La 5000e thèse EPFL soutenue aujourd'hui

Arne Vogel, auteur de la 5000e thèse - © Alain Herzog

Arne Vogel, auteur de la 5000e thèse - © Alain Herzog

A l’occasion de la 5000e thèse soutenue aujourd’hui, Jacques Giovanola, Doyen de l’Ecole doctorale, revient sur l’évolution du doctorat et les mesures prises par l’EPFL pour s’adapter à ces changements. Interview.

Pourquoi dit-on que si le doctorat va bien, toute l’institution va bien?
Jacques Giovanola - Nos doctorants sont brillants. Ils sont le levain de l’EPFL. Ce sont des vecteurs d’innovation. Ce sont eux qui seront les professeurs et les chercheurs de demain et qui encadreront à leur tour des étudiants et des doctorants. Alternativement, ce sont eux qui devront initier le renouvellement de nos entreprises pour leur permettre de relever des défis toujours changeants. Sans les doctorants, l’EPFL ne serait pas où elle est.

Quelle est la vocation de l’Ecole doctorale?
Jacques Giovanola - Le doctorat a évolué durant ces vingt dernières années. Avant, un doctorant était un collaborateur scientifique qui faisait sa thèse. Aujourd’hui, le doctorant est un professionnel en formation et il importe de le préparer aux défis qui l’attendent. 60% d’entre eux poursuivront leur carrière dans le secteur privé ou public, dans les grandes entreprises, les start-up ou les PME, et il importe que ces 60% soient aussi préparés à un environnement bien différent du monde académique. En outre, la recherche se fait de plus en plus en équipes et les percées sont le résultats de collaborations interdisciplinaires. L’EPFL s’est adaptée à cette évolution en mettant sur pied une Ecole doctorale. Depuis 2003, tout étudiant qui souhaite faire une thèse doit s’inscrire à un des programmes doctoraux.

Qu’apportent les programmes doctoraux à un doctorant?
Jacques Giovanola - Ils vont être un soutien pour les doctorants. Une de nos missions est de promouvoir l’interdisciplinarité. Il n’est plus possible de faire sa thèse seul dans son coin. Les échanges sont essentiels pour partager ses idées et acquérir les connaissances nécessaires pour faire ses recherches. Les programmes doctoraux vont permettre aux étudiants de pouvoir tisser des réseaux entre des disciplines diverses. Des cours et des séminaires interdisciplinaires sont organisés. Le programme de photonique, par exemple, permet de réunir des acteurs des disciplines concernées en Sciences de base (SB) et en Sciences et Techniques de l’Ingénieur (STI). Il reste cependant encore beaucoup à faire dans ce domaine d’émulation scientifique.

Est-ce que la sélection des candidats s’opère à travers ce programme?
Jacques Giovanola - Oui. Le candidat devra soutenir son projet de thèse, ce qui lui permet de s’assurer de la validité de son sujet et de rectifier le tir au besoin. Notre rôle est un rôle de proximité avec les doctorants. Nous les accompagnons tout au long de leur thèse sous forme d’un parrainage qui leur permet d’avoir des personnes de référence auxquelles ils peuvent s’adresser. Notre campus compte plus de 120 nationalités différentes, et ce ne sont pas moins de 1900 doctorants qui travaillent sous la direction de 350 directeurs de thèses. Autant dire que ce brassage culturel nécessite certaines adaptations, vu les horizons très différents dont proviennent les candidats. Notre objectif est de veiller à la qualité de la formation afin que nos doctorants puissent faire les meilleures thèses possibles, dans les meilleures conditions qui soient.

Comment voyez-vous votre rôle de doyen de l’Ecole doctorale?
Jacques Giovanola - Mon rôle est multiple, mais une des tâches qui me tient très à coeur est de m’assurer que les doctorants trouvent un emploi au niveau de leur formation une fois leur doctorat en poche. Et ceci se prépare dès la première année du doctorat. Le directeur de thèse doit demander à son doctorant quel est son plan de carrière. Il est impératif qu’il ait un projet professionnel qu’il affinera tout au long de la préparation de sa thèse. C’est pour cela que l’Ecole doctorale dispense également des formations pour apprendre aux doctorants à se profiler sur le marché du travail. Ils se doivent d’acquérir les compétences indispensables qui leur permettront d’apprendre à valoriser leurs recherches et de faire comprendre à leurs futurs employeurs ce qu’ils pourront leur apporter, quelle est leur valeur ajoutée. Je trouve qu’il n’y a rien de plus décevant que de voir de jeunes docteurs s’inscrire au chômage.

L’Ecole doctorale a-t-elle des liens avec l’industrie?
Jacques Giovanola - Nous avons un comité qui travaille avec des industriels pour mener une réflexion sur ce qu’attend l’industrie de nos doctorants et sur la manière dont ils doivent aborder ces attentes tout en faisant valoir leur acquis scientifiques. Les grandes entreprises et les start-up embauchent régulièrement nos doctorants. Mais nous avons encore du travail à faire pour transformer les mentalités au niveau des PME. J’ai à coeur de voir se concrétiser notre collaboration avec le Quartier de l’Innovation de l’EPFL. Nous nous préparons à mettre sur pied des conditions-cadre afin que nos doctorants puissent faire leur thèse en collaboration avec des entreprises qui se trouvent au Quartier de l’Innovation, soit directement dans l’entreprise au Quartier de l'Innovation, soit sur le campus. Ceci constituera une opportunité de premier ordre pour nos doctorants. Et une illustration des liens vivants que l’EPFL tisse avec l’industrie afin de faire circuler les savoirs.

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Evolution du doctorat à l’EPFL

L’Ecole doctorale en 2003 et est devenue obligatoire pour tout doctorant EPFL en 2006. Elle compte 18 programmes doctoraux.

La première thèse (Thèse no. 1, présentée à l’Ecole d’ingénieurs de l’Université de Lausanne) est celle de Roland Zehnder-Spoerry en 1920. La thèse est disponible aux lecteurs sur le site web de la Bibliothèque. La thèse no 5000 sera celle Arne Vogel, en génie mécanique.

Les effectifs :
1995 : 550 doctorants
2000 : 735
2005 : 1422
2010 : 1901
Soit une croissance de 245% sur les derniers 15 ans.

Nombre de thèses selon les années:
1970 : 14 (une par mois)
1980 : 38
1990 : 76
1995 : 132 (deux par semaine)
2000 : 208
2005 : 268
2010 : 363 (une par jour !)

Plus de la moitié des docteurs EPFL l’ont été au cours de ces dix dernières années:
Jusqu’à 1969 : 2%
1970 à 1979 : 6%
1980 à 1989 : 10%
1990 à 1999 : 28%
2000 à 2009 : 54%

Pourcentage de doctorants étrangers:
1990: 65% de nos docteurs étaient Suisses ou résidents, et 36% non-résidents.
2009: 37% étaient Suisses ou résidents, 63% non-résidents.

Le carrière des diplômés docteurs EPFL:
Selon les informations dont nous disposons:
72% travaillent en Suisse
15% en Europe occidentale
8% aux Etats-Unis et au Canada.

40% poursuivent une carrière académique.
60% travaillent dans le secteur privé ou public.