«Dans l'Espace, le ciel est spectaculaire durant les nuits orbitales»

Claude Nicollier © 2024 EPFL/Tanya Petersen - CC-BY-SA 4.0

Claude Nicollier © 2024 EPFL/Tanya Petersen - CC-BY-SA 4.0

Pour marquer la Journée internationale du vol spatial habité proclamée par les Nations unies, nous avons échangé avec Claude Nicollier, astronaute, astrophysicien, professeur émérite à l’EPFL et l’unique citoyen suisse à avoir voyagé dans l’Espace.

Quand il était enfant, Claude Nicollier pratiquait le ski et la randonnée dans les montagnes entourant Les Diablerets, la ville suisse qui a récemment accueilli la conférence inaugurale «Cosmology in the Alps». Des décennies plus tard, lors d’une mission de réparation du télescope Hubble, il a regardé la Terre depuis l’Espace pour voir ces mêmes montagnes qui l’avaient inspiré dans son enfance. «Dès mon plus jeune âge, je regardais le ciel. Je me souviens du satellite ECHO, très lumineux, en 1960, au tout début de l’ère spatiale.»

Claude Nicollier a débuté sa carrière en tant qu’astrophysicien et pilote de l’armée de l’air suisse avant d’être sélectionné dans le premier groupe d’astronautes de l’Agence spatiale européenne en 1978. Il a été détaché au centre spatial Johnson de la NASA, au Texas, pour effectuer une formation complète sur la navette spatiale américaine. Il a participé à quatre missions en tant que membre d’équipage, dont deux interventions en orbite sur le télescope spatial Hubble.

«La mission qui m’a le plus marqué a été la première, pour la réparation de Hubble, car je suis passé du statut d’astronome à celui d’astronaute. Le sentiment de responsabilité était immense, car Hubble a permis de découvrir les merveilles des objets célestes et a eu un impact considérable sur notre connaissance de l’Univers. Lors de cette première mission critique d’entretien de Hubble, la NASA nous a clairement fait comprendre que l’échec n’était pas une option. Mon envie de réussir était donc énorme», explique Claude Nicollier.

Depuis Hubble, le télescope James Webb, le plus puissant jamais construit, a été déployé et le Square Kilometer Array Observatory, le plus grand radiotélescope du monde et la plus grande installation scientifique jamais construite, est en cours de construction. La Suisse participe à cette initiative mondiale par le biais de SKACH, dont le secrétariat se trouve à l’EPFL et qui contribue à la science, à la science des données, aux plateformes et infrastructures informatiques, à l’instrumentation, ainsi qu’à l’éducation et à la sensibilisation du public.

«J’ai récemment pris conscience que le côté obscur de l’humanité revenait comme une grande vague dangereuse et je suis inquiet, mais en même temps, nous avons la valeur indéniable des accomplissements dans le domaine de la science et, en particulier, de l’astrophysique – ces merveilleux développements en matière de coopération internationale multiculturelle et multipays dans le domaine de la science et de l’ingénierie. C’est le bon côté de l’humanité. Nous devrions continuer à rechercher activement ce type de collaboration», confie Claude Nicollier lors de la conférence.

Il a également décrit sa sortie dans l’Espace de plus de huit heures, lors de sa dernière mission en 1999, pour installer de nouveaux équipements sur le télescope Hubble. Au total, Claude Nicollier a passé plus de 1000 heures dans l’Espace pendant ses quatre missions.

«C’est une expérience très profonde. J’étais toujours impressionné par l’obscurité de l’Espace pendant le jour orbital. J’avais l’impression de voir le Big Bang après 13,8 milliards d’années de refroidissement, puis vous apercevez cette magnifique planète bleue et blanche, et constatez à quel point la Terre est petite et fragile et que nous sommes isolés. Nous devons régler nos problèmes nous-mêmes car, entourés de l’Espace, personne d’autre ne nous aidera. Nous devons prendre soin de notre planète car c’est notre responsabilité. Bien sûr, je regardais la Terre comme le font la plupart des astronautes, mais Claude, l’astronome, regardait aussi souvent au-dessus de l’horizon. Dans l’Espace, le ciel est spectaculaire durant les nuits orbitales!»

La conférence «Cosmology in the Alps» a réuni des spécialistes du domaine ainsi que des chercheuses et chercheurs en début de carrière. Elle avait pour but de favoriser les interactions dans trois domaines majeurs: les développements en radiocosmologie, la mise en avant de jeunes chercheuses et chercheurs du monde entier et la mise en valeur des contributions suisses au paysage mondial de la cosmologie. Quels sont les conseils de Claude Nicollier à celles et ceux qui débutent dans le domaine?

«Vivez avec passion car, de cette manière, votre vie entière sera heureuse. Le trésor de l’humanité est d’être capable de comprendre ce qui se passe et de le mettre sous forme mathématique. La beauté des lois de l’Univers est à couper le souffle. Les jeunes devraient continuer à faire ce travail, à le faire avancer, à le diffuser dans le monde entier afin d’amener les gens à mieux comprendre notre passé et notre avenir. C’est ce qui fait de nous des êtres humains.»


Auteur: Tanya Petersen

Source: People

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