La naissance et la mort des protéines dans une seule cellule
Une nouvelle méthode développée par les bio-ingénieurs de l'EPFL a permis de démêler l'équilibre entre la synthèse et la dégradation des protéines dans les cellules individuelles.
La quantité de protéines à l'intérieur des cellules fluctue dans le temps, ce qui affecte diverses fonctions des cellules elles-mêmes. Les cellules synthétisent et dégradent constamment les protéines, et des études ont montré que cette évolution en dents de scie a en fait un impact sur la fonction de la cellule elle-même.
En ce qui concerne les cellules souches, la variation constante des facteurs de transcription (protéines qui régulent l'expression des gènes) a des conséquences importantes sur leur capacité à se différencier en cellules matures. Mais ce que nous ne savons pas, c'est comment la synthèse et la dégradation des protéines travaillent ensemble pour réguler ces fluctuations.
Le laboratoire de David Suter à l'EPFL, en collaboration avec l'équipe de Félix Naef a développé une nouvelle méthode qui permet de distinguer les changements dans la synthèse des protéines des changements par rapport à la dégradation des protéines dans les cellules vivantes. La méthode, publiée dans Molecular Cell, utilise une minuterie fluorescente combinée à un marquage fluorescent à base d'impulsions, qui est une technique permettant de suivre un processus cellulaire se déroulant dans le temps.
En utilisant leur nouvelle méthode, les scientifiques ont fait deux découvertes. Premièrement, les taux de synthèse et de dégradation des protéines changent de façon significative au cours du cycle cellulaire, près de la moitié d'entre elles s'arrêtant pour se dégrader pendant la mitose.
La deuxième découverte est que les taux de dégradation des protéines diffèrent grandement d'une cellule à l'autre. Cette variabilité affecte toutes les protéines dans la même mesure, ce qui suggère des fluctuations dans l'activité des protéasomes - les complexes protéiques qui dégradent les protéines inutiles ou endommagées. Remarquablement, ces différences sont compensées par des changements correspondants dans les taux de synthèse des protéines, ce qui permet de minimiser la variabilité des niveaux d'expression des protéines entre les cellules.
"On peut comparer cela à deux usines," explique David Suter. "L'usine A fabrique beaucoup de produits X de mauvaise qualité, ce qui signifie qu'ils sont rapidement hors service. L'usine B fait moins de produit Y de haute qualité, qui fonctionne pendant une plus longue période."
Canadian Institute of Health Research (CIHR)
SystemsX.ch
Pierre Mercier foundation
Teofilo Rossi di Montelera e di Premuda Foundation (advised by CARIGEST SA)
Andrea Brigitta Alber, Eric Raphael Paquet, Martina Biserni, Felix Naef, David Michael Suter. Single live cell monitoring of protein turnover reveals intercellular variability and cell cycle dependence of degradation rates. Molecular Cell 23 August 2018. DOI: 10.1016/j.molcel.2018.07.023