Un clonage contrôlé pour des thérapies géniques plus sûres

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Les thérapies géniques peuvent être beaucoup plus sûres, grâce à une nouvelle méthode mise au point à l’EPFL. Les chercheurs ont utilisé les propres cellules souches du patient.

La thérapie génique ex vivo est une technique où des cellules sont prélevées sur le patient, afin que ses gènes déficients soient remplacés par des gènes sains. Les cellules souches sont cultivées en laboratoire et réinsérées dans l’individu. Cette méthode présente toutefois des risques, comme la leucémie ou des mutations. En effet, la plupart des cellules souches ne peuvent pas être cultivées efficacement avec les technologies actuelles - il en résulte un mélange de cellules saines et malades. Des chercheurs de l’EPFL ont développé un procédé qui permet de sélectionner précisément les cellules porteuses des gènes sains, ce qui réduit les risques de la thérapie génique. Testée avec succès pour une maladie de la peau, leur méthode est publiée dans EMBO Molecular Medicine.

Yann Barrandon de l’EPFL et du CHUV a dirigé une équipe de chercheurs qui a développé une stratégie de clonage sans risque pour la thérapie génique ex vivo, applicable en toute simplicité avant que les cellules ne soient transplantées dans le corps du patient. Cette technique comporte une série de tests de contrôle de qualité rigoureux, inspirés des protocoles appliqués par les compagnies de biotechnologies pour produire des protéines médicinales au moyen de cellules de mammifères génétiquement modifiées.

Ces contrôles de qualité doivent satisfaire à différents critères de sélection avant que les cellules ne soient réinsérées dans l’individu touché. Plus précisément, les cellules souches modifiées génétiquement doivent montrer un fort potentiel de croissance, produire la protéine nécessaire pour lutter contre la maladie, assurer à long terme une régénération des tissus du patient, garantir une correction durable de la maladie, ne pas «s’immortaliser» ou présenter tout autre risque de former une tumeur, avoir bien intégré les nouveaux gènes à leur génome et ne pas se disséminer dans le corps.

Les scientifiques ont ainsi éprouvé leurs tests et critères sur des cellules souches issues de la peau d’un enfant de quatre ans souffrant d’une maladie potentiellement mortelle, l’épidermolyse bulleuse dystrophique, qui rend la peau extrêmement fragile. Les cellules de l’enfant ont été isolées, soumises aux tests de qualité, puis implantées dans des souris pour voir si des tumeurs se formaient. Résultat: après plus de 100 jours, aucune trace cancéreuse n’a pu être observée.

Cette étude montre que la sécurité et l’efficacité de la thérapie génique ex vivo dépend d’une d’une culture homogène de cellules clonées, plutôt que que de d’échantillons mixes. Cette méthode est toutefois plus astreignante. Le laboratoire de Yann Barrandon est aujourd’hui l’un des seuls au monde à pouvoir créer et maintenir des cultures d’un seul type de cellules souches.

Les chercheurs vont désormais devoir tester leur méthode sur de vrais patients. Ils comptent développer un protocole qui facilite le transfert de leur technologie à d’autres laboratoires. Le travail se poursuit avec des ingénieurs de l’EPFL, qui mettent au point un test clinique pilote. « Il s’agit ici d’une démonstration de faisabilité, explique Yann Barrandon. L’avantage est que n’importe quel laboratoire peut désormais adapter notre stratégie aux maladies souhaitées »

Cette étude est une collaboration entre l’EPFL, le CHUV, l’Université de Modène et de Reggio d’Emilie ainsi que Généthon (France). Elle a été soutenue par le CHU, l’EPFL, l’EEC et la Fondation Enfants Papillons.

Source

Droz-Georget Lathion S, Rochat A, Knott G, Recchia A, Martinet D, Benmohammed S, Grasset N, Zaffalon A, Besuchet Schmutz N, Savioz-Dayer E, Beckmann JS, Rougemont J, Mavilio F, Barrandon Y. A single epidermal stem cell strategy for safe ex vivo gene therapy.EMBO Molecular Medicine 27 February 2015. DOI 10.15252/emmm.201404353