52e Biennale d'art de Venise 2007

76 participations nationales et plus d'une centaine d'artistes, ainsi qu'une foultitude d'expositions et d'événements collatéraux de qualité font de Venise le rendez-vous estival incontournable des amateurs d'art. Puisque vous faites certainement partie des 50% de Suisses qui s'intéressent à l'art, il vous reste jusqu'au 21 novembre pour vous plonger dans un bain culturel qui aiguisera vos esprits et réveillera vos sens, selon le thème de cette année.
Penser avec les sens, sentir avec l'esprit

Pour cette 52e édition, Davide Croff, son président, rapproche la manifestation du monde des galeries et des tendances actuelles, telles que vues à Art Basel. On assiste à un début de fusion entre marché et recherche artistique, au détriment peut-être d'une folie et d'une explosion, d'un joyeux n'importe quoi et d'une anarchie créatrice inexportable qui faisaient tout le charme des éditions précédentes. La Biennale 2007 s'ouvre également de manière plus large à des contributions mondiales, faisant éclater l'axe traditionnel Europe-Amérique. En témoignent les pavillons des pays ex-soviétiques, désormais solidement ancrés dans la ville, une ouverture à l'Afrique (encore modeste hélas), le Lion d'Or attribué au photographe malien Malick Sibidé et des œuvres de Chine clôturant le parcours. Ces éléments s'ajoutent aux traditionnels lieux d'expositions, les Giardini, parc qui rassemble les pavillons nationaux et l'ancienne fabrique de cordes des chantiers navals de la ville (Arsenale).

Des grands noms de l'art contemporain trouvent leur place dans le pavillon principal, alors qu'un magnifique espace est dédié à Giuseppe Penone pour sa 'sculpture de lymphe', un travail sur la croissance des éléments naturels et leur rapport avec les gestes humains, des arbres dépouillés cerceau par cerceau jusqu'à atteindre leur cœur.

La tendance qui sourd de cette édition est celle de la sphère intime, des réflexions tournant autour du corps humain, de son rapport fragile, mystérieux et délicat au monde, de sa matérialité fantasmée (car cachée par la peau), des mutations rêvées qu'on pourrait lui faire subir. Plusieurs travaux semblent des versions contemporaines des Vanités, ces tableaux figurant crânes et ossements symbolisant la fragilité de la vie terrestre. L'artiste sud-coréen H. Lee synthétise parfaitement ces deux visions en présentant à la fois une étrange combinaison spatiale destinée à élargir des parties de son corps et les squelettes reconstitués des personnages de dessin animé (Tom poursuivant Jerry).

Mais certains artistes préfèrent utiliser leur talent pour dénoncer des conditions sociales et des situations politiques qu'ils jugent insupportables. Et ceci est le deuxième aspect important de cette exposition. Beaucoup d'œuvres font référence à la guerre: des visages de soldats US morts en Irak composent une mosaïque du territoire américain et une agence de voyages fictive vous organise un voyage touristique à Bagdad, billet d'avion et dépliant informatif compris. Dans une vidéo, P. Canevari filme un jeune garçon qui joue au football avec une tête de mort dans une banlieue bombardée de Belgrade.

Plus de globalisation, une volonté de tisser des liens avec le marché florissant de l'art, un dialogue sur l'intimité flattant l'ego du spectateur, tout ceci cautionné par quelques œuvres politiques servant de bonne conscience à l'ensemble: décidemment, cette Biennale est le miroir parfait de notre société.