Une vitrine technologique redonne vie aux manuscrits

Les éléments complémentaires viennent se surimposer au manuscrit original. © Alain Herzog

Les éléments complémentaires viennent se surimposer au manuscrit original. © Alain Herzog

L’EPFL a développé des «vitrines holographiques» dans le cadre de ses réflexions sur la muséographie du futur. Elles sont présentées en avant-première lors de l’exposition Le lecteur à l’œuvre, du 27 avril au 25 août à la fondation Martin Bodmer (Cologny /GE).

Approchez-vous de la vitrine. Observez attentivement les magnifiques enluminures qui ornent ce manuscrit du 12e siècle, protégé dans sa cage de verre. Soudain, comme par magie, les marges s’animent; vous plongez dans de minuscules annotations, à peine visibles à l'œil nu tandis que de nouveaux éléments d’information semblent sortir de la page, s’écartent du texte, lui ajoutant une dimension. Vous découvrez une nouvelle ère de l’expérience muséale, qui ajoute à l’émotion de la contemplation d'un objet réel la richesse d’un contenu déclinable à l’infini.

Les premiers exemplaires de ces «vitrines holographiques» développées à l’EPFL en partenariat avec la société Kenzan sont présentées à Cologny (GE) du 27 avril au 25 août dans le cadre de l’exposition Le lecteur à l’œuvre, à la fondation Martin Bodmer. «Nous essayons d’inventer un nouveau langage muséographique qui allie l’expérience directe de l’œuvre et son explication dans un seul espace, précise Frédéric Kaplan, professeur d’humanités digitales à l’EPFL. Les vitrines incluent une caméra 3D qui nous permet d’analyser précisemment le comportement de chaque visiteur et nous renseigne sur ses réactions face à l’évolution du contenu de la vitrine. Nous publierons les résultats une fois l’exposition terminée.»

Des films «auto-générés»
L’implication de l’EPFL dans Le lecteur à l’œuvre, et l’apport de technologies innovantes dans la présentation d’œuvres anciennes, apporte une nouvelle dimension dans l’expérience de la lecture – ce processus que la fondation Bodmer explore, précisément, tout au long de cette exposition. En parallèle des vitrines holographiques, le Laboratoire d’humanités digitales a également développé une application informatique capable de générer automatiquement un film documentaire sur la base de quelques reproductions de pages et de textes explicatifs. «Il suffit de rédiger un commentaire, par exemple sur l’histoire d’un manuscrit, et de lui associer l’image de certaines pages pour que le logiciel crée de lui-même une séquence vidéo, automatiquement divisée en chapitres, au sein de laquelle la navigation est particulièrement intuitive sur une tablette», explique Frédéric Kaplan.

Le texte du documentaire est lu par une voix synthétique. «De cette manière, chaque vidéo peut être immédiatement adaptée et mise à jour, par exemple pour lui ajouter de nouvelles informations.» Grâce à cette voix de synthèse, au ton certes encore un peu monocorde, c’est ni plus ni moins que l’irruption d’une interactivité «à la Wikipedia» sur un média, la vidéo, qui jusqu’à aujourd’hui était par définition figée en raison des contraintes liées à la réalisation des séquences.

Là encore, le public de l’exposition présentée à la Cologny aura le privilège de tester en primeur ces documentaires d’un genre nouveau, grâce à des tablettes mises à leur disposition. «Ce ne sont là que deux pistes parmi toutes celles que nous explorons dans notre quête de nouvelles expériences muséographiques», conclut Frédéric Kaplan, évoquant le projet Venice Time Machine et le futur pavillon culturel et artistique dont la construction va bientôt démarrer sur le campus de l’EPFL.