«Nos protéines ont servi à développer un nouveau test sérologique»

Florence Pojer, cheffe du  laboratoire PTPSP © 2020 Alain Herzog

Florence Pojer, cheffe du laboratoire PTPSP © 2020 Alain Herzog

À l’EPFL, le laboratoire PTPSP produit des protéines pour la recherche. Il a été sollicité dès le début de la crise du coronavirus pour fabriquer, purifier et envoyer des protéines de SARS-Cov2 aux chercheurs suisses. Florence Pojer, cheffe de l’unité, explique comment son équipe a géré cette période particulière.

La plateforme technologique de la production et structure des protéines (PTPSP) de l’EPFL s’occupe de purifier et caractériser toutes sortes de protéines qu’il envoie aux laboratoires de toute la Suisse. « Ce service est une sorte de hub, nous sommes les seuls en Suisse à fournir une production à large échelle de protéines de cellules de mammifères, grâce à l’expertise unique de David Hacker » note Florence Pojer, cheffe du PTPSP. Mi-mars, lorsque la crise du coronavirus a frappé, son équipe s’apprêtait à fermer les installations lorsque la chercheuse a reçu un appel téléphonique lui demandant si elle pouvait produire des protéines pour faciliter la recherche autour du coronavirus. « Nous avons donc remis en marche immédiatement les machines, et dès la fin mars nous avions les premiers milligrammes de protéines SARS-Cov2 ». Déterminer les propriétés de certaines d’entre elles permettra en effet de mieux cibler les points faibles du virus afin de trouver un vaccin ou un médicament. Tout récemment une équipe du CHUV a d’ailleurs mis au point un nouveau test sérologique «particulièrement sensible », en collaboration avec le Swiss Vaccine Research Institute, grâce à des protéines produites par le PTPSP.

Durant les deux derniers mois l’unité a produit, purifié et distribué notamment des protéines Spike, soit la clé qui permet au SARS-CoV-2 de pénétrer dans nos cellules. Elles ont été utilisées pour des tests sérologiques dans le cadre d’une étude au CHUV et à l’Hôpital universitaire de Zurich. « Ces protéines de très haute qualité, habituellement très couteuses, ont été distribuées gratuitement à tous les laboratoires académiques de suisses grâce aux efforts de la Faculté SV» D’autres types de protéines du SARS-Cov2 pour la recherche de médicaments ainsi que des anticorps, en collaboration avec l’équipe de de Pierre Cosson à l’Université de Genève, ont également été produits. « Au début nous n’étions que trois chercheurs autorisés à nous rendre sur le campus, puis trois autres nous ont rejoint. C’est magnifique de pouvoir compter sur une équipe, notamment Kelvin Lau, même dans les moments difficiles », s’enthousiasme la cheffe du service.

Quel a été le challenge le plus important durant ces deux mois ? « Nous assurer de pouvoir livrer les protéines avant la fermeture du bureau de poste de l’EPFL à midi », note-t-elle dans un sourire. « Plus sérieusement, je pense que c’est le jonglage entre les enfants à la maison, le travail sur le campus, auxquels s’ajoute la préparation des trois repas par jour pour une famille de six. Par contre je remercie la façon dont la Faculté SV a géré cette crise, notamment en nous permettant de nous concentrer aussi sur notre vie de famille ».

Une nouvelle normalité s’installe

En temps normal, l’équipe du PTPSP a également pour mission d'aider, de conseiller et de faire le lien entre les recherches en sciences des protéines et en biologie structurale intégrative. « Nous travaillons actuellement encore en deux équipes, mais nous pouvons couvrir toutes les activités car fort heureusement la plupart d’entre nous sommes polyvalents ». Les apprentis sont de retour, les instruments sont à nouveau ouverts pour tous les utilisateurs et fin juin, les projets de bachelor pourront également redémarrer. La période a été à la fois pleine de challenge et stimulante. « Notre équipe est soudée et nous avons commencé de nouvelles collaborations qui sont amenées à durer », se réjouit-elle.