Un mois en mer pour élargir son horizon et ses connaissances

© V.Sentilhes

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Embarquée à bord du navire scientifique russe Akademik Treshnikov pour l’ACE Maritime University, Oriane Etter, étudiante à l’EPFL, a passé un mois à étudier les sciences de la mer avec 48 autres étudiants du monde entier. Arrivé hier au Cap, en Afrique du sud, le bateau repart le 20 décembre pour l’Antarctic Circumnavigation Expedition (ACE), une grande expédition scientifique de trois mois autour du continent de glace.

«Penser qu’on a 5'000 mètres d’eau sous les pieds, ça donne le vertige.» Oriane Etter est étudiante en master au Laboratoire de physique des systèmes aquatiques de l’EPFL. Mais la jeune femme vient de passer un mois très loin des couloirs et salle de cours de l’Ecole. Elle était à bord de l’Akademik Treshnikov, l’impressionnant navire scientifique russe affrété pour l’Antarctic Circumnavigation Expedition (ACE) et a participé à l’ACE Maritime University.

Avant le grand départ, le 20 décembre, de l’expédition ACE, qui emmènera une soixantaine de scientifiques pour un voyage de trois mois autour du continent antarctique, le bateau a été amené de Bremerhaven, en Allemagne, où il était stationné, au Cap, en Afrique du Sud, où il est arrivé hier. Ce trajet du nord au sud de la planète a été l’occasion, pour 49 étudiants du monde entier spécialisés dans les sciences de l’eau – océanographie, hydrologie, climatologie…- de participer à une université maritime unique en son genre. Oriane était la seule étudiante de l’EPFL à en faire partie.


A Bremerhaven, en Allemagne, avant le départ, Oriane en discussion avec Philippe Gillet, directeur ad interim du Swiss Polar Institute.

Elle, son truc, c’est les lacs. Son sujet de master porte d’ailleurs sur une région bien spécifique du Léman, choisie pour étudier l’impact des rejets urbains sur le milieu lacustre. L’océan à perte de vue, c’était pour elle une grande première... "Nos discussions entre étudiants et les cours que nous avons pu suivre à bord m'ont fait prendre conscience de la grande variété des sujets d’études concernant les océans", réagit-elle quelques heures avant la fin du voyage.



Coucher de soleil au passage de l'équateur

Atteinte de bougeotte

Originaire de Fribourg, l’étudiante a toujours eu un intérêt marqué pour les questions environnementales. C’est pour elle une «éthique de vie», qui se traduit non seulement par son inscription en Sciences et ingénierie de l'environnement à l’EPFL, mais également par une grande envie de bouger et quelques projets très concrets. Oriane Etter a notamment fait un séjour en Norvège avec le programme Erasmus, où elle s’est initiée aux bases de l’océanographie. Avant cela, elle s’est accordée une année sabbatique, durant laquelle elle est partie plusieurs mois faire du volontariat dans des fermes biologiques en Allemagne, ainsi qu’en Nouvelle Ecosse, au Canada, où elle est devenue guide pour l’observation des baleines dans la baie de Fundy.

A peine 25 ans, et déjà de nombreuses expériences à son actif, auxquelles s’ajoute l’ACE Maritime University. Avant le départ, Oriane disait se réjouir des nouveaux contacts que cette aventure allait lui permettre de nouer, d’apprendre à manier les instruments océanographiques, ainsi que du côté résolument pluridisciplinaire des équipes et du travail à bord. De ces aspects-là, elle aura été servie…


Oriane, collectant des échantillons dans le cadre des sessions de travail en équipes sur le pont.

«Je suis frappée par la diversité des parcours de tous les participants, ainsi que par le contenu des discussions que nous avons sur l’éducation, le sens critique, le rôle de la science et les changements climatiques notamment», relève l’étudiante, alors que le bateau évoluait encore au large de la Namibie. «Dans le quotidien, on peut facilement avoir la sensation que les gens sont indifférents aux questions environnementales et aux problèmes sociaux en général, et c’est décourageant, poursuit-elle. Ici, on se rend compte que l’on n’est pas seul, qu’on partage les mêmes interrogations, les mêmes volontés d’agir. C’est extrêmement inspirant.»


Prélévement d'échantillons avec des filets Bongo.

Retour aux sources

Parmi les moments marquants, elle retiendra l’observation de tornades en formation au large de l’Angola, sur la ligne où la mer rencontre le ciel. «C’était absolument fascinant, et aussi inquiétant, car on sait que si elles se développent, on est mal!» Elle mentionne aussi certaines présentations, comme celle de Kyle Neumann, étudiant de l’Université de Californie, qui réalise des prises de vues sous-marine à l’aide de ROVs, des petits robots téléguidés dotés de caméras.

Et puis, il y a aussi tout l’environnement humain qu’apporte ce type d’expérience et de vie en commun. «Les parties de jeu de carte, comme le jass, sont mémorables. Par le jeu, et à grand renfort de plaques de chocolat, nous avons en quelque sorte converti les gens à la culture suisse.»

Coucher de soleil au large de la Mauritanie, et cours de swing sur l'hélipont. Oriane avec un étudiant de l'Université de Zurich.

Ce voyage, note-t-elle, est comme un retour aux sources. «Nous sommes totalement pris en charge, tout en étant exposé aux forces des éléments. Les sens sont exacerbés. La nourriture devient une expérience nouvelle. La mer change si vite, il y a tellement de textures, d’émotions et de couleurs, qu’elle n’est jamais la même. Et puis, le fait d’être ici, en huit clos, sans connexion internet, nous force à échanger, se parler, attendre, écrire des messages papiers et la propagation des informations par le bouche à oreille devient une expérience authentique. On est obligé de s’investir pleinement.»


Tous les étudiants de l'ACE Maritime University, à l'occasion de la cérémonie du passage de l'équateur.

Photos: (c)V.Sentilhes

L'expédition ACE est à suivre sur le site: http://spi-ace-expedition.ch/