Un «moule à gaufres» pour améliorer les cellules Grätzel
Un processus mis au point à l’Université Stanford sur la base des travaux de Michael Grätzel à l’EPFL permet d’augmenter l’efficacité des cellules solaires à colorant. A terme, cette méthode permettra d’en diminuer les coûts de fabrication.
Ils veulent traquer les rayons du soleil jusqu’au dernier. Pour faire face à une demande d’énergie électrique en croissance continue tandis que les ressources fossiles s’épuisent peu à peu, les chercheurs s’activent pour tirer le meilleur parti de la source la plus généreuse – notre soleil, dont chaque seconde de rayonnement fournit à la Terre autant d’énergie que les humains en consomment sous forme d’électricité en quinze mois.
Aujourd’hui, le marché des panneaux solaires décolle enfin. Mais pas si vite que ça. En cause, bien sûr, l’investissement important que représentent des capteurs, et le fait que le prix du courant qu’ils peuvent fournir dépasse encore d’un bon bout celui de l’électricité d’origine fossile ou nucléaire. D’où la nécessité de s’atteler à la recherche de technologies moins coûteuses que les panneaux de silicium qui composent l’immense majorité du marché.
Les travaux de Michael Grätzel, professeur à l’EPFL, ont ainsi ouvert la porte, il y a 20 ans déjà, à un procédé totalement innovant, qui imite le principe à l’œuvre dans la photosynthèse des plantes. L’idée de base est de faire interagir une solution contenant des pigments avec deux électrodes. Sous l’effet de la lumière se produit un échange d’électrons qui permet d’alimenter un réseau électrique.
Deux obstacles freinent toutefois la progression de cette technologie prometteuse: le rendement encore faible de ces capteurs – seuls 8% de l’énergie solaire peuvent être récupérés avec des cellules Grätzel à électrolyte solide, contre près de 40% en laboratoire pour les modules au silicium de dernière génération – et leur durée de vie limitée, les pigments se dégradant sous l’effet du rayonnement solaire pour devenir inopérants au bout de 7 ans.
A Stanford, en Californie, une équipe menée par Mike McGehee vient de présenter dans la revue Advanced Energy Materials les résultats d’une recherche qu’elle a menée en partenariat avec le groupe de Michael Grätzel. Son objectif: améliorer le rendement des cellules par un moyen suffisamment «simple» à appliquer pour que leur coût ne s’en trouve pas décuplé.
Pour y parvenir, les chercheurs misent sur la «plasmonique», ou art de tirer parti des «vagues» électroniques qui se produisent quand un métal et la lumière interagissent. Ils ont conçu un «moule à gaufres» garni de demi-sphères de silicium aux dimensions nanoscopiques – chaque millimètre carré en comporte plus de dix millions! Ils pressent ensuite ce moule contre une fine couche d’oxyde de titane et de pigments photosensibles, couche qui se verra elle-même recouverte d’un vernis d’argent faisant office d’électrode. Par transparence, à l’intérieur de la couche de titane coloré, la lumière qui pénètre dans la cellule rencontre les «dômes» argentés qui se sont formés dans les petits trous. Ce qui a pour effet de la renvoyer une nouvelle fois à travers le matériau photosensible, où elle rencontrera davantage de pigments. En outre, ces dômes heurtés par les photons peuvent être à la source de ces fameuses «vagues plasmoniques», dont l’énergie peut elle aussi être récupérée.
(Sur cette illustration, les rayons lumineux viennent du bas. Ceux qui traversent la couche photosensible y sont renvoyés par réflexion sur les nanodômes d'argent (à g.) ou créent des ondes plasmoniques (à dr.). Source: I-Kang Ding / Stanford)
En optimisant ainsi la quantité de lumière utilisée par le capteur, l’équipe de Mike McGehee espère pouvoir atteindre un rendement de 15% dans ce type de cellules. Et réfléchit aussi à des solutions pour porter à 10 ans leur durée de vie. Ces progrès aidant, «nous pensons que nous pourrons faire baisser le prix des cellules à moins de 0,5 dollar par watt», affirme Mike McGehee. Un coût inférieur à celui qu’annonce l’industrie aujourd’hui (on s’approche des 0,7 dollars par watt), tout en évitant de devoir recourir au silicium amorphe généralement utilisé dans les capteurs à couche mince.