Comment la génétique influence notre santé métabolique

© EPFL/iStock

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Des scientifiques de l’EPFL ont découvert les interactions gènes-environnement complexes qui influencent la santé métabolique chez les souris, et ont validé leurs résultats à l’aide de données humaines réelles.

Le syndrome métabolique, ou SMet, est un état de santé caractérisé par un ensemble de facteurs de risque: une hypertension artérielle, une hyperglycémie, un taux de cholestérol élevé et de la graisse abdominale. Ces facteurs augmentent le risque de développer une maladie cardiaque, un diabète de type 2 et d’autres problèmes de santé graves.

Des études précédentes ont montré que la génétique et le mode de vie sont les causes principales du SMet. Mais les études sur l’être humain ne sont pas parvenues à déterminer les causes génétiques exactes de la maladie et leurs interactions avec l’environnement - les différences de régime alimentaire et de mode de vie étant impossibles à contrôler.

Des scientifiques dirigés de Johan Auwerx, professeur au Laboratoire de physiologie intégrative et systémique de l’EPFL, se sont penchés sur ce problème en établissant un score de santé métabolique (SSM) basé sur des paramètres cliniques en utilisant un type de souris appelées «BXD» comme population de référence génétique. Ces souris sont génétiquement diverses, comme les êtres humains, ce qui en fait un modèle idéal pour étudier l’influence de la génétique sur la santé. Les scientifiques ont ainsi exploré les déterminants génétiques du SSM chez les souris et validé leurs résultats à l’aide de données humaines issues de la UK Biobank. L’étude est publiée dans la revue Cell Systems.

Les chercheuses et chercheurs ont alimenté 49 souches différentes de souris BXD soit avec un régime standard, soit avec un régime riche en graisses, de l’âge de 8 semaines jusqu’à 29 semaines. Ils ont ensuite mesuré cinq indicateurs de santé clés: le pourcentage de graisse corporelle, la glycémie à jeun, les triglycérides, le cholestérol total et les taux d’insuline à jeun. À partir de ces mesures, ils ont établi un score de santé métabolique (SSM) ; un score élevé indiquant une meilleure santé métabolique.

Puis, ils ont eu recours à des techniques avancées de cartographie génétique (cartographie des locus à caractère quantitatif) pour trouver les régions spécifiques de l’ADN des souris qui étaient associées au SSM. De plus, ils ont analysé l’expression des gènes du foie et les profils lipidiques du plasma afin de découvrir des signatures moléculaires associées au SSM. Enfin, ils ont examiné l’activité des gènes au niveau du foie des souris et analysé leur sang pour déterminer le fonctionnement de leur métabolisme au niveau moléculaire.

L’étude a également mis en évidence deux régions génétiques associées au SSM sur les chromosomes 7 et 8, liées à la santé métabolique en fonction de l’alimentation. Ces résultats ont été cohérents même lors de tests sur différents groupes de souris, renforçant l’influence génétique sur la santé métabolique. L’étude a mis en évidence deux gènes candidats, TNKS et MCPH1, qui étaient également associés à des caractéristiques métaboliques dans des ensembles de données humaines issus de la UK Biobank et d’autres cohortes.

Schéma résumant la méthodologie de recherche. Crédit: Li et al 2024. DOI: 10.1016/j.cels.2024.05.006
Schéma résumant la méthodologie de recherche. Crédit: Li et al 2024. DOI: 10.1016/j.cels.2024.05.006

Les chercheurs ont également découvert qu’une bonne santé métabolique est associée à une meilleure gestion du cholestérol et des acides gras, ainsi qu’à une activité moindre dans certaines réponses au stress cellulaire et dans les processus de stockage des graisses.

Plus précisément, une meilleure santé métabolique (un SSM plus élevé) est liée à un métabolisme du cholestérol et des acides gras plus faible, à une signalisation mTORC1 réduite (mTORC1 est un complexe protéique qui régule la croissance cellulaire et le métabolisme en réagissant aux nutriments et aux niveaux d’énergie), à une diminution de la réponse aux protéines dépliées (une réponse au stress cellulaire qui garantit que les protéines sont fonctionnelles et correctement pliées) et à l’adipogenèse (formation de cellules adipeuses) dans le foie.

Les résultats mettent en évidences des voies potentielles qui pourraient être ciblées pour des interventions thérapeutiques et soulignent l’importance de la génétique dans la santé métabolique. L’étude fournit un modèle solide pour l’étude des interactions gène-environnement, tandis que l’identification de TNKS et MCPH1 en tant que régulateurs clés offre de nouvelles possibilités pour la compréhension et l’atténuation potentielle des maladies métaboliques.

En transposant ces résultats de la souris à l’être humain, l’étude ouvre la voie à des approches personnalisées en matière de gestion et de prévention du SMet.

Financement

EPFL

Conseil Européen de la Recherche (CER)

Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNS)

Fondation nationale pour la recherche de Corée

Conseil des bourses chinois

Références

Xiaoxu Li, Jean-David Morel, Jonathan Sulc, Alessia De Masi, Amélia Lalou, Giorgia Benegiamo, Johanne Poisson, Yasmine Liu, Giacomo V.G. Von Alvensleben, Arwen W. Gao, Maroun Bou Sleiman, Johan Auwerx. Systems genetics of metabolic health in the BXD mouse genetic reference population. Cell Systems 11 juin 2024. DOI: 10.1016/j.cels.2024.05.006


Auteur: Nik Papageorgiou

Source: Santé mentale et bien-être

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