60 jours autour du Groenland pour mesurer l'urgence climatique

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En été 2019, la GreenLAnd Circumnavigation Expedition (GLACE) se lancera dans un tour complet de l’île. Organisé par le Swiss Polar Institute, ce périple a pour but de collecter des données sur les effets du réchauffement tant sur terre que dans l’air et dans les océans. Un appel à projets a été lancé auprès de la communauté scientifique.

Cet été, les glaces permanentes de l’Arctique ont commencé à se rompre. C’est dans cette actualité inédite et particulièrement inquiétante que s’inscrit l’annonce d’un nouveau projet d’envergure coordonné par le Swiss Polar Institute (SPI) basé à l’EPFL: une grande expédition scientifique autour du Groenland. Nommée GreenLAnd Circumnavigation Expedition (GLACE), cette aventure a pour but de récolter un maximum de données sur la fonte de la calotte glaciaire qui recouvre cette île, les interactions entre celle-ci et les océans alentours et, plus généralement sur les effets du changement climatique dans cette partie du monde. Elle se déroulera sur une soixantaine de jours entre la fin juillet et la fin septembre 2019. Un appel à projets a été lancé. Experts en recherche polaire, à vos stylos, vous avez jusqu’au 10 septembre!

Soutenue par des grants du Dr.Frederik Paulsen, cette expédition est la deuxième du genre. Entre décembre 2016 et mars 2017, l’Antarctic Circumnavigation Expedition (ACE) avait fait le tour du continent antarctique, emmenant quelque 150 scientifiques impliqués dans vingt-deux programmes de recherche.

Avec cette fois dix projets scientifiques à bord, GLACE n’est pas moins ambitieuse. Touchant des disciplines aussi variées que la climatologie, l’océanographie, la biologie marine, la microbiologie, l’hydrologie, la chimie et bien d’autres encore, l’expédition permettra de récolter des échantillons aussi bien atmosphériques qu’océaniques et terrestres. Comme pour ACE, l’idée est de créer des synergies entre les différentes recherches et d’obtenir ainsi une vision holistique des problématiques environnementales en jeu aux pôles, des régions essentielles à la régulation du climat et particulièrement touchée par les changements en cours.

C’est le même bateau que pour ACE, l’Akademik Treshnikov, navire scientifique russe, qui embarquera les participants de GLACE. Il sera toutefois adapté et doté de nouveaux équipements. Surtout, il sera accompagné sur certaines portions du parcours d’un second vaisseau russe, le 50 Let Pobedy, qui est le plus grand brise-glace atomique du monde.

Une grande première

«Même si elles commencent à se briser, les glaces du Nord du Groenland restent parmi les plus épaisses de tout l’Arctique, explique Danièle Rod, directrice exécutive du SPI. Poussées par les vents du Nord, elles s’accumulent et s’empilent contre les côtes. Le Treshnikov seul ne peut pas passer dans ces zones. Le fait de prendre ce chemin difficile, au plus près du littoral, fait d’ailleurs de cette expédition une grande première.»

Le périple comptabilisera près de 13'500 km. Il se fera en deux étapes principales. La première se concentrera sur la partie sud du Groenland (SG). Partant de Reykjavik, en Islande, elle se terminera à Ilulisat, une ville de près de 5'000 habitants située sur la côte ouest. Entre ces deux ports, trois haltes sont prévues à ce jour dans des fjords (SG1:Kangerlussuaq et SG2: Helheim), ainsi qu’au passage du Prince Christian, le point le plus au Sud de l’île (SG3). Ils ont été choisis principalement pour la présence de lacs ou de langues de glaciers ayant une influence importante sur les eaux de l’océan Atlantique, pour accéder à des montagnes comptant parmi les plus hautes du Groenland et y prélever des carottes de glace ancienne, ou encore pour l’importance de la biodiversité qui s’y trouve.

A 700 km du pôle

La deuxième étape rejoindra Reykjavik par le Nord (NG) et par le détroit de Nares - passage entre le Groenland et l'île la plus septentrionale du Canada. Pour cette étape, quatre sites significatifs ont été identifiés, l’un d’eux étant une option supplémentaire en cas d’impossibilité à débarquer sur l’un des trois autres ou de conditions de glace exceptionnelles.

Deux de ces emplacements sont des airs de déversement des eaux de fonte d’importants glaciers (NG1:Ryder et Ostenfeld et NG4: Zachariae). Pour la première fois, les scientifiques pourront en étudier l’impact sur les milieux marins de façon détaillée. Un autre de ces sites est le Fjord de l’Indépendence: long de 200 km et large de 30, il représente un écosystème en soi (NG3). Enfin, un de ces arrêts aura lieu au point le plus au Nord du Groenland, le Cap Morris Jesup, situé à 700 km du pôle (NG2). L’un des intérêts de ce site sera de comparer les échantillons qui y seront prélevés avec ceux pris à l’extrême Sud de l’île.

Contact: Danièle Rod, directrice exécutive du Swiss Polar Institute, [email protected] +41 21 693 76 29.

Photo: l'Akademik Treshnikov. (c)Arctic and Antarctic Research Institute (AARI)
Carte: (c)Swiss Polar Institute (SPI)