Une roue pour tester un moteur linéaire

Série d’été – Projet de master (10). Jérémie Pochon a construit un banc de test pour mettre à l’épreuve le type de moteur qui pourrait propulser l’hyperloop.

Hyperloop incarne le rêve d’un transport rapide, économe, propre, efficace. Mais avant de confiner des passagers dans une capsule et de la propulser dans un tube sous vide à très haute vitesse, quelques étapes sont encore nécessaires… Modéliser, simuler, tester, valider. D’abord à une échelle réduite. Voilà l’option choisie par le Laboratoire de systèmes électriques distribués (DESL) de l’EPFL pour faire avancer la recherche dans ce domaine.

Deux doctorats sont en cours au DESL en lien avec l’hyperloop dont un directement lié au moteur à induction linéaire, un des éléments clé du concept. Schématiquement, un moteur à induction ce sont des bobines avec du courant qui circule à l’intérieur. Un moteur linéaire permet de déplacer un véhicule et pourrait même, grâce au champ magnétique, mettre le véhicule en lévitation. « Un moteur à induction linéaire n’a qu’une envie c’est de se déplacer, confirme Jérémie Pochon, étudiant en master en énergie. Du coup, il est extrêmement compliqué à tester. » Or sans test, pas de validation.

Faire bouger le rail plutôt que le moteur

Comment dès lors mesurer les caractéristiques de cet indomptable ? Une option est de construire des sections de tubes sur des dizaines de kilomètres pour y propulser le moteur linéaire sur un rail. Ou d’utiliser le mini-hyperloop construit à cet effet sur le campus lausannois. « Le problème est que pour tester le moteur il faut l’élément complet avec la structure, les batteries, les connexions, etc. », corrige Jérémie Pochon. Il a donc inversé la problématique : il maintient le moteur et les éléments de mesures statiques tandis que c’est le rail qui défile, monté sur une roue.

Pour son projet de master, Jérémie a donc construit une roue géante en aluminium, de 1,40 mètre de diamètre, équipée de rayons et d’un rail de 2mm à la place de la jante. Elle est encagée dans une structure rectangulaire de 1,9 mètre de haut. « Nous avons vérifié en simulation que la courbure du rail n’avait pas d’impact sur la validité des tests et comme tous les éléments hormis le rail sont statiques, on peut facilement enchainer les tests », précise l’étudiant.

Solidement arrimé à un socle, le moteur à induction se referme telle une mâchoire sur les deux côtés du rail sans toutefois le toucher, en gardant une distance de 2mm. Entre le support et le moteur, des senseurs permettent de mesurer les forces qui sont générées. Le rail rotatif permettra de tester ce modèle de moteur en deux parties. Mais le banc de test pourra aussi expérimenter les capacités de lévitation d’un moteur à induction. Ce dernier ne sera alors qu’à l’intérieur du rail et, pour éviter que le champ magnétique ne se perde, le rail sera doublé d’une couche de fer. Deux tests sont prévus : le premier à vitesse constante afin de caractériser le moteur et comprendre ses qualités. Le second test vise à mesurer son fonctionnement en imposant différentes contraintes sur la roue à l’aide d’un second moteur. Il s’agit par exemple de lui appliquer une force contraire pour modéliser une inertie spécifique lors d’un essai d’accélération.

Une étape pour aller plus loin

« L’objectif est que la roue tourne à une vitesse correspondant à un déplacement du rail d’environ 400km/h. Mais cela n’a aucun lien avec les vitesses que l’on pourrait atteindre avec l’hyperloop. Ici notre but est uniquement de caractériser le moteur en travaillant à une échelle réduite. On veut s’assurer que nos modèles sont corrects. Une fois validé sur modèle réduit, on pourra avancer à une échelle réelle. »

Le projet de master consistait à concevoir, construire et assembler le banc de test, mais il aurait été frustrant de s’arrêter en si bon chemin. Une fois son master en poche, Jérémie Pochon poursuivra encore quelques mois sa collaboration avec le DESL afin de « régler les problèmes que j’ai laissés derrière moi et, surtout, faire les mesures que l’installation rend possibles », dit-il non sans fierté.


Auteur: Anne-Muriel Brouet

Source: TRACE - Centre de transport

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