Les maths au service de la forêt

Les températures extrêmes impactent fortement la végétation. Résultat : avec le changement climatique, certaines essences disparaissent de certaines forêts suisses. Des modèles mathématiques développés à l’EPFL viennent au secours de la canopée.

En 20 ans, la moitié des pins sylvestres de la forêt de Viège a disparu. La faute au changement climatique ? Oui mais… Pendant longtemps, les biologistes se sont intéressés à la progression des températures moyennes. Aujourd’hui, il est reconnu que ce sont principalement les situations climatiques extrêmes qui modifient la végétation.

Jacques Ferrez, de la chaire de statistique à l’EPFL et de l’Institut fédéral de recherches WSL, publiera prochainement les résultats d’une étude mathématique basée sur 10 années de données prélevées dans 14 forêts suisses. « Des thermomètres ont été placés simultanément dans la forêt et à l’extérieur, depuis plus de 10 ans. Nous sélectionnons les températures extrêmes journalières, et parmi ces données, nous n’utilisons que les événements hors du commun. Nous nous basons en quelque sorte sur les maximums des maximums ou les minimums des minimums » explique Jacques Ferrez. « Au final, des outils statistiques permettent de comparer l’influence des différents écosystèmes sur les extrêmes de température qui règnent sous la canopée. Grâce à ces mesures, on observe si certains seuils limitant pour la survie ou la mort d’un arbre sont dépassés».

Les résultats nous amènent à comprendre comment la forêt régule le climat qui y règne. Or une meilleure connaissance de l’influence de ces températures extrêmes sous la canopée aide les forestiers dans la prise de décision. Ils évitent ainsi de maintenir des essences qui sont de toute façon amenées à disparaître. Les urbanistes peuvent également affiner leur choix d’arbres dans le développement de parcs et autres zones de récréation.

« Les pins sylvestres par exemple ne supportent pas des températures trop élevées. Durant les 20 dernières années, le nombre de jours dont la température moyenne dépasse 20°C a doublé à Viège. Or l’arbre a une certaine capacité à résister à ces températures extrêmes mais quand c’est trop… c’est trop. Une fois que le seuil est dépassé, l’arbre ne résiste plus et meurt. C’est ainsi que la moitié des pins sylvestres de la forêt de Viège a disparu», précise Martine Rebetez, de l’Institut fédéral de recherches WSL, hôte de l’EPFL. « Autre exemple : les forêts tessinoises voient apparaître de plus en plus de palmiers. Or les jeunes pousses meurent si elles subissent plusieurs jours consécutifs à -5°C, ce qui était le cas autrefois. Aujourd’hui, le Tessin, dans la région de Locarno et d’Ascona, ne subit plus de telles conditions climatiques, ces essences tropicales se développent donc sans limite».

Nos forêts changent. C’est un fait ! Nous devons simplement accompagner au mieux ces évolutions, et ces études statistiques réalisées à l’EPFL nous permettent de le faire dans les meilleures conditions.


Auteur: Bastien Confino

Source: EPFL