«Avec l'enseignement le feedback est immédiat»

Rüdiger Fahlenbrach souhaite que toujours plus d’étudiantes et étudiants de l’EPFL deviennent des entrepreneurs. © Alain Herzog/ 2019 EPFL

Rüdiger Fahlenbrach souhaite que toujours plus d’étudiantes et étudiants de l’EPFL deviennent des entrepreneurs. © Alain Herzog/ 2019 EPFL

Engagé en 2009 à l’EPFL, Rüdiger Fahlenbrach est cette année le lauréat du prix de meilleur enseignant de la section d’ingénierie financière.

Il suffit d’interagir quelques minutes avec Rüdiger Fahlenbrach pour déceler son enthousiasme pour son domaine de prédilection. Ses yeux pétillent lorsqu’il évoque l’univers de la finance, ses règles du jeu, ses dangers, ses acteurs ou encore le poids de leurs décisions. Comment est né cet attrait ? Ce fils de médecins n’arrive pas à le dire avec précision mais depuis le début de ses études à l’ESSEC Business School en France, il ne l’a plus quitté. Et c’est avec verve que le professeur associé à l’Institut suisse de finance à l’EPFL parle de sa matière. Il n’est donc pas surprenant qu’il remporte pour la deuxième fois le titre de meilleur enseignant de la section d’ingénierie financière.

Selon Julien Hugonnier, directeur de cette section, avant d’arriver à l’EPFL, Rüdiger Fahlenbrach était d’ailleurs un des enseignants star du Master en administration des affaires du Fisher College of Business de l’Université d’Etat de l’Ohio. Et les propos dithyrambiques des étudiantes et étudiants à son égard ainsi que l’affluence à ses cours prouvent la qualité de son enseignement. Mais le Docteur en finance de l’Université de Pennsylvanie ne se laisse pas pour autant aller à la forfanterie, préférant cultiver l’humilité et continuer à soigner ses cours. «Lorsque vous faites de la recherche, il peut facilement s’écouler deux ans entre le début de votre travail et la publication. Avec l’enseignement, le feedback est immédiat.»

Favoriser la prise de parole en public

D’origine allemande, Rüdiger Fahlenbrach a posé ses valises en Suisse en 2009, après dix ans passés aux Etats-Unis. Le chercheur spécialisé dans la gouvernance d’entreprise et l’entrepreneuriat souhaitait revenir en Europe, l’EPFL lui a ouvert ses portes. Cultivant l’enseignement à l’américaine, il privilégie l’interaction, encourage les étudiants à s’exprimer, à défendre leurs idées et à ne pas craindre l’échec qui permet d’avancer. Des principes qu’il applique aussi bien dans ses deux cours de Master, que dans le cours de doctorat qu’il co-enseigne avec un collègue de l’Université de Lausanne.

Aux étudiants de première année Master en ingénierie financière, il présente le fonctionnement des marchés financiers, les différents modèles de décisions ou le management des risques. «C’est un challenge, car ce sont des ingénieurs et c’est souvent leur premier cours lié à la finance.»

Le professeur commence toujours le cours en reliant des faits d’actualité à des concepts théoriques étudiés. Ensuite, pour permettre aux étudiants d’appliquer ces même concepts et d’appréhender les contraintes du «monde réel», il leur demande de travailler en groupe sur des problèmes d’entreprises concrets. Par exemple, est-ce que le club de football Tottenham Hotspur doit construire un nouveau stade ? Acquérir un nouveau joueur ? Les deux ? «Les étudiants voient ainsi comment prendre une décision financière qu’ils doivent ensuite présenter et défendre devant la classe, cela leur donne un avant-goût de leur future vie professionnelle, car en finance il n’y a jamais une bonne réponse. Les entraîner à s’exprimer public est important, et ils n’ont que peu d’occasions de le faire dans leur cursus à l’EPFL.»

Aborder l’éthique

Soucieux de former des experts en finance responsables, le chercheur qui a beaucoup travaillé sur les causes et conséquences de la crise financière de 2008, dédie aussi une partie de son cours à l’éthique. Il demande par exemple aux étudiants de se mettre à la place d’un trader junior qui doit envoyer à un client un fax contenant des informations inexactes. Une manière d’aborder les différences entre légalité, éthique d’entreprise, éthique personnelle et de démontrer les difficultés de définir un comportement éthique. Des questions qu’il aborde également dans son second cours Master dédié au capital-risque. Ceci en réponse à la volonté des étudiants d’en savoir plus sur l’investissement d’impact. Soit un investissement qui génère un revenu financier tout en ayant un retour social et environnemental positif et mesurable.

Ce cours facultatif sur l’industrie du capital-risque destiné avant tout aux étudiants Master en ingénierie financière est d’ailleurs de plus en plus prisé par des étudiants d’autres sections. L’expert en finance s’en réjouit, car il estime important d’instiller de manière plus large un esprit d’entrepreneuriat. «L’objectif est de présenter les différents aspects de l’industrie du capital-risque afin que les étudiants soient par la suite mieux à même de négocier en tant qu’entrepreneurs. Nous analysons notamment des term sheets (document qui régit les termes de l’investissement).»

Ayant à cœur de favoriser l’innovation, le chercheur fait aussi partie du comité Innogrant, qui apporte un soutien financier à des personnes désirant développer un projet novateur. Son souhait ? Que les start-up continuent à fleurir en Suisse et que toujours plus d’étudiantes et étudiants de l’EPFL deviennent des entrepreneurs.