Demander la Lune pour y faire pousser des légumes
GrowBotHub est un système robotique qui fait pousser et récolte des plantes de manière automatisée et autonome. Ce projet de l’EPFL participe à la 2e édition de la campagne IGLUNA, qui fait appel à l’inventivité des étudiants pour développer les technologies utiles à la conception d’un habitat spatial. Cet événement aura lieu en ligne en juillet.
Il y a la semaine des quatre jeudis, les poules avec des dents et demander la Lune. Y faire pousser des légumes est-il aussi synonyme de chose impossible? Plus pour longtemps. C’est en tout cas ce à quoi travaille une équipe interdisciplinaire d’étudiantes et étudiants de l’EPFL. Réunis dans le cadre de l’association GrowBotHub, ils participent également à la campagne IGLUNA, lancée par le Swiss Space Center de l’EPFL sur l’initiative de l’Agence spatiale européenne (ESA). Son but est de définir les technologies nécessaires à la survie d’astronautes en mission dans un environnement lunaire ou sur d’autres planètes.
Cette campagne, dont c’est la 2e édition, aura bien lieu entre le 10 et le 19 juillet, mais en ligne plutôt qu’à Lucerne comme initialement prévu. Son thème principal sera le contrôle à distance. Elle réunira une quinzaine de projets, impliquant quelque 130 étudiants provenant d’universités de dix pays d’Europe et proposant chacun des solutions originales dans des domaines cruciaux à la vie en milieux extrêmes, que ce soit la gestion de l’eau et de la nourriture, la conception et construction de l’habitat, les moyens de communication ou de navigation, la production d’énergie, la fabrication et la réparation d’outils, le bien-être et la santé des personnes, etc. L’année dernière, la première édition s’est déroulée à Zermatt, dans les grottes glacées du Matterhorn.
GrowBotHub est le seul projet de l’EPFL participant à cet événement cette année. Devenu récemment une association reconnue de l’Ecole, il réunit une trentaine d’étudiants, principalement en master, qui mettent leurs connaissances en commun dans différentes disciplines - robotique, chimie, sciences de la vie, gestion de données, systèmes de communication, microtechnique, matériaux, électricité, etc. - pour réaliser une plateforme permettant de faire pousser puis de récolter des légumes de manière automatisée et en toute autonomie, selon les principes de l’aéroponie.
Il s’agit de cultures hors-sol, nourries par la vaporisation planifiée de solutions nutritives sur les racines. Le système robotique intégré à la machine calcule savamment tous les paramètres, telle que la composition et les quantités de nutriments, le pH, le degré d’humidité, de lumière et la température du milieu, en fonction des besoins de chaque plante.
Épinards, radis, piments…
Le but ultime du projet est que les ressources puissent être optimisées et réutilisées au maximum, ce qui représente un avantage non négligeable dans un environnement où elles sont particulièrement rares. Un dispositif de plateaux tournant dans un carrousel permet d’utiliser également l’espace à disposition le plus rationnellement possible tout en produisant le plus de légumes. A ce jour, le robot a fait pousser avec succès des salades, des épinards, mais aussi des radis, de la roquette, du basilic. Le sens du goût se trouvant en fait altéré et amenuisé par les longs séjours dans l’espace, l’équipe étudie également maintenant la culture de plantes plus épicées, comme le piment. Elle travaille aussi sur la possibilité d’obtenir des légumes racines tels que des pommes de terre.
«Notre but est que notre système puisse produire de 25% à 30% des besoins nutritifs des astronautes et qu’une récolte puisse avoir lieu au moins chaque jour», explique Victoria Letertre, ingénieure système et présidente de l’association GrowBotHub. Les deux mois de confinement, durant lesquels l’accès au campus et donc au robot n’a pas été possible, ont été un bon test, relève l’étudiante. «Nous avons craint pour la viabilité de notre projet, mais finalement, les plantes ont bien tenu et même continué à grandir, ce qui prouve le bon fonctionnement de la plateforme».
A terme, l’invention ne sera pas réservée au domaine spatial. Des expéditions en milieu polaire ou des missions sous-marines pourraient également en bénéficier. Sans oublier les aspects de durabilité, qui en font une solution potentiellement intéressante pour une production de légumes en petites unités, locales et autonomes.
Présentation du projet GrowBotHub, dans le cadre de l'association «Astronomy on tap»:https://youtu.be/WEhXaxzRe_s
Vidéo sur l'édition d'IGLUNA en 2019, à Zermatt : https://youtu.be/o5dbXNJ0i_I