Une palette d'experts pour réduire les flambées de grippe

Tamar Kohn, professeure associée, et Athanasios Nenes, professeur ordinaire. © Alain Herzog / EPFL 2020

Tamar Kohn, professeure associée, et Athanasios Nenes, professeur ordinaire. © Alain Herzog / EPFL 2020

De Lausanne à Zurich, des experts en virologie, médecine, chimie environnementale et études atmosphériques vont réunir leurs compétences pour mieux comprendre le rôle de l’humidité et de la température dans la transmission du virus de la grippe par l’air.

Malgré sa récurrence annuelle et les coûts sur la santé qu’elle génère au niveau mondial, la grippe saisonnière comporte encore des parts d’ombre, notamment sur ses mécanismes de transmission entre individus. Outre le contact direct avec une personne infectée, la transmission par de minuscules gouttelettes produites par la respiration y jouerait un rôle clé.

Les scientifiques suspectent que l’importance de cette voie de transmission dépend des conditions environnementales rencontrées une fois les gouttelettes d'aérosol expirées. Mais on ne sait pas exactement de quelle manière et en quoi les conditions environnementales sont importantes. C’est précisément cette énigme que compte résoudre une équipe de douze chercheurs basés en Suisse qui viennent de recevoir une bourse Sinergia du Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNS). Leur projet démarrera en avril 2020, pour une durée de quatre ans.

Dans une approche interdisciplinaire et collaborative, ces chercheurs en virologie, médecine, chimie environnementale et études atmosphériques, issus de l’EPFL, l’Université de Zurich et l’ETH de Zurich, visent à identifier comment les conditions atmosphériques influencent les gouttelettes d'aérosols expiratoires et comment celles-ci stabilisent ou déstabilisent à leur tour les particules de virus de la grippe. Par exemple, peut-on augmenter ou diminuer la température et l'humidité d'une pièce pour réduire les risques d'infections grippales? Et quels sont les mécanismes actifs qui mènent aux réactions observées?

Pour répondre à ces questions, l'équipe utilisera une combinaison unique d'expertises en science des aérosols et en virologie. Les applications de leurs résultats pourraient être d'une grande importance pour la protection de la santé publique - en particulier en ce qui concerne les populations vulnérables comme les jeunes enfants et les personnes âgées.

Recherche interdisciplinaire
Le projet est dirigé par Tamar Kohn, professeure associée et directrice du Laboratoire de chimie environnementale (LCE) de l'EPFL. Ses travaux se chargeront de définir la vitesse à laquelle le virus est inactivé dans l'atmosphère lorsqu'il est soumis à différentes conditions environnementales. Son collègue, Athanasios Nenes, professeur ordinaire et directeur du Laboratoire des processus atmosphériques et impacts (LAPI), construira une chambre climatique pour exposer les gouttelettes contenant le virus à une large gamme de conditions environnementales. 

A l'Université de Zurich, la professeure associée Silke Stertz sera responsable de la partie virologique du projet, en analysant de près par quels mécanismes différentes souches de virus de la grippe sont inactivées. De l'ETH Zurich, le scientifique Ulrich Krieger et le professeur ordinaire Thomas Peter fourniront une caractérisation physico-chimique approfondie de ces gouttelettes d'aérosol et étudieront comment les virus sont distribués dans les gouttelettes d'aérosol expiratoires. Enfin, le Dr Walter Hugentobler, médecin généraliste, fera profiter l'équipe de son expertise médicale sur le virus de la grippe. 

Un milliard d'infections par an

La grippe saisonnière est responsable d'un milliard d'infections et de 650’000 décès par an dans le monde, selon l'Organisation mondiale de la santé, citant une étude de 2017. En Suisse, le virus est responsable chaque année de 112’000 à 275’000 consultations médicales, selon l'Office fédéral de la santé publique, avec un pic, bien entendu, pendant l'hiver. Cette nouvelle étude vise également à mieux comprendre ce phénomène saisonnier afin de réduire son impact et de soutenir la politique de santé du pays.

Références

Infectivité des virus de la grippe dans les aérosols expiratoires à température et humidité ambiantes (IVEA), bourse Sinergia, Fonds national suisse de la recherche scientifique  (FNS), 2020-2024.