, recordman de la Patrouille des glaciers 2018, portait le PomocUp. Cela nous a confirmé l’intérêt des entraîneurs », se réjouit Benoît Mariani.