Bloom Biorenewables développe des plastiques à base de biomasse
Produire des bioplastiques, des textiles, des cosmétiques ou encore des parfums à base de biomasse : la technologie développée par la start-up Bloom Biorenewables représente une alternative aux dérivés du pétrole. La jeune entreprise fait un pas de plus vers l’industrialisation en levant 3,9 millions d’euros.
Plastiques, textiles, smartphones, meubles, arômes - comme la vanilline -, mais encore cosmétiques, détergents, médicaments… les dérivés du pétrole se cachent partout. « Tout le monde sait que la diffusion massive de carbone d’origine fossile dans l’atmosphère est un contributeur majeur au réchauffement climatique, mais la majorité des gens ne se rend pas compte à quel point nous en sommes dépendants et qu’il est urgent de mettre fin à toutes nos émissions », souligne Rémy Buser, CEO de Bloom Biorenewables, une spin-off de l’EPFL.
Mû par cette certitude et la ferme intention de contribuer à la réduction des émissions, il s’investit au quotidien avec son cofondateur, Florent Héroguel, et leurs collaborateurs afin d’amener rapidement sur le marché une technologie qui remplacera le pétrole. Il propose un carbone renouvelable, issu des laboratoires de l’EPFL, à base de biomasse pour notamment la fabrication de plastiques d’emballage, de parfums et de biocarburant marin. Les 3,9 millions d’euros levés récemment, représentent non seulement un important soutien financier, mais également une marque de reconnaissance de spécialistes internationaux dans le domaine. Le tour de financement a été piloté par Breakthrough Energy Ventures-Europe (BEV-E), un nouveau fonds européen orchestré par Bill Gates et dédié aux start-up « visionnaires, intrépides et alignées sur une stratégie globale de décarbonatation ».
Alors que des substituts au pétrole émergent comme carburant, aucune source rentable de carbone non fossile ne le remplace pour l’instant dans les matériaux. Pour en trouver une, deux possibilités s’offrent aux chercheurs : utiliser le carbone stocké dans le CO2 de l'atmosphère, où il est difficile à récupérer car très dilué, ou l’extraire de la biomasse. Actuellement, seule la cellulose, qui constitue environ 40% du poids total, est valorisée sous forme de fibres, pour du papier par exemple, ou raffinée en bioéthanol. Le reste est brûlé ou jeté. La technologie développée par Bloom Biorenewables permet d’extraire sans altération les autres composants de la biomasse que sont la lignine et l’hémicellulose. Ce qui ouvre un large potentiel d’applications et une utilisation totale de près 75 % de cette ressource.
Des bioplastiques pour remplacer le polypropylène
La lignine et l’hémicellulose sont des polymères contenus dans la paroi rigide entourant les cellules végétales. Ensemble, elles constituent environ 30-40% de la biomasse de la plante. La lignine à elle seule possède une densité énergétique supérieure de 30% à celle de la cellulose. Jusqu’à présent, la pierre d’achoppement pour leur utilisation restait la fâcheuse tendance de la lignine à se détériorer durant le traitement. En 2016, le Laboratoire des processus durables et catalytiques (LPDC) de l’EPFL a mis au point un processus de traitement qui comprend l’ajout d’un aldéhyde. « Cette famille de produits chimiques, dont la production peut être simple, verte et bon marché, stabilise la lignine et l’hémicellulose et les empêche de se dégrader », souligne Florent Héroguel, COO. Ces deux composants peuvent ainsi être obtenus de manière séparée et valorisés individuellement.
L’hémicellulose permet notamment de produire différents types de bioplastique, notamment du matériau d’emballage qui pourrait remplacer le polypropylène. « Le Plan d'action sur l'économie circulaire, une feuille de route de l’UE pour atteindre l’objectif de neutralité climatique à l’horizon 2050, vise justement à imposer des emballages et autres produits en plastiques durables et à renforcer la responsabilité des producteurs », note Rémy Buser. Les grandes entreprises, notamment alimentaires, commencent à s’y mettre. Mais les débouchés pour les matériaux à base de carbone durable sont aussi vastes que ceux de leurs prédécesseurs fossiles. La lignine peut aussi être utilisée comme matière première pour la production de parfums ou d’arômes grâce à ce qu’on appelle la « chimie verte », qui vise à éliminer l'usage de substances néfastes pour l'environnement.
Des produits durables et circulaires
« La technologie que nous développons permet de fabriquer des produits durables et circulaires », note Florent Héroguel. L’avantage de ce carbone « vert » est de s’insérer dans le cycle naturel qui se produit à la surface de la Terre et d’éviter le déséquilibre créé par l’extraction du carbone enfoui sous nos pieds depuis des dizaines de millions d’années, responsable en grande partie de l’effet de serre.
Les 3,9 millions d’euros levés permettront notamment à Bloom Biorenewables d’agrandir son équipe et de créer un centre de recherche et développement indépendant, basé à Renens. La start-up obtiendrait ainsi une capacité de production suffisante pour convaincre les industriels de se lancer dans l’utilisation de cette nouvelle matière première.