Blockchain: la première « mine » de diamants collaborative

Pascal Gallo, CEO de la start-up avec le logo du jeton qui servira de transaction sur la blockchain© 2018 Alain Herzog

Pascal Gallo, CEO de la start-up avec le logo du jeton qui servira de transaction sur la blockchain© 2018 Alain Herzog

Une spin-off de l’EPFL, LakeDiamond, spécialisée dans la fabrication et le traitement de diamants ultra-purs, ouvre aujourd’hui un tour de financement participatif lié à une blockchain (ICO). Un peu plus de deux millions de jetons virtuels, correspondant chacun à une heure-machine seront mis en vente prochainement.

En 2017, quelque 4,6 milliards de dollars ont été levés dans le monde par des start-up via l’émission de jetons virtuels échangeables contre des cryptomonnaies ou des services. La Suisse joue d’ailleurs un rôle de premier plan dans ce domaine : 850 millions de dollars ont été levés dans des projets liés à la blockchain l’année passée, d’après les chiffres de l’IFZ (Institut für Finanzdienstleistungen). Mais rares sont encore les entreprises industrielles à se lancer.

LakeDiamond, une spin-off de l’EPFL spécialisée dans la fabrication sur mesure de diamants d’une grande pureté, fait figure de pionnière. Elle va lancer un financement participatif grâce à la vente d’heures-machine sous forme de jetons virtuels (token). Plus de 2 millions de tokens seront émis, équivalent à un total de 60 millions de francs.. La somme nécessaire au passage à une production des diamants à grande échelle. Les acquéreurs pourront, une fois la vente terminée, les échanger contre des diamants ou les revendre. La première mine collaborative en ligne est née.

Plus le diamant est petit, plus il est cher

« Alors que dans le cas des pierres naturelles, le prix croît avec la taille, chez nous c’est l’inverse », souligne Pascal Gallo, CEO et fondateur de la start-up. La pureté des diamants fabriqués par cette jeune entreprise surpasse de loin les pierres naturelles. Le procédé de fabrication, soit le dépôt successif de couches d’atomes de carbone - unique composant du diamant - en phase vapeur, permet d’éliminer quasiment tous les indésirables. Les propriétés de dureté, de conductivité thermique et électrique, ainsi que les propriétés optiques du minéral sont ainsi exploitables de manière plus précise.

La taille au micron près et les traitements de haute technologie apportés ensuite sont sa valeur ajoutée. Ils sont en effet customisés grâce à une méthode développée en collaboration avec le laboratoire de Niels Quack à l’EPFL. Sculptés au micron près, ils pourront être sertis sur des systèmes mécaniques complexes tels tels des mouvements horlogers et être intégrés dans des lasers de forte puissance, des transistors ou des plateformes photoniques

L’immense majorité des sociétés qui se sont lancées jusqu’à présent dans un financement participatif appelé ICO (initial coin offering), sont actives dans le domaine de la blockchain. Leur motivation première est sa simplicité : il met en contact direct l’entreprise et les investisseurs, réduisant ainsi les procédures administratives et donc le temps investi. LakeDiamond y a vu également un gage d’indépendance. « Dans les divers processus de levées de fonds traditionnels que nous avons démarrés, note Pascal Gallo, les potentiels investisseurs avaient pour domaine de prédilection le militaire. Or nous ne souhaitons pas amener la société dans cette direction ».

Le contrat intelligent repose sur le blockchain Ethereum

L’ « utilisateur », comme le nomme l’entreprise, achète donc un certain nombre de jetons, dont le gage de sécurité repose sur un « contrat intelligent » (ou smart contract) lié à la blockchain Ethereum. Cette technologie de stockage et de transmission d’informations en chaîne fonctionne sans organe de contrôle externe. Son inviolabilité repose sur la mémoire et la transparence de toutes les transactions qui s’y déroulent. Un livre blanc « ou white paper », contient toutes les explications du projet, les clauses des transactions ainsi que le code qui permet de générer les jetons qui seront émis en contrepartie de crypto-monnaie, l’ether.

“Le projet est donc unique : nous connectons les réacteurs de croissance de diamants à la blockchain Ethereum et permettons aux détenteurs de tokens de produire leurs propres diamants”, explique Romain Braud, spécialiste blockchain de l’entreprise. Les tokens, ou TMT (Time-based Machine Token), représentant des heures d’utilisation des réacteurs, confèrent aussi un droit de priorité sur LakeDiamond pour “miner” les commandes de diamants pour ses clients industriels. Ainsi les détenteurs de tokens peuvent participer au développement du projet industriel en captant la valeur des commandes clients en échange de leurs tokens. Il est aussi possible de revendre ses tokens sur des marchés secondaires à l’instar des cryptomonnaies traditionnelles.

Destinée dans un premier temps aux investisseurs professionnels – appelés par l’entreprise « utilisateurs de jetons »-, l’ICO sera ouverte cet automne au grand public pour autant qu’elle obtienne l’autorisation de la Finma (Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers).

https://www.lakediamond.ch/tokensale