Vers une transition durable des quartiers résidentiels périurbains ?

Assens © Olivier Wavre / LAST / EPFL

Assens © Olivier Wavre / LAST / EPFL

La défense publique de la thèse de doctorat présentée par Judith Drouilles a eu lieu le 27 août dernier à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL). Réalisé sous la supervision du Prof. Emmanuel Rey au sein du Laboratoire d’architecture et technologies durables (LAST), ce travail de recherche porte sur le potentiel de transition vers la durabilité des quartiers périurbains de maisons individuelles à l’horizon 2050.

Depuis la révolution industrielle, les espaces urbains ont connu une profonde réorganisation en parallèle d’une transformation de la société et des modes de vie. L’étalement urbain s’est généralisé en Suisse, comme dans d’innombrables pays en raison d’innovations continues en matière de transport, d’une croissance démographique exponentielle, de conditions de spéculation foncière et du désir répandu d’habiter en maison individuelle. Ce processus a engendré une dispersion de la ville dans les espaces ruraux qui soulève aujourd’hui de nombreuses questions vis-à-vis de la durabilité. En réponse aux conséquences négatives de l’étalement urbain, le modèle de la ville compacte polycentrique s’est établi comme référence pour l’expression de politiques ambitieuses d’aménagement du territoire. Le contexte, très favorable aux processus de densification vers l’intérieur des secteurs bien desservis par les transports publics, modifie la perception des quartiers de maisons individuelles en leur fournissant un statut de réserve inexploitée. Un nombre croissant de projets investit ce champ de recherche émergent face aux enjeux de sous-occupation des logements, de précarité énergétique ou de production de nouvelles surfaces résidentielles. Cependant certains quartiers, implantés dans les espaces périurbains profitant d’une desserte relative en transports publics, se placent pour leur part à la marge des questionnements actuels. Les approches proactives sont encore rares pour apporter des réponses aux défis rencontrés dans ces secteurs résidentiels existants.

Cette thèse de doctorat développe un support à la décision pour envisager l’avenir des quartiers résidentiels périurbains et leur participation à la transition vers la durabilité. Le travail s’inscrit dans les contextes européen et helvétique, et interroge le potentiel de transformation des quartiers à l’horizon 2050. L’approche se décline en quatre phases, dont la première consiste à élaborer une typologie de quartiers périurbains de maisons individuelles. Celle-ci résulte d’une méthode de réduction successive des échelles d’analyse, depuis la définition théorique de communes résidentielles périurbaines jusqu’au recensement de quartiers représentatifs dans l’agglomération de Lausanne. La conception de scénarios prospectifs de transformation relève de la deuxième phase de la recherche. Les cinq scénarios – Caducité, Exclusivité, Opportunité, Urbanité et Mutualité – découlent de tendances à la stagnation ou à la transition des secteurs périphériques, identifiées lors d’entretiens réalisés auprès d’une vingtaine d’experts. La troisième phase consiste en l’application des scénarios à six quartiers existants selon un horizon temporel de 35 ans. La thèse n’a pas comme seul objectif de mener un travail prospectif appliqué à des cas concrets, en proposant une vision aboutie à moyen/long terme. Son caractère innovant réside également dans la mise en place d’un outil expérimental de Building Information Modelling (BIM) à l’échelle du quartier pour composer avec la complexité liée aux contraintes de propriété individuelle. En considérant des hypothèses de calibration démographique et temporelle des projets, la quatrième phase, de comparaison multicritère des projets, est enrichie d’une analyse dynamique des évolutions.

Cette évaluation, développée à l’aune des enjeux de durabilité, met en évidence qu’un important potentiel d’amélioration des quartiers périurbains de maisons individuelles existe néanmoins, de par la performance des assainissements énergétiques des bâtiments et la préservation du cadre de vie qualitatif permis par les conditions actuelles de végétalisation et de faible densité. L’acheminement vers des futurs plus durables dépend également d’une coordination des décisions à l’échelle des quartiers afin d’aller au-delà de propositions résultant de la seule juxtaposition des intérêts individuels.

Cette thèse de doctorat a été réalisée dans le cadre du projet de recherche LIVING PERIPHERIES avec le soutien du Fonds national de la recherche scientifique (FNS).