Maîtriser l'énergie du soleil: le Swiss Plasma Center forme la relève

Riccardo Agnello teste des prototypes de chauffage pour ITER © 2020 Consorzio RFX

Riccardo Agnello teste des prototypes de chauffage pour ITER © 2020 Consorzio RFX

Titulaire d’une thèse récente du Swiss Plasma Center de l’EPFL, Riccardo Agnello poursuit son parcours en travaillant pour le réacteur à fusion nucléaire ITER. Le Swiss Plasma Center contribue largement à ce projet international faramineux, porteur d’un grand espoir: celui d’une énergie propre et abondante, sans déchets radioactifs à long terme.

Alors que l’assemblage d’ITER, le réacteur géant à fusion nucléaire, a démarré dans le sud de la France, suscitant l’attention médiatique, les scientifiques planchent sur la suite des opérations. La mise en route de la machine nécessitera des techniques hautement complexes, préalablement testées dans divers pôles de recherche. Riccardo Agnello officie en tant que chercheur détaché de l’EPFL à Padoue, dans le nord de l’Italie. Le jeune docteur en physique formé au Swiss Plasma Center poursuit sa carrière au sein d’un consortium spécialisé dans le développement d’un système de chauffage pour ITER. « Ici le calendrier est serré, imposé par toute la communauté de la fusion. La recherche avance vite», témoigne le jeune physicien. Son espoir, comme celui de tous les acteurs impliqués: que l’exploitation de la fusion nucléaire, réaction qui prévaut au cœur du soleil et de toutes les étoiles, devienne une réalité. Ce procédé est susceptible de fournir à l’humanité une énergie presque infinie, sans émissions de CO2 ni déchets radioactifs sur le long terme. 

Transfert de compétences 

ITER constitue un pas important dans cette direction. Ce réacteur expérimental de 30 mètres de diamètre sur 30 de hauteur vise à prouver la faisabilité de la fusion, jusqu’ici développée dans des engins plus petits. Ce qui pose de nombreux défis. Parmi ceux-ci, les méthodes de chauffage du plasma, une soupe de particules très chaude indispensable à la fusion. Sur terre, le plasma doit atteindre environ 150 millions de degrés, soit dix fois la température du soleil, pour que la fusion produise de l’énergie. Comment engendrer et maintenir une telle température, en optimisant le rendement énergétique? C’est là qu’intervient le travail de Riccardo Agnello et de ses pairs. A Padoue, dans un bâtiment de 17 500 m², sont entreposées deux grandes machines, qui testent des systèmes de chauffage pour le plasma d’ITER, dit « par injection de neutres ». Un domaine dans lequel Riccardo Agnello, dont la thèse a porté sur des thématiques jumelles, transfère directement ses compétences. « En tant que physicien, je m’occupe de développer, d’analyser, d’utiliser des données de ces machines. Pour moi, c’est l’opportunité d’un côté de poursuivre mes recherches et de l’autre, d’utiliser toute l’expérience que j’ai acquise au cours de ma thèse au Swiss Plasma Center» , souligne-t-il. 

Le Swiss Plasma Center de l'EPFL, référence internationale

ITER représente une des plus grandes aventures scientifiques internationales jamais entamées. Au cœur de ce dispositif, le Swiss Plasma Center joue un rôle clé. Le centre de l’EFPL est l’un des laboratoires de recherche les plus importants au monde dans le domaine de la fusion. « Nous sommes directement liés à ITER par nos recherches mais aussi par notre rôle institutionnel de formateur de jeunes scientifiques et ingénieurs, dont une partie vont alimenter ou renforcer les équipes du projet, comme Riccardo», souligne Ambrogio Fasoli, directeur du centre. Pour ce faire, le laboratoire dispose d’un atout phare: son propre tokamak, un réacteur expérimental nommé TCV, qui constitue une version miniature d’ITER. Un pedigree qui lui a permis d’être retenu comme l’une des trois machines nationales en Europe impliquées dans la mise au point d’ITER.

Participation directe à ITER

Dans son tokamak, le Swiss Plasma Center étudie les manières de chauffer le plasma, mais aussi de le confiner et de le maintenir en place. Cette « soupe de particules » très chaude et instable est maintenue éloignée des parois du réacteur par un champ magnétique. Le défi: éviter que le plasma ne touche et détériore les parois, le garder à sa place, tout en limitant la perte d’énergie. Pour y répondre, le Swiss Plasma Center développe et utilise diverses techniques, dont l’injection de neutres et l’injection de micro-ondes. Des systèmes qui seront repris quasiment tels-quels au sein d’ITER. Le laboratoire de l’EPFL développe aussi des algorithmes qui amélioreront les systèmes de contrôle du plasma d’ITER, en temps réel dans le réacteur. Enfin, un groupe de recherche du Swiss Plasma Center basé à Villigen, dans le canton d’Argovie, teste les aimants supraconducteurs du futur réacteur international. Des composants fondamentaux de la machine, qui génèrent le champ magnétique permettant de confiner son plasma. « C’est une implication importante de notre part, qui se traduit par un contrat avec ITER et amène un soutien financier important à notre centre», précise Ambrogio Fasoli.