Avec l'EPFL, la Croatie lance un programme pour garder ses talents
Développé sur la base du savoir-faire de l’EPFL, un projet pilote offrira à quatre jeunes chercheurs croates d’excellence le statut de professeur tenure-track, ainsi qu'un million de francs pour mener un programme de recherche dans leur pays. Le lancement a lieu aujourd’hui à Zagreb.
Offrir des perspectives d’avenir et de carrière aux chercheurs les plus prometteurs. Tel est le but du programme pilote de promotion des tenure-tracks en Croatie. Officiellement lancé aujourd’hui à Zagreb, il est le fruit d’une collaboration entre l’EPFL, le Département du développement et de la coopération suisse (DDC), le Ministère pour la Science croate, la Fondation scientifique croate (CSF) et différentes institutions académiques de ce pays d’Europe de l’Est. Ce projet ambitieux, portant sur un montant de 4,7 millions de francs, vise à stimuler l’innovation et limiter la fuite des cerveaux à l’étranger.
Au terme d’un processus de sélection ouvert depuis le mois de mars, quatre jeunes scientifiques croates d’excellence seront désignés pour bénéficier d’un statut de professeur tenure-track. Chacun d’entre eux disposera d’un million de francs pour monter son laboratoire, engager une équipe et mener un programme de recherche, le tout sur quatre à cinq ans.
«Il s’agit non seulement d’encourager les talents résidant à l’étranger à rentrer en Croatie, mais surtout aussi à leur donner leur chance, des responsabilités et des perspectives d’avenir dans leur propre pays afin qu’ils n’aient plus forcément à le quitter pour faire une belle carrière», décrit Olivier Küttel, délégué du Président aux Affaires internationales à l’EPFL. Dans ce but, le programme prévoit de leur offrir un véritable package comprenant une équipe, du matériel, des locaux, un soutien administratif et, surtout, une totale liberté dans la gestion de ces ressources. Si, après 4 ans, l’expérience est concluante et l’excellence du chercheur confirmée, un poste permanent lui est alors assuré.
Suivi de près
Secrétaire d’état à la science et aux fonds européens au Ministère croate de la science et de l’éducation, Tome Antičić décrit l’importance de ce projet pour son pays: «La Croatie engendre de nombreux talents scientifiques. Nous nous devons de les retenir et de leur offrir les meilleures perspectives de carrière. En ce sens, le programme tenure-track proposé par l’EPFL, soutenu par la Suisse et mis en place par la Fondation scientifique croate est très prometteur. Nous en suivons le développement de très près, ce d’autant plus que le Ministère est en train de redéfinir notre système scientifique en l’ouvrant davantage à l’excellence internationale et que ce modèle pourrait donc servir de base à une initiative beaucoup plus large dans un proche avenir.»
L’idée est née il y a quatre ans. La Croatie venait d’entrer dans l’Union européenne. Le projet, alors plus ambitieux encore, avait été soumis à la Commission européenne pour l’obtention d’un financement par le biais du programme Horizon 2020. Or, subissant rapidement les conséquences de la votation du 9 février 2014, dite «Contre l'immigration de masse», il avait dû être passablement repensé et redimensionné. C’est finalement dans le cadre du milliard de cohésion versé par la Suisse aux pays d'Europe de l’Est à titre de contribution à l’UE qu’il trouvera les ressources nécessaires. Le gouvernement croate participe également au financement du projet à hauteur de 15%, en plus de fournir les infrastructures scientifiques adéquates.
Testé avec succès
De son côté, la direction de l’EPFL a vu dans ce programme l’opportunité de transmettre et de mettre en valeur un savoir-faire qui lui est bien spécifique et a été largement reconnu. L’École est en effet l’une des seules en Europe à appliquer le système des tenure-tracks en son sein, ceci avec succès depuis l'année 2000. Ils sont à ce jour 171 à avoir profité de ce statut à l’EPFL, dont bon nombre ont ensuite obtenu une bourse ERC starting – la plus prestigieuse des bourses décernées aux jeunes chercheurs par le Conseil européen de la recherche.
Participant activement et depuis le début au design du programme, les experts de l’EPFL sont également fortement impliqués dans le processus d’évaluation des candidats. Le choix définitif sera rendu public en automne.
«Cette initiative veut non seulement attirer et retenir les meilleurs scientifiques, mais aussi, en visant plus loin encore, générer un effet de multiplication, explique Olivier Küttel. Ces jeunes talents vont certainement en appeler d’autres, créer des emplois et des start-up, et ainsi avoir un impact économique positif et non négligeable en Croatie. C’est un projet pilote qui, dans ce sens, pourrait bien être rapidement étendu à d’autres pays européens.»