Des maths pour prédire le succès d'un projet Kickstarter

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Vincent Etter, doctorant en Systèmes de communication, a mis au point un outil d’analyse consacré aux projets cherchant un financement sur le site Kickstarter. Après quelques heures seulement, il peut prédire le succès ou l’échec de la levée de fonds avec une précision stupéfiante.

Avoir une bonne idée d’entreprise ou artistique, la déposer sur Kickstarter et croiser les doigts… pendant un à deux mois. Ce processus, des milliers de créatifs le pratiquent chaque année, comptant sur la force de persuasion de leur projet et l’effet de « buzz » qu’il pourrait générer afin d’obtenir assez de micro-dons pour le faire avancer. Lancé en 2009 aux Etats-Unis, ce site de « crowdfunding » (financement par les foules, ndlr) s’est depuis ouvert à d’autres pays et a déjà permis de rassembler plus de 800 millions de dollars pour financer près de 50'000 projets.

Un doctorant au Laboratoire pour les communications informatiques et leurs applications (LCA) de l’EPFL, Vincent Etter, s’est intéressé de près à ce phénomène. Spécialiste des modèles mathématiques prédictifs, il a trouvé auprès des projets Kickstarter suffisamment de matière pour élaborer un outil de simulation particulièrement performant. « Il y a plusieurs approches possibles pour effectuer ces prédictions, explique-t-il. On peut simplement observer la vitesse à laquelle le projet obtient des fonds durant les premiers jours et comparer cette courbe avec d’autres issues de la base de données que j’ai rassemblée et qui compte quelque 16'000 projets. On peut aussi s’intéresser à la part de financement obtenue à un temps donné, par exemple à mi-course. Mais toutes ces méthodes ne donnent que des prédictions moyennement fiables. »

Pour améliorer la pertinence de ses projections, Vincent Etter est parti en quête d’autres indices. « J’ai remarqué qu’aux 16'000 projets que j’ai étudiés correspondaient quelques 700'000 mentions sur Twitter, et que les tweets suscités par chaque projet pouvaient donner un bon signe de son potentiel viral. Je me suis aussi intéressé à l’historique de chacun des investisseurs : on retrouve certains d’entre eux dans plusieurs projets ayant réussi à atteindre leur objectif financier, ce qui peut vouloir dire qu’ils sont eux-mêmes influents auprès d’autres donateurs, ou simplement qu’ils ont du flair. »

Fiable à 75% – après quelques heures seulement
Il ne restait plus, dès lors, qu’à trouver le moyen de faire converger tous ces indices afin d’augmenter la fiabilité des prédictions. Ce à quoi Vincent s’est attelé – avec un succès presque inespéré. « En combinant ces différents modèles prédictifs dans un seul et même outil, je parviens à établir un pronostic sûr à plus de 75% trois à quatre heures seulement après le lancement du projet », assure-t-il. Après 36 heures de campagne, ses prévisions affichent même une fiabilité de près de 84% ! « Pour les candidats, une appréciation rapide de leur chance de succès est cruciale, reprend-il. Plus ils réalisent rapidement que leur projet démarre mal, plus cela leur laisse de temps pour revoir leur stratégie de promotion, changer quelques mots dans l’intitulé ou mettre en place une campagne sur les réseaux sociaux. »

Présenté récemment lors de la Conference on Online Social Networks (COSN’13) à Boston, le modèle de Vincent Etter tourne en continu sur un site dédié : sidekick.epfl.ch, sur lequel il est possible de voir évoluer en temps réel les pronostics liés à chaque projet en cours de financement.